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Critique de Lou987


Lou987
19 septembre 2017
[ Une critique qui vaut pour les deux cycles!]

Parler BD, ce n'est pas simplement évoquer les best-sellers au succès médiatique retentissant. Parler BD, c'est également défendre des auteurs talentueux mais plus discrets. Lorsque Jacamon (dessinateur) et Matz (scénariste) donnent naissance à la saga le Tueur, ils accouchent d'un bijou. Littéralement. Ce thriller haletant brille par sa qualité artistique, mais surtout, grâce à un scénario du tonnerre. Ces albums regroupés en différents cycles mettent en scène un tueur professionnel qui raconte sa vie au lecteur. Les pages sont donc rythmées par les flashback du passé d'un être froid, calculateur, sans scrupules. L'utilisation du “je”, à la manière des confessions du journal intime, instaure une relation avec le lecteur. le tueur n'apparaît pas si inquiétant, le lecteur commence à le comprendre. La beauté de ce chef-d'oeuvre réside sans doute dans cette ambivalence d'un personnage pas complètement mauvais. le Tueur remet en question la bande-dessinée comme art pictural et frôle les frontières de la littérature.

> Coup de crayon
Au dessin, Jacamon fait preuve de simplicité et d'efficacité. Ses traits secs peuvent paraître simplifiés et peu travaillés, pourtant ce n'est pas le cas. le sentiment d'impersonnalité et de froideur qui s'en dégage reflète avec justesse la figure indifférente et flegmatique du héros. Jacamon a su rendre compte du personnage par son coup de crayon. le dessin sert ici à créer une distance entre le lecteur et le tueur professionnel, que Matz va contre-balancer avec son scénario. Quant aux couleurs, elles sont également maîtrisées, tantôt sombres et grises lorsqu'il s'agit du passé, tantôt chaudes et tropicales lorsqu'il s'agit de paysages exotiques. Rien n'est laissé au hasard, l'utilisation de chaque technique semble justifiée par et pour le tueur.

> Coup de plume
Cela peut sonner d'une manière étrange, mais je pense que le mot définissant au mieux le travail de Matz, est « poésie ». Si cela semble contradictoire et paradoxal avec la profession peu orthodoxe du héros, la force et la valeur de cette BD réside dans la beauté du scénario. Matz sait manier cette matière des mots comme je n'ai encore vu personne le faire dans la BD franco-belge. Rythme, palpitation, cadence, mais aussi, réflexion, lenteur, langueur du temps, doutes, imprègnent les pensées du tueur. C'est grâce à cette plume aiguisée que Matz tisse le lien entre le tueur et le lecteur. La parole habille un personnage impassible et grave, mais rend compte au lecteur que ce héros n'est pas si insensible que cela. Matz a su nuancer une personnalité aux premiers abords hermétique. le lecteur se surprend alors à éprouver une certaine empathie pour ce tueur.

Le Tueur fait partie de ces BD dont on ne soupçonne pas la qualité. Ce fut une excellente surprise et c'est pour cela que je la recommande à quiconque aime la subtilité et l'inattendu en BD. À la limite de la littérature, le Tueur est une bouffée d'oxygène, un régal pour les yeux autant que pour l'esprit. Vraiment, il ne faut plus hésiter. On n'a qu'une vie et ça, le tueur vous le rappelle à chaque page.
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