AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de fanfanouche24


Livres - voyageurs-Square des Poètes- Porte d'Auteuil/ novembre 2022

Déjà plus 5 mois que j'ai lu ce roman, avec le plus grand plaisir.Lecture- cadeau surprise, l'ayant dénichée dans un lieu de livres- voyageurs où j'ai pris l'habitude de déposer moi-même des livres...


Je débute par un extrait introduisant bien l'objet insolite nous menant à l'élément perturbateur dans la vision d'une mère, Anne par sa fille, Clarisse, s'interrogeant sur cette femme décédée 10 ans auparavant... que finalement, elle connaît fort mal !

Elle retrouve cette dernière sur une vieille photo prise avant sa naissance et l'auteure de ses jours se trouve en Russie. Pourquoi ce pays, alors qu'elle-même est née en France ?

Elle va partir en quête, en Russie pour enquêter sur cette partie de la vie maternelle, qui l'intrigue et qui lui est totalement inconnue...Vont s'alterner successivement le récit de la vie quotidienne en Russie d'Anne dans les années 1990 et celle, 20 ans plus tard de Clarisse, retrouvant des amis d' Anne de l'époque....les interrogeant sur cette" mère " mystérieuse !

Le récit va alterner et se dérouler sur plus de 20 ans: de 1993 à 2015 !

"Prologue

Paris, avril 2015

(...) La plupart du temps, les familles vivent en paix avec leur domovoï.Le nôtre s'est bien moqué de nous: il s'est barré avec Maman.(...)C 'était un domovoï; il était russe et nous sommes français. Maman aussi était française. Elle avait importé le domovoï de Russie quelques années avant la naissance. Une sorte de nain barbu, griffu, au regard oblique dont la reproduction sur d'anciens livres en cyrillique me gardait éveillée jusque tard dans la nuit.J'espérais à ne jamais le rencontrer pour de vrai.
(..) Chez nous, en France, le domovoï était totalement déplacé. Mais Maman insistait le domovoï était l'esprit de notre foyer, nous protégeait ; je devais le nourrir et le chérir, en somme l'adopter."

Cette fille fait Sciences-Po ; elle est au début de sa vie d'adulte et s'interroge sur son avenir; ce road- movie sur la propre jeunesse de sa mère dans un pays inconnu a-t-il il l'aider à y voir plus clair .
.dans son propre parcours ?
...

On va être pris dans le suspens et dans les descriptions des transformations, et des vastes contradictions d'un pays aussi fascinant que perturbant !
Le récit est alerte, très dynamique ; on est happé par la fascination de Clarise, finalement très imprégné de ce pays que sa mère a tellement aimé et qu'elle lui a indubitablement inoculé plus ou moins consciemment.Personnages aussi contrastés, ambivalents que généreux, accueillants dont une grande amie et un premier Amour d'Anne...
Ainsi les questions affluent et l'enquête progresse...

"Moscou, 2015

- Les étoiles rouges réinvestissent notre espace, continue Goharik, une symbolique de la puissance dont les Russes se régalent. Ils ont oublié qu'elles symbolisent la peur, la peur du pouvoir, la peur de dire ou d'écrire ce que l'on pense...On ne discute plus de la liberté, conclut- elle.Il n'y a plus de cuisines à Moscou, plus de tables de cuisine autour desquelles s'attabler et discuter des heures en se passant sous le coude des livres interdits.Tous ceux qui avaient de la place ont refait leur salon à l'occidentale, avec une cuisine à l'américaine. Maintenant, la politique est un sujet tabou qu'on évite d'aborder en famille.Ceux qui refusent l'ordre établi s'en vont.On se vide de notre sang, ajoute Goharik. "

Je lisais cette auteure pour la toute première fois et cela a été un vrai coup de coeur, riche en informations, observations fines et émotions
intenses !
À la fois la description fine d'un pays , la Russie, terre des contrastes, par excellence...et l'éclaircissement d'une histoire familiale attachante et remplie, elle- même de contrastes et de zones d'ombres !

"Paris, avril 2015

Dans ma famille, on n'aime ni les Rouges ni le rose, seulement le bleu marine, alors même si l'URSS avait vécu, on se méfiait encore de ce pays qui avait scindé Berlin, l'Allemagne et l'Europe en deux. Maman à vingt et un ans s'était aventurée aux confins de l'Histoire pour apprendre le russe. Et n'en était pas revenue indemne."

Un très beau texte qui exprime fort bien la fascination d'une mère et d'une fille pour la grande Russie, à 20 ans d'intervalle. On sent , simultanément, profondément l'attachement de l'auteure pour ce pays, tout en gardant toute sa lucidité sur les abus et dérapages de la gouvernance poutinienne...et ceci, plus de 3 années avant l'attaque de l'Ukraine par le le "tyran", Poutine...

Cette Russie, fabuleuse terre de contrastes...qui ne peut attirer que des sentiments extrêmes...À la lecture de ce récit...on reste aussi en empathie avec les très nombreuses difficultés quotidiennes des russes, de la population se débattant avec les aberrations de l'état, les pénuries diverses et les corruptions galopantes !






Commenter  J’apprécie          301



Ont apprécié cette critique (30)voir plus




{* *}