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Critique de Elamia


La sorcière de Prince Island est de loin le meilleur roman Blackmoon que j'ai lu. D'une manière générale, je finis assez déçue avec les livres de cette collection mais celui-ci est une jolie exception.

Pour commencer, c'est vraiment très bien écrit. L'auteure dresse des portraits plutôt réalistes et crédibles de ses personnages, qui, bien que jeunes, ont plutôt la tête sur les épaules. Je fais référence à Taneh ainsi qu'à Tommy, ces deux jeunes hommes au destin déjà tout tracé. Avery quant à elle, a de lourdes responsabilités sur ses épaules, et se trouve en permanence blessée par un passé qu'elle ne comprend pas et par les agissements de sa mère. C'est une héroïne assez attachante, aux réflexions développées et doté d'un esprit vif et subtil. Ce roman young-adult a le mérite de nous sortir un peu du déjà-vu. Il développe des thèmes intelligents et présente des personnages réalistes non formatés par les séries déjà existantes.

Le traitement de la magie dans ce livre est plutôt novateur. Entre don, malédiction ou responsabilité, il est difficile de déterminer si ces pouvoirs sont bénéfiques ou non. L'héroïne est sans cesse tiraillée entre ses sentiments personnels, ses souhaits et la réputation de la famille Roe. Ici, pas de livre des ombres ou d'incantations marmonnées à la lueur d'une bougie, les sorcières Roe tissent leur pouvoir en amulettes et talismans divers. Leur vocation est d'aider les pêcheurs et les marins à prospérer, en leur assurant de bonnes prises ou une naviguation sécurisée. On est donc plus proche ici du folklore traditionnel issus des îles du Pacifique, ou des îles de manière générale, avec des rituels qui rappellent le chamanisme. le roman met également en avant les superstitions sur les légendes sous-marines, et les créatures aussi mystérieuses que redoutables qui se cachent au fin fond des océans. Bien que l'auteur ne s'attarde pas sur ce sujet, elle a su insuffler cette once de mystère par touche succinte, par bribe, disséminée ça et là dans le récit. C'est une histoire vraiment aboutie que l'on a sous les yeux.

On voit que Kendal Kullper s'est longuement documentée sur le contexte et la vie de ces villages de baleiniers au XIXème. Bien que n'approuvant pas du tout la chasse à la baleine et ses implications, j'ai en revanche, bien aimé découvrir cette univers à travers les yeux d'une jeune sorcière. A cette époque -période de la révolution industrielle et des grands changements- avant la découverte du kéronèse, la graisse de baleine -ou suif- était très prisée puisqu'elle servait à de nombreuses choses, éclairage, alimentation, produit cosmétique et j'en oublie sûrement. C'était un monde cruel à la fois pour les hommes obligés de prendre des risques en mer pour gagner leur vie mais aussi pour ces animaux qui n'avaient rien demandé, à part qu'on les laisse vivre en paix.

Kendall Kulper s'inspire de diverses croyances folkloriques, pour créer un univers factice (avec des lieux et des îles créés de toute pièce), mais qui s'inscrit pourtant dans la réalité tangible d'une époque précise. Elle rend compte de l'impact du progrès sur la vie de ces villages insulaires qui connaissent de rudes conditions d'existence. Il se dégage de ce roman une certaine mélancolie, qui vient à la fois du contexte général, mais aussi des sentiments de la jeune Avery Roe. L'aspect héritage et origines est vraiment l'un des thèmes principaux de l'histoire, que ce soit via la magie des sorcières Roe ou le passé du jeune Taneh, dernier représentant de son peuple.

La sorcière de Prince Island fait partie de ces livres sans action majeure, mais où il se passe vraiment quelque chose de plus profond. C'est une histoire poignante, pleine de sensibilité et je suis d'ailleurs étonnée de lire si peu d'avis ou critiques positives à son sujet. Inutile de dire que je vous recommande donc ce roman pour son contexte original et les thèmes qu'il évoque.

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