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Critique de Presence


Ce tome fait suite à Un goût de Paradis qu'il faut avoir lu avant.

Le premier épisode est consacré au premier rendez-vous galant entre Tony Chu et Amelia Mintz, et la première page montre Tony avec un pistolet dans la main alors qu'Amelia a le coté gauche de la tête couvert de sang et de matière cervicale. C'est l'issue d'une enquête pas comme les autres dans un restaurant où les clients dégustent des mets uniques. Dans les 3 épisodes suivants, Tony Chu effectue une infiltration dans le milieu des combats de coq. Il se voit affecter un nouveau partenaire à la place de John Colby. Montero, la société de produits alimentaires, a mis sur le marché un nouveau substitut de poulet. Mason Savoy refait son apparition dans les locaux de la société Montero. Et l'inénarrable Poyo est de retour.

Juste avant l'histoire, John Layman dédie ce tome à Dave Sim (le créateur de Cerebus, maître du récit au long cours), entre autres. Dans le flux de l'histoire, Mason Savoy a choisi le patronyme d'Hollis Mason (personnage tiré de Watchmen) comme identité d'emprunt pendant la séance de cinéma. Et Rob Guillory indique que les auteurs ont prévu de raconter leur histoire en une soixantaine d'épisodes mensuels. Ces différents éléments indiquent que les diverses composantes de l'intrigue s'insèrent bien dans un plan d'ensemble. Cette constatation rassure un peu parce que le présent tome apparaît comme un peu décousu. le dîner en amoureux repose sur une idée savoureuse quant à la composition du repas, mais elle semble sans lien réel avec les questions posées dans les 2 premiers tomes. Comme tout le monde, je suis ravi du retour de Poyo, mais là encore le lecteur peut s'interroger sur l'impact de Poyo dans la trame globale. En fait l'histoire de fond ne semble reprendre ses droits que dans les épisodes 13 et 14, avec le retour de Mason Savoy. Toutefois, il devient apparent que chaque aventure, chaque enquête participe d'une manière explicite ou non à un tout encore indiscernable. Par exemple, les personnages évoquent à plusieurs reprises le fruit trouvé sur Yamapalu dans le tome précédent. N'en déduisez pas que ce tome est inintéressant, il est juste un peu décousu à la lecture. Par contre, les personnages commencent à gagner en épaisseur et leur capital sympathie augmente sensiblement. Il est vrai que le ton léger et drôle adopté par John Layman ne permet pas toujours de savoir sur quel pied danser (comédie sans conséquence, ou récit structuré à long terme ? Sentiments surjoués pour l'effet comiques, ou grande sensibilité des personnages ?). Dans ce tome, la relation entre Tony et Amelia prend de la consistance (même s'il manque encore des nuances) et le passé de Tony se révèle assez dérangeant. Cette familiarité grandissante avec les personnages permet également de mieux mesurer l'amitié que porte John Colby à Tony Chu (en particulier la manière dont il a amadoué leur supérieur Applebee).

Rob Guillory continue d'appliquer son style à mi-chemin entre le dessin humoristique et le détail réaliste qui apporte de la crédibilité à l'histoire. En fait son style promène le lecteur de la même manière que le scénario : le ton de la série est à la bonne humeur avec des touches d'humour et le lecteur doit déterminer quels sont les éléments exagérés pour l'effet humoristique, et quels sont ceux à prendre au premier degré. À certaines occasions, c'est facile. Par exemple, Guillory aime bien jouer avec les silhouettes féminines et l'impressionnant décolleté de l'inspectrice de l'USDA avec son chignon très strict composent une personnalité assez savoureuse et parodique. À l'opposé, il apparaît facilement que les réactions exacerbées de Min Tso sont à prendre au premier degré, rivière de larmes comprise. Les exagérations anatomiques et comportementales rendent les images très vivantes et très agréables à regarder. Il est impossible de retenir un sourire devant Mason Savoy en train de faire un saut de cabri gracieux (malgré son surpoids) pour se cacher derrière une bibliothèque. Les expressions d'Applebee traduisent à merveille l'effort mental qu'il s'impose pour traiter affablement Tony Chu. Chaque lieu dispose de détails qui le font exister et qui le dotent d'une personnalité spécifique. Avec ces exagérations maîtrisées, Guillory dessine des pages qui sont autant de friandises pleines de bonne humeur.

Avec ce troisième tome, les auteurs prennent le risque de composer leur histoire avec des découpages qui font fi du rythme de parution et de l'unité des recueils. C'est un pari risqué à contrecourant des pratiques de la profession, car le lecteur ne dispose pas d'une tranche complète du récit. Toutefois, leur talent va en augmentant et le ton qu'ils adoptent séduit par sa bonne humeur toujours présente, quelles que soient les horreurs qu'ils évoquent. J'attends avec impatience le tome suivant.
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