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Critique de Piatka


Du très bel ouvrage à l'écoute des autres, tout simplement !
Je suis sincèrement émerveillée par l'alliance d'un style sobre et poétique et d'une imagination si sensible aux problèmes profondément humains.
Pas de fioritures inutiles, les phrases peuvent être courtes, les mots choisis, voire inventés, les trouvailles poétiques originales.
Un petit goût de Désert me semble-t-il, qui m'a beaucoup plu.

Le dernier Le Clezio offre un livre en deux novellas, longues nouvelles d'une centaine de pages chacune, liées subtilement par la mer, ses bienfaits, ses dangers, et les vicissitudes des femmes pour survivre, se construire, prendre un nouveau départ, que ce soit sur l'île d'Udo au large du Japon ou en France - deux destins de jeunes filles tourmentées par l'ignorance de leurs origines, leur impuissance à maîtriser leurs vies, cherchant leur salut auprès de la mer pour l'une, dans le feu pour l'autre.

" La nuit tombe sur l'île. ", l'incipit épuré du premier texte Tempête. le narrateur, monsieur Kyo, revient sur l'île trente ans après la disparition de Mary, sa compagne disparue volontairement en mer, sans explication. Il avait vingt-huit ans, elle en avait quarante, il sortait de cinq années de prison pour avoir assisté à un viol sans être intervenu. Il rencontre June, jeune adolescente sans père, qui survit grâce à la vente des ormeaux que sa mère pêche, souvent au péril de sa vie. Une belle amitié salvatrice naît au fil des rencontres entre le solitaire vieillissant et la jeune sauvageonne qui vont se permettre mutuellement de croire en la vie et à nouveau en eux-mêmes, tout simplement, pour poursuivre chacun leur chemin.
Écrit à la première personne, renforçant ainsi la proximité avec le lecteur, le récit donne tour à tour la parole à Kyo et June, mêlant avec finesse leurs sentiments, leurs réflexions, leur détresse aussi.

" J'ai tressailli devant la mer. " À nouveau la simplicité pour aborder le deuxième texte La femme sans identité. de l'Afrique à la région parisienne, Rachel, née d'un viol, n'a jamais connu sa mère, et est élevée par la famille de son père au Ghana, jusqu'au départ pour la France. Privée d'amour maternel, elle s'est construite bancale, mais avec le soutien et la tendresse de sa demi-soeur Bibi. À Paris, commence alors une vie d'errances, d'incertitudes et de révolte, livrée ici aussi à la première personne. " Il fallait d'abord exister " avant de pouvoir accepter, et renaître, peut-être.

Plus violent, empreint de noirceur, le deuxième récit est le côté pile du livre, une autre facette de la quête de rédemption qui anime selon moi ces deux novellas, ni tout à fait romans, ni tout à fait nouvelles, mais animés d'une force digne d'une tempête pour aller de l'avant. Car, comme l'affirme monsieur Kyo :
" C'est pour cela que je reviens. Non pas pour retrouver le passé, non pas pour flairer une piste comme un chien. Mais pour être sûr que je ne reconnaîtrai rien. Pour que la tempête efface tout, définitivement, puisque la mer est la seule vérité. "
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