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Critique de l-ourse-bibliophile


Nouveau diptyque d’Agnès Maupré avec Milady de Winter, Le chevalier d’Eon est enfin complet aux éditions Ankama.

Dans le second volume, Charles, le chevalier a vieilli et forci, il est maintenant en Angleterre : portant toujours jupons et corsets, il espionne les côtes de l’ennemi pour le compte de la France. Nommé temporairement ambassadeur sous la règne du roi George, il n’apprécie pas être déchu par le roi au rang de secrétaire du comte de Guerchy et les deux hommes entament un conflit ouvert. Le récit se poursuit jusqu’à la mort du chevalier, en femme, dans une grande misère.

Un portrait d’une époque traversée, comme l’on s’y attend, par les rois, les courtisanes (dont la célèbre et décriée Pompadour), les intrigants, les ambitieux qui pullulent dans les cours. Celui de la situation politique de la France : les guerres contre la Prusse et l’Angleterre, les brouilles et réconciliations avec la Russie…
Mais encore une fois, la vision d’Agnès Maupré passe sur l’Histoire officielle et propose un récit que l’on peut presque qualifier de féministe. D’Eon, considéré comme une femme par ceux qui l’entoure lorsqu’il se travestit, contribue à changer la vision de la femme. Il le dit lui-même dans le second tome (« Je suis une figure féministe. ») après qu’une jeune femme de la cour lui ai dit que son courage et son énergie « ont fait avancer la cause des femmes ». Son ami confirme que, même s’il ne voit « pas bien l’intérêt que cela présente », il rend en effet les femmes fières de leur sexe. D’Eon sème le doute. Homme ou femme ? Serait-ce une femme ? Une femme espionne, une femme capitaine des dragons, une femme ambassadeur ? Le mystère ne fut levé qu’à sa mort, alors qu’il avait passé près de la moitié de sa vie dans des atours féminins.

De même, sa narration ne raconte pas des personnages historiques, mais des hommes. D’Eon, évidemment, dans sa gloire puis son déclin, plein d’ambitions, mais parfois doutant et désespérant. Mais aussi, le roi de France Louis XV, surtout dans le second volume. Un homme faible qui refuse d’aller voir la femme qu’il a aimé, la Pompadour, alors qu’elle est agonisante. Un souverain qui perd l’amour de ses sujets. Un homme avec ses turpitudes, ses hésitations, loin de l’autorité et la fermeté d’un roi.
Le second tome s’assombrit par rapport au premier. Dans sa jeunesse, D’Eon, tantôt Lia, tantôt Charles, expérimentait, voyageait, intriguait, tout à sa gloire de servir la France en dupant le monde. La vieillesse faisant son œuvre, son identité interroge, lui cause des problèmes. Descendu de son piédestal, contraint de vendre sa bibliothèque, dénigré en France, forcé de vivre sous les robes, D’Eon n’a plus le prestige qu’il avait plus tôt et, bien qu’il conserve son allant, la mélancolie le prend parfois. De son côté, le roi de France est marqué par le deuil de sa favorite et par la haine de son peuple.

J’ai également énormément apprécié le dessin tout en finesse et en éclatantes couleurs. Avec sa plume et ses encres, Agnès Maupré a réalisé un fabuleux travail autour des robes, des drapés, des tentures et des sols. Des détails qui font le charme d’une bande dessinée ou d’un album. Beauté également des paysages : campagne russe dans le premier, côtes anglaises dans le second.

Une belle BD qui revisite passionnément l’histoire de France et celle de ce grand, de ce pauvre, de ce mystérieux chevalier d’Eon. Dialogues plein d’esprit et couleurs vives, le tour est joué !
Lien : https://oursebibliophile.wor..
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