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Critique de EvlyneLeraut


« Quelqu'un d'un doigt léger m'a touchée à l'épaule. Je me suis retournée mais il s'était enfui ». Louise Paulin,  Quelqu'un .
« Lisière fantôme » que les ombres infinies tourmentent. Sensible, magique, magnétique, ce roman est stimulant et attise nos propres interrogations sur le fondement même de la vie. L'ambiance même, est constante et vive. Une veilleuse au plein pouvoir, allumée la nuit durant.
Ce livre est aussi cela.
« Augustin tourne et vire depuis une dizaine de minutes, à la recherche de son pull couleur mangue ».
Augustin Loeyna est troublé. Il se pose des questions, doute. Il avait pourtant bien rangé son pull. Où est-il ? Quel est ce signe qui soulève subrepticement un récit solaire, énigmatique et spéculatif ? le pull couleur mangue est le levier, la pièce presque maîtresse de ce roman, la majuscule. Celui qui va honorer l'intrigue même de « Lisière fantôme ». L'histoire est un bonbon acidulé. Ne pas le faire fondre de suite. Attendre le déroulé des pages dont chacune remporte la palme d'un ensorcellement majeur.
La douceur du ton de Jérôme Lafargue est un édredon gorgé de plumes. On est tout simplement lové dans ce livre, tant l'histoire est hermétique. La lecture en devient un grand moment de plaisir et de surprises et c'est peu dire.
Augustin travaille seul. Soit en télétravail (nous sommes dans l'ère post-Covid) soit à l'étranger pour des missions de recherches intellectuelles et géopolitiques. Il aime se rendre à la bibliothèque pour étudier ses dossiers. Perfectionniste, rigoureux, il a ses habitudes et son pragmatisme est une gageure. « Mais il aime séparer l'intime du travail. Raison pour laquelle il a jeté son dévolu sur cette ville Horcaviòt, dont la bibliothèque prestigieuse est un endroit propice à la réflexion et au plaisir intellectuel ».
Mais Augustin ne pense qu'au pull. Il vit seul avec son chat Fripoun. Il a une petite soeur, Lucie, qu'il adore. Extravertie, surfeuse, engagée dans l'humanitaire, elle est son double cornélien. Leur mère Mado est décédée et le père quasi inconnu. Il y a un secret de famille latent.
De fil en aiguille, le roman bascule dans l'ésotérisme, le creuset des mystères. Des signes lancinants rampent sur les murs de son antre. L'alchimie est une parabole étrange et signifiante. Lui, qui aime comprendre, réagir dans l'instantané, s'éveiller intellectuellement, Augustin pressent l'heure de percer ce jeu de piste. Les indices sont des ensorcellements. le chat est un symbole et croyez-moi il devine tout plus vite que son ombre.
« Qui sait, peut-être le fantôme a-t-il laissé un nouvel indice ?… À 11h24, la pelle heurte un objet métallique… Il enlève un bon paquet de laine, et découvre le trésor… Un portrait d'une femme très belle. La femme de ses rêves ».
Qui est-elle ? Serait-ce le fantôme ? Il va mener son enquête. Découvrir qu'il s'agit d'une bergère du XVIIe siècle. Apprivoiser ce fantôme et bousculer les codes de la normalité.
Le récit traverse les fascinantes révélations ancestrales. « Augustin s'est se montrer patient quand il le faut, il l'a prouvé avec le fantôme ».
Le roman plonge dans le passé. Cette bergère est une énigme. Il doit découvrir coûte que coûte pourquoi elle est réapparue ainsi, que pour lui. Rassembler l'épars de sa propre famille. La généalogie tourmentée par les effluves des sorcières et des fantômes.
Ce livre intrinsèque qui ordonne l'imprononçable est la traversée des destinées. Ce qui assigne à la vie et pourvoit au lien générationnel et à l'impénétrabilité. Entre les méandres de l'Histoire et des croyances, des mythes, il y a le lien familial et les contraires qui vont s'assembler.
D'aucuns trouveront leur lisière fantôme. Judicieux et habile, profond et crucial car il somme les degrés de nos propres choix et convictions. Publié par les majeures Éditions Quidam éditeur.
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