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Critique de Sundgauer


Dernier volet de la trilogie du journalisme cash que je viens d'achever (enquête qui consiste à acheter le protagoniste du livre), le Prodige raconte l'achat d'un jeune joueur sans contrat par Juan Pablo Meneses, dans le but de faire une plus-value et de trouver, qui sait, une future star du ballon rond, digne de Messi ou Maradona.

On ne sait pas ce qu'il adviendra du gamin acheté, un peu comme dans les autres ouvrages de l'auteur : le principe peu éthique et potache du livre est un moyen d'expérimenter le sujet brûlant du foot par les spectre des transactions financières et de ses enjeux socio-économiques, qui repose davantage sur le fait d'être un acteur du système que d'enquêter au sens universitaire.

Le livre cherche à éviter au possible le côté larmoyant et dénonciateur de pacotille, même si toutefois, on sent que le vertige du foot donne parfois la nausée ou le vertige à Juan Pablo Meneses, et il nous donne à lire tout le tragique d'un monde dans lequel chacun essaye de se greffer pour gagner un pourcentage sur la moindre transaction, qui a tous les airs d'un commerce traditionnel, avec des relents de mafia et de magouille. On apprend par exemple qu'il serait arrivé aux ayants-droits d'un joueur comme Sergio Agüero de constater que les pourcentages, mis bout à bout arrivaient à 110%)

Il est vrai que nous sommes nombreux à vouer une adoration sans limites à ce sport, dont la médiatisation cache à peine le commerce humain à grande échelle auquel s'adonnent les clubs du monde entier, et particulièrement européens. Tout cela est bien connu... en revanche, on s'attarde moins souvent sur l'envers du décor, et à la machine à rêves brisés que constitue le storytelling standard d'un enfant de la balle triomphant de l'adversité pour devenir lui-même un apôtre bling-bling du consumérisme, cherchant à offrir à sa famille qui lui met souvent une incroyable pression, tout ce dont il a manqué (la maison, la télé, le canapé... une vraie vitrine du Juste Prix).

Le livre montre combien le foot est la belle vitrine qui cache tous ces enfants ou adolescents qui se retrouvent seuls en Europe après avoir échoué lors des sélections de clubs, parfois sans pouvoir retourner chez eux, et devenir de bons petits soldats, du travail au noir, dans le beau jardin à la française que constitue l'Europe, si belle, et toujours à la pointe du bon sens moral.

Cet ouvrage passionnant brasse large : on y lira la folie latino américaine autour du plus beau sport du monde, des anecdotes sur des acteurs parfois célèbres du milieu. J'ai particulièrement été fasciné par la présentation du club argentin Che Guevara FC prônant le communisme et la vertu citoyenne du foot : on y forme de futurs maires, de futurs enseignants, de futurs ouvriers, de futurs citoyens, avant de penser au show business, arborant toutefois le visage du Che sur leurs maillots, qui mêle à la fois le consumérisme pop'art, d'un visage reproduit à l'infini et devenu une réelle icône glamour, et des valeurs politiques révolutionnaires aux antipodes du capitalisme.

Le livre aborde aussi la folie des derbys argentins, la côte des joueurs latinos en fonction de leur pays d'origine, en passant par les impacts socio-économiques du foot et ses liens forts avec le narcotrafic, le business, entraînant des dommages collatéraux allant des fusillades aux vraies guerres !

Aussi fascinant que soit ce bouquin, la note n'est pas plus haute car je sanctionne légèrement l'ouvrage, du fait d'un très grand nombre de fautes visibles, qui donnent une impression de travail de relecture bâclé.
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