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Critique de LoupAlunettes


Le sujet du documentaire nous fera penser à cette expression : "Défrayer la chronique". Ceci reprendra dans un langage plus ancien le sens du titre " Choquant! (Quand les vêtements font parler d'eux)".

Qui défraie la chronique ?
Allo Wiki?
"... Celui qui défraie la chronique est celui dont les nouvelles alimentent la conversation ou qui fait les frais des ragots qui s'échangent..."

Ce qui nous amènera à la question à laquelle le documentaire voudra apporter quelques sens et réponses : la grande mode vestimentaire est-elle seulement un moyen de se distinguer, de ne pas être n'importe qui en évoquant le merveilleux ou en choquant la morale bien pensante?
Nous creuserons. Nous parlerons ici de nous vêtir, jeunes gens, certes mais il y aura "se vêtir et se vêtir" : comment pourrait-on confondre aujourd'hui se couvrir, s'apprêter et révolutionner le regard?
Non, la mode ne sera pas uniquement le moyen d'être plus beau, elle ne fera pas non plus le Bonheur mais comme l'argent, y contribuera concrètement.
La première illustration de la page de titre sera un bon point de départ pour tenter d'envisager ces nuances : un adolescent portant avec décontraction un pantalon en jean aux genoux troués, comme arrachés. À quel occasion le porte t-on et pourquoi le porte t-on?

Quel documentaire!
Nous n'imaginerions pas qu'au travers de l'histoire du vêtement nous pourrions autant en apprendre sur l'histoire de l'humanité, sur nos moeurs passés, nos croyances équivoques en l'égalité des individus et sur les limites de nos tolérances sociales.
Le documentaire commencera simplement avec l'exemple du pantalon et de la femme et, pourtant, sur cette mission de nous en apprendre et de nous étonner, le début fera déja fort.
Nous confiant ainsi que l'interdiction du port du pantalon en France pour les femmes, bien que désuet, ne sera modifiée qu'en ...2013 (ne faites pas ses yeux ronds!) . Il faudra compter sur une mise à jour de quelques lois et sur le caractère anticonstitutionnel de ses vieilles règles (contre la Constitution des Droits de l'Homme et l'Égalité des sexes) pour régulariser une situation qui aurait pu être légale s'il prenait à un gouvernement de la refaire valoir bêtement.
Juste sur cette partie du documentaire, nous comprendrons que ce qui sera bien plus "choquant" que les propositions vestimentaires inédites sera, avec notre regard d'aujourd'hui, les mentalités d'hier. "Choquant!".
Et oui, nous l'avons pensé, nous l'avons dit et parfois même nous nous sommes opposés à une idée qui nous semblait contre-nature, mettre en péril l'équilibre de certains ordres de stabilité incontournables du monde.
Une loi en 1800 interdisait le pantalon en France, on nous l'apprend et s'il prenait à une femme de vouloir en porter un comme un homme au quotidien, il lui était imposé de prouver à la Préfecture qu'elle en détenait le droit naturel: qu'en dessous des vêtements, elles étaient un homme. Ce que la gente masculine trouvait aberrant à l'époque.

Le sujet ne sera finalement pas inutile au vu d'une actualité riche et chaude qui bouleversera, perturbera encore et encore les vérités dans l'esprit des jeunes lecteurs, comme le voile intégral de nouveau imposé aux citoyennes iraniennes par pudeur, la polémique en France de l'Abaya à l'école par tradition qui s'opposera à la règle de laïcité...
Le documentaire sera vraiment intéressant pour cela, replaçant souvent des dispositions vestimentaires inhabituelles comme des dispositions d'esprit qui s'ouvriront ou se fermeront avec l'idéalisation d'une société pour les uns, mais pas nécéssairement pour les autres.

Rendez-vous compte, ce qui a une époque nous permettait de distinguer l'homme et la femme était la longueur de sa tunique, c'est amusant (nous aurions pu, nous, aujourd'hui, affirmer que nous détenons à présent d'autres pistes sérieuses).
Ce qui semblera impudique pour une femme, va se raccourcir coquettement au masculin.
Partant du Moyen-Âge, avec son Bliaud, où femmes et hommes portaient ceci sans distinction, à la tunique au dessus des genoux, à la chemise limitée à la taille, le vêtement long se verra réserver aux femmes.
"Si l'on voit les deux jambes d'une personne, c'est un homme. Sinon, c'est une femme. Avec toutefois quelques petits pièges, comme le curé en soutane et l'avocat en robe noire de plaidoirie..."

Qu'est ce qui nous conduira à L Association militante Hommes en jupe de 2007? Nous pourrons y réfléchir.
La chose ne donnera pas concrètement de droit, elle permettra en revanche selon certaines conceptions masculines modernes de faire évoluer l'image de l'homme dans sa propre sphère. Non, la légèreté de la jupe n'enlèvera pas le poids sociétal qui s'imposait sur les épaules des futurs mâles "Alpha", les chefs de famille solides qui portaient donc "la culotte" mais il contribuera pour de nouvelles générations à accueillir la sensibilité dans sa part de virilité.
Les univers masculins et féminins ne seront plus des boudoirs exclusifs imperméables produisant des personnages et des pensées de caricature.
Ainsi, les hommes et les femmes pouvaient commencer à rêver ne plus se concurencer comme le sexe dominant de la planète.
Voici ce qui ce dira : La jupe, sa longueur, ne déterminera pas qui je suis, ni n'alterera la force de mon caractère. Ça ne sera pas "l'habit qui fait le moine", nous dira t-on.

Le propos est vraiment accrocheur.
Hormis les évolutions utiles, nous pourrons sourire devant les tentatives surréalistes de défier les normes vestimentaires, les règles du sens, de l'esthétique et de la pesanteur.
Le vêtement sera aussi un lâcher-prise, un moyen expressif d'être artisan, artiste et le corps ne sera plus qu'un instrument pour porter l'oeuvre, à l'inverse d'un vêtement utile.
La créativité fantaisiste des modistes-stylistes sera à la Mode ce que l'imaginaire et l'inspiration seront à l'écrivain.
Nous oserions presque dire que quelques fois, comme nous l'avons démontré plus haut, avec le documentaire de Philippe Nessman et Éléanore Cagneau Derache, la révolution vestimentaire libre et utile sera même aussi à la société ce que la science est à la modernité.
Ces révolutions nécéssaires parfois à juste titre nous permettront de regarder le monde sous un angle différent, nouveau, nous permettront d'éprouver ces bases en le secouant un peu, pour nous rendre compte que le monde continuera de tourner sans nous tomber sur la tête (surtout si ces mouvements d'idées permettent à l'avenir de niveler des libertés individuelles conditionnées, curieusement dictées par le port d'un vêtement).

"Choquant". Parfois, c'est n'importe quoi et cela continuera de faire réfléchir.
Un point de départ qui nous semblera ne nous promettre faussement que du divertissement, de l'élégance et de la délicieuse frivolité (plutôt sympa pour les jeunes qui aiment la mode) et qui en réalité cachera son énorme pointe d'iceberg sous l'eau.
Qui aurait pu croire qu'avec le port et le choix d'un vêtement, il y aurait autant à dire sur nous? La mode sera un indicateur important de l'air du temps d'une société, de ses besoins, de ses audaces, de ses débordements insolents ou de ses frustrations rigoureuses.
C'est un documentaire du beau plein de convictions à offrir aux ados.
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