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Critique de Meps


Après avoir terminé la tétralogie du Sang des promesses (Littoral, Incendies, Forêts, Ciels) et en attente d'une suite à ce qui est promis d'être un quintette domestique (Seul(s) et Soeurs qui devraient se compléter par Frères, Père et Mère), il me reste à explorer les pièces "solitaires" de Mouawad.

Solitaire est bien le mot ici puisque Mouawad explore avec Rêves les abîmes de la création. Lui qui explique régulièrement dans ses préfaces à quel point ses textes de théâtre sont le plus souvent le fruit du travail avec ses acteurs, qui sont presque ainsi ses co-auteurs, cherche ici à décortiquer l'inspiration et le processus d'écriture d'un roman, en se penchant sur Willem, double de Wajdi, qui s'isole dans une chambre d'hôtel de seconde zone hors saison pour écrire un roman. Comme Mouawad convoque ses acteurs à sa création, Willem ne peut que s'entourer de personnages qui lui servent de miroir pour avancer dans l'écriture.

Pour moi qui ait découvert l'auteur par son roman Anima, publié en 2015, il est intéressant de constater que dans cette pièce de 2002 figure certains éléments rappelant particulièrement la construction du roman. le travail de Mouawad frôlant très souvent l'autobiographie, on ne peut que se demander quelle chambre d'hôtel a pu accueillir l'auteur dans ses premières recherches autour d'Anima. Il ne s'agit là que d'éléments très partiels mais l'importance donnée aux formes animales dans le roman écrit par Willem ne peut que faire écho à Anima.

Dans sa préface cette fois-ci, Mouawad nous explique comment le texte s'est petit à petit condensé au fil des représentations de la pièce (passant de 2h40 pour la création en 1999 à 1h20 en 2000, réduction de moitié tout de même !) et comment il a aussi fait évoluer la répartition des passages entre les personnages, donnant notamment plus de corps à celui de l'hôtelière. Cela prend place dans la réflexion de l'auteur qui cherche à imaginer comment ses créations peuvent être accueillies et comprises par les "gens qui disent ne rien connaître de tout ça" comme il le dit lui même. C'est parfaitement louable de se poser ce genre de question en tant qu'auteur d'un théâtre contemporain qui a parfois tendance à s'écarter du commun par un élitisme assez hermétique.

Le théâtre de Mouawad sait amener le spectateur à une forme très moderne de théâtre mais en passant toujours par des histoires concrètes, un humour qui permet d'accrocher et amène à des moments beaucoup plus subtils, une approche de la folie intérieure de l'Homme , de la violence subie et de comment elle peut être retranscrite sur scène. Pour avoir vu sur scène Mouawad lui-même interpréter un de ces textes (Seul(s) à Sète, en 2019), ces moments de "folie" sont d'une intensité impressionnante, et il faut débrancher sans doute un peu la raison pour apprécier ces moments dans leur sincérité.
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