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Critique de AmelieDeslivres


"Sous le pont" est une pièce de théâtre contemporain créée en 2016 à Bordeaux par Adulrahman Khallouf, un auteur syrien vivant en France depuis 2003. Quand, en 2011, son pays se révolte et subit les premières violences monstrueuses de son régime, il utilise d'abord les réseaux sociaux pour transmettre et diffuser une parole libre des syriens. Puis les premiers réfugiés affluant vers l'Europe et la France, il organise en 2015 des ateliers théâtre avec des réfugiés à Bordeaux. Ainsi nait cette pièce, "Sous le pont".

C'est un texte court, dont le personnage principal, Jamal, est un homme de 25 ans, assis sous un pont-auto au milieu de quelques possessions personnelles : un sac à dos, une couverture, quelques documents, un vieux poste radio. La didascalie initiale précise qu'un écran lumineux permet la tradition simultanée des paroles prononcées en syrien à certains moments par le personnage.

Il est seul et va se trouver confronté successivement à six personnages dont pas un ne s'intéresse vraiment à lui, chacun s'adressant davantage à l'image qu'il se fait du réfugié qu'à l'être vivant qu'il a en face de lui. Chaque rencontre est une violence plus ou moins contenue et une incompréhension de langue et de coeur.

L'homme au pistolet, raciste et frustré, l'utilisera comme défouloir de sa haine quotidienne. le SDF, la bouteille de rouge à la main, après avoir débité un discours sur l'inutilité du vote et de la démocratie, lui volera son sac. le religieux musulman voudra l'amener à la mosquée pour être lui-même "primé" auprès de Dieu. L'immigré, employé de l'administration, celui qu'on imaginerait le plus proche de Jamal, se révèlera manipulateur et plein de contradictions.

Les mots de Jamal adviennent enfin lors d'un unique monologue en arabe où il raconte son histoire. Mais cette histoire est elle-même dénigrée car assumée comme fictive par la prise de note d'un second personnage et ensuite par l'arrivée de l'auteur et du metteur en scène, qui prennent à parti le public et abattent le 4e mur qui sépare les spectateurs des personnages.

Au final, cette pièce m'a laissée sur un avis mitigé : dans la première partie, les personnages se succédant sans jamais avoir de réel contact avec Jamal étaient grinçants mais caricaturaux et j'attendais l'humanité, la faille humaine. Elle n'a pas jailli. Enfin, le "théâtre dans le théâtre" m'a complètement déconnectée de la pièce : en faisant de Jamal un personnage de papier, je n'ai pas pu m'y attacher. Je suis cependant convaincue que cette pièce doit être vue, les mots sur le papier ne prenant vraiment corps que quand ils sont incarnés sur scène par des comédiens.
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