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Critique de Sylviemesjeudis


Sassi et Nour sont les seules personnes restées au ksar. Toutes les autres ont fui vers le village, abandonnant leur maison aux sables et aux intempéries. Il n'y a plus assez d'eau pour tous les habitants dans le puits Hassi El Ghazi alimenté par une source au fond d'une gorge qui est en train de tarir. Un rationnement a été instauré avant que les familles partent. La où elles sont allées, elles ont l'eau courante.
Sassi est aveugle de naissance. le prénom de Nour signifie “la lumière”. Ils vivent chacun dans leur maison, ils cultivent un jardin maraîcher au milieu des dunes de sable et vendent leurs produits au marché du village. On les connaît, on apprécie leur marchandise, les clients leur sont fidèles. Pour eux deux, l'eau ne manque pas. Chaque jour, ils arrosent les plants courbés sous les fortes chaleurs. Chaque jour, ils s'échinent à enlever le sable qui tente de recouvrir le jardin malgré la haie de roseaux et la barrière de briques.
Le ksar, construit en torchis et briques de terre est en ruines, les maisons se détruisent sous l'influence des vents de sable et des intempéries. le silence est partout, la vie s'en est allée avec les habitants. Sassi se déplace aux bruits. Chaque fois qu'une famille part, les bruits s'éteignent et son orientation devient plus difficile. Tous deux sont tristes de ces départs. D'un côté de sa maison, Nour voit le village où ses voisins sont partis, de l'autre, le désert. Elle a muré la porte qui s'ouvre sur le village détruit et ouvert une porte sur l'immensité du désert. Un jour, Sassi décide de fuir la vie. Il part à pied, droit devant lui dans le désert sous un soleil de plomb. Passé le village, il ne sait plus où se diriger, puisque tous les sons habituels ont disparu. Nour, montée sur Kherbiche, l'âne, part à sa recherche, mais où aller ? le sable a recouvert les traces de pas de Sassi. Ils ont la nostalgie de leurs voisins. du haut d'une terrasse, Nour les observe dans le village où ils se sont rassemblés. Parfois, ils font le tour des maisons vides et évoquent leurs propriétaires par un fait, une anecdote, une image-souvenir de leur vie en commun, avec leurs travers mais aussi leur générosité. Pendant ce temps, là-bas, vers le Nord, on tue, on massacre, on assassine...
Nour a rencontré Sassi il y a trois ans. Elle est issue d'une famille de nomades. Son père est mort un soir après une marche harassante parmi la longue caravane de sa tribu. Nour avait 6 ans. Elle a été mariée. Son mari n'a plus voulu d'elle parce qu'elle ne lui donnait pas d'enfant. Il a choisi une autre épouse et Nour a quitté la maison, sans savoir où aller, mais fuir, fuir toujours plus loin, traverser les déserts, marcher vers le sud. C'est ainsi qu'elle s'est fixée dans ce ksar abandonné, à l'écart de l'agglomération. Elle s'est installée dans la maison du Pendu que personne ne voulait. Elle a proposé ses services ici et là. On l'appelle l'étrangère. On la dit rebelle, singulière. C'est une femme libre, indépendante. Elle a des amants parfois, mais elle ne s'attache pas, jusqu'au jour où... Elle n'a pas raconté son enfance et son mariage à Sassi. Il le voudrait bien, mais il ne force pas les confidences.
Une véritable amitié unit Sassi et Nour. Ils sont complices dans le travail, dans la réflexion, ils se soutiennent mutuellement. Nour décrit à Sassi l'état des maisons abandonnées, les lumières qui passent dessus, les formes qui évoquent d'autres formes. Ils aiment se retrouver, ils s'entendent à merveille. Nour est “la lumière” dans “la nuit” de Sassi. Elle est son complément.
Le livre est magnifique par la poésie qui s'en dégage, les grands espaces, le clair-obscur, le silence qu'il évoque. Sassi est un personnage attachant. Malgré sa cécité, il mène une vie normale : il sème, il récolte, il sait à quel moment ses produits sont bons à cueillir, il profite de la vie, il exprime ses sentiments. La lecture n'est pas toujours aisée, elle nécessite une concentration pour comprendre le sens voulu par l'auteur.
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