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Critique de 5Arabella


La pièce Le Belvédère a été écrite pour une création prévue à Dresde en 1929. Elle a été finalement éditée en 1970 et jouée pour la première fois en 1969 à Graz. le village d'Europe centrale dans lequel Ödön von Horváth situe l'action a été inspiré par Murnau en Haute-Bavière, que connaissait très bien l'auteur. Certains personnages de la pièce peuvent même être identifiés, comme le garçon Max, qui aurait eu pour modèle un serveur impertinent, qui avait l'habitude d'effectuer son service sans chaussures.

Le premier acte expose la situation. Strasser, le propriétaire de l'hôtel du Belvédère est au bord de la faillite. Il a une seule cliente, Ada, baronne von Stetten. La vieille femme appâte tous les hommes présents par sa fortune, en a fait ses amants, et les manipule avec cruauté. En plus de Strasser, il y a Max le garçon, et Karl, le chauffeur. Ils sont tous les deux un passé trouble. Arrive Müller, un représentant, qui réclame de l'argent à Strasser, qui ne peut le payer, puis Emmanuel, le frère d'Ada, qui a besoin d'argent ; sa soeur joue avec lui, ne lui disant ni oui ni non. L'acte se termine par l'arrivée de Christine, une jeune femme pauvre, avec qui Strasser a eu une liaison.

Au deuxième acte, l'action se resserre autour de Christine. Ada veut que Strasser la mette à la porte, Emmanuelle suggère que les hommes présents fassent semblant de reconnaître en elle une ancienne maîtresse, ce qui permettra à Strasser s'en débarrasse sous prétexte de mauvais conduite. Les hommes s'en donnent à coeur joie sous le regard goguenard d'Ada. Mais la scène a une fin inattendue : Christine a hérité une jolie somme et elle était venue dans le but de remettre à flot l'hôtel de Strasser. Après le traitement qu'elle a subi, elle veut prendre le premier train le lendemain matin pour repartir.

Au troisième acte, les hommes tentent tous de convaincre Christine de prendre le train en question en leur compagnie. Ada est délaissée et humiliée à son tour. En tentant de séduire la jeune femme, chacun des protagonistes se révèle tel qu'il est. Elle décide de partir toute seule et d'élever l'enfant qu'elle a eu de Strasser.

Plus qu'une comédie de moeurs, c'est une farce cruelle. Elle met en évidence les différentes façons dont les hommes utilisent et instrumentalisent les femmes. Strasser le charmeur, au fond totalement impitoyable sous des allures avenantes, Karl qui veut s'imposer par la force, Müller qui veut les réduire à des épouses soumises et conventionnelles sans aucune liberté, Emmanuel qui veut les attirer par un titre une position sociale, des manières policées et en échanger les dépouiller… C'est à chaque fois un jeu de dupes. C'est aussi un tableau pitoyable d'une société en décomposition : le noble ruiné, décadent, prêt à tout pour conserver sa manière de vivre, l'individu dangereux et prêt à basculer dans la violence pour obtenir ce qu'il désire, et tous les autres, capables de tous les mensonges et de toutes les compromissions pour un gain plus ou moins dérisoire, prêts à s'avilir devant n'importe qui possédant un peu d'argent, la seule valeur qui a cours. Au final, l'opportunisme et l'absence de toute éthique, ne va amener tous ces personnages qu'à une impasse, à un échec sans recours.

Excellente pièce.
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