AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Olti


"Infortuné lecteur" ça, on peut le dire...

La 1ère chose qui m'a rebutée dans ma lecture, c'est le style. Je luttais contre le rire pour pouvoir lire... Déjà, jamais une phrase n'est simple : il faut *toujours* un adverbe et des qualificatifs (qui n'apportent rien) pour l'alourdir, ce qui crée une suite de formules toutes faites et clichées.

On "savoure" + "la fraîcheur d'une après-midi" l'hiver. Et on "savoure" + "la chaleur d'une après-midi" l'été. Une "silhouette" est toujours "sombre et solitaire". le passé ne se "considère" qu'avec "amertume". On est "considérablement étonné". On boit "une bonne bouteille de vin vieux". Il y a des "morts atroces", vite on "doit fuir tant qu'il en est encore temps" et... par pitié n'en jetez plus !

j'ai déjà lu ça 20 fois dans le Club des 5, dans des fanfictions et j'en passe ! Un pipotron aurait pu écrire ce livre ! Parce que c'est exactement ça : des expressions galvaudées et bien souvent décalées ou trop emphatiques par rapport à ce qu'elles décrivent. Bref, un coup de T-pex tous les 2-3 mots ne gêne en rien la compréhension.

Ce style ampoulé, un peu désuet et ridicule, enveloppe un fond non moins ridicule, ce qui donne un superbe pack-cadeau il faut bien en convenir. Et si vous ne me croyez pas, voilà un exemple, lorsque l'héroïne se retrouve en France :
" L'herbe fraîchement coupée exhale un bouquet de senteurs (comme si, dans ce coin béni du monde, la nature toute entière devenait un vaste jardin aromatique, destiné à rehausser la saveur d'une salade ou d'un formage fermier) ".

Voilà, tu respires un bout de gazon dans un coin, mais tu ne peux le qualifier qu'en décidant que c'est "la nature tout entière" du pays tout entier (rien que ça) qui est concernée. Hein, c'est important, c'est un roman alors il faut gonfler un peu les métaphores.
Mais outre que cette phrase pompeuse est bien longue et disproportionnée par rapport à la réalité de l'action (y'a une odeur d'herbe coupée, c'est tout), elle sert à sortir une image basée sur le 1er cliché venu. France= bouffe + fromage. Non... mais... c'était parce que le style était cliché qu'il fallait que le contenu le soit aussi ? Bref, faites-moi penser à trouver un rapport entre le gazon américain et l'obésité si je veux tenter moi aussi une métaphore originale et subtile...

Comme tout ça, ce n'était pas suffisant, l'auteur s'est peut-être dit que faire un récit incohérent ce serait super pour "parfaire son idyllique tableau champêtre de la nature humaine plongée avec grand désarroi dans l'incroyable aventure du fantastique" (ne cherchez pas, c'est pas dans le roman... mais ça aurait pu).

Et donc, ni une ni deux, elle commence par nous pondre un contexte en rapport avec Dracula et les vampires. Il y a un livre ancien sur Dracula qui apparaît et disparaît mystérieusement, un gars qui se fait tuer par une bête féroce et mystérieuse, et on a aussi de l'inexplicable. Et le héros, un professeur, est plongé dans tout ça. Il s'inquiète ? Il se demande si le fantastique existe ou s'il ne deviendrait pas fou ? Non, tout est normal. Il apporte le livre étrange (qui lui est apparu par magie donc) dans un institut spécialisé afin de le faire étudier.

Après cet épisode, le type qui a étudié le livre a soudain le teint cireux, il est très amaigri, a les "lèvres cruelles" (oui, y'a des lèvres gentilles et des lèvres cruelles apparemment), flasques et d'un rouge sang. Enfin bref, vous voyez le tableau ? Sur ce notre héros se dit que cet homme est bien malade, oui, il doit avoir... un CANCER.

Oui, voilà, vous le saurez la prochaine fois que vous aurez des cernes énormes, le teint pâle, 2 trous rouges dans le cou, des lèvres cruelles et que vous avez fricoté avec des vampires : vous avez le cancer. Bon alors faut imaginer tout ça avec le style lourdingue, hein, évidemment.

Dracula n'est pas content que le héros fasse des recherches sur sa tombe (parce que c'est ce qu'il fait). D'où des phénomènes inquiétants pour le dissuader de continuer. Sympa ces vampires, quand même, non ? ils dissuadent les gens au lieu de les tuer pour s'en débarrasser, enfin à part l'ami du professeur qui fut tué assez gratuitement, "en guise d'avertissement" se dit le professeur... Logique.

Parce que oui. C'était quand même plus simple pour Dracula, si cette sale histoire l'emmerdait, de ne surtout pas aller tuer directement le gars qui le dérange ! Tuer un ami qui n'a rien à voir, c'est mieux. Comme ça le professeur peut continuer de faire des recherches, embêter Dracula et... et ça fait un roman un peu plus long et pas cher à écrire, pas trop fatigant pour le cerveau non plus.

Donc dès que quelqu'un aide les héros (de préférence un directeur de thèse "au front soucieux" ou un gentil bibliothécaire "au sourire bienveillant" [toi aussi insère ta formule galvaudée préférée]) c'est suivi d'une "disparition mystérieuse" ou d'une "mort atroce" chez les personnages secondaires.

À ce stade, je ne sais pas :
- Soit Dracula s'est dit "Bon, les enfants, cette histoire se terminerait trop vite si je tuais directement le héros, alors je vais exprès tuer les gens qu'on s'en fout et qui traînent autour de lui, histoire qu'on ait un final fight à la fin".
- Soit Dracula a une idée derrière la tête.
- Soit il ne fait pas exprès, il est très maladroit.

Ou alors Dracula, c'est quelqu'un qui aime travailler en douceur, il aime laisser des morts en guise d'avertissement de-ci, de-là, mais en restant indulgent. Il trouve ça plus cool de dire :
"Tut tut tut faut pas faire ça les gens ! Arrêtez, sinon je... je tue votre ami là ! Oooh mais vous avez recommencé, bon bon bon... tu aimes les viennoiseries ? Je vais tuer la boulangère. Tu vas enfin me prendre au sérieux ! Rooooh non, tu as encore recommencé à fouiller dans les archives ! Hum, comment vais-je faire pour t'en dissuader ? Tiens, je vais tuer ton chat [AUTHENTIQUE, Dracula tue... le chat du héros] ! Ah, c'est dur la vie de méchant".

Voilà. Donc quand on a échappé à la plume ronflante de l'auteur, il nous reste ça. Avec le héros qui ne se doute de rien jusqu'au bout (le fantastique ? Non ça n'existe pas !). Et c'est un best-seller. Et l'auteur a gagné des prix d'écriture. Et elle a fait Yale. J'ai peur, très chers et infortunés lecteurs, j'ai peur...
Commenter  J’apprécie          186



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}