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Critique de Arakasi


Nous sommes au bord du Mississipi, quelques années avant que ne débute la guerre de Sécession. le capitaine Abner Marsh est un homme fini, un marin sans emploi : tous les navires à vapeur qu'il a commandés ont terminé les uns après les autres à la casse et le dernier sous ses ordres n'est qu'une bicoque à peine capable de tenir l'eau. Mais le capitaine Marsh ne renonce pas. C'est un battant, un homme du fleuve et, tant qu'il lui restera un souffle, il sillonnera le Mississipi du Canada à la Nouvelle Orléans ! Et Marsh a bien raison de ne pas perdre espoir, car un miracle survient soudain en la personne de Joshua York : un mystérieux armateur prêt à dépenser une fortune pour construire le plus beau, le plus luxueux, le plus rapide des vapeurs qui navigua jamais sur le fleuve – « le Rêve de Fèvre ». Et prêt également à payer à prix d'or le capitaine qui acceptera de piloter cette merveille.

Une telle aubaine ne se refuse pas ! Et tant pis si Joshua York est décidément un homme bien curieux… S'il cite couramment la poésie de lord Byron, passe ses journées enfermé dans sa cabine, ne sort se promener sur le pont que la nuit tombée et possède d'étranges amis aux moeurs alimentaires un peu dérangeantes. D'inquiétantes rumeurs commencent rapidement à circuler sur « le Rêve de Fèvre » et l'équipage ne tarde pas à regarder avec suspicion York et ses intrigants compagnons de voyage, tandis qu'en parallèle une série de meurtres atroces ensanglante les abords de la Nouvelle Orléans – des esclaves sont retrouvés à moitié dévorés, des vagabonds disparaissent sans laisser de trace… Bien des horreurs se déclenchent dans le sillage du somptueux vapeur et quand l'obscurité tombera sur « le Rêve de Fèvre », le capitaine Abner Marsh devra faire un choix décisif : faire confiance à son dangereux employeur ou affronter seul les ténèbres.

On ne présente plus George R.R. Martin, l'auteur de la très populaire saga du « Trône de fer », mais on parle fort peu de ses oeuvres antérieures. Et c'est un tort ! Avec « Riverdream » et sa reprise originale du mythe du vampire, Martin prouve que, bien avant de connaître le succès international, il savait déjà manier la plume avec talent et mener ses intrigues en virtuose du suspense. Les fans de l'auteur se délecteront de cette plongée dans l'Amérique du XIXe siècle, à mi-chemin entre le roman historique et le récit fantastique. L'ensemble est à la fois délicieusement prenant, mais aussi d'une terrifiante noirceur – les fidèles lecteurs savent bien que Martin n'est pas du genre à ménager ses personnages et certains passages sont à déconseiller aux âmes trop sensibles. le rythme du récit, volontairement lent et entrecoupé de brusques explosions de violence, pourrait rebuter des lecteurs trop avides d'action, mais fait, à mon avis, tout le charme du roman : on sent le balancement du pont sous nos pieds, on entend le grondement du fleuve s'écrasant sur la coque, les cris des oiseaux nocturnes…

Une grande partie de l'intérêt du roman vient également de ses personnages : qu'ils soient principaux ou secondaires, ils sont tous intéressants et nuancés – à défaut d'être tous sympathiques, loin s'en faut. L'intrigue repose particulièrement sur la relation complexe liant le capitaine Abner Marsh et Joshua York : deux personnages aux caractères solidement campés, aussi dissemblables que faire se peut, mais qu'une étrange sympathie et leur amour commun pour « le Rêve de Fèvre » vont réunir. C'est en contant la naissance de leur amitié que le récit gagne en profondeur et parvient à susciter une émotion diffuse et troublante. Sans spoiler, j'avoue que l'épilogue m'a laissée la larme à l'oeil et une grosse boule coincée dans la gorge.

En conclusion, un excellent roman qui plaira autant aux amateurs de récits horrifiques qu'à ceux de romans historiques, doublé d'une très belle histoire d'amitié. Et également un très bon moyen de découvrir la bibliographie de George R.R. Martin, si vous avez la flemme de vous plonger dans l'excellente – mais hélas fort longue – saga du « Trône de fer ».
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