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Critique de SZRAMOWO


Prendre Gloria.
Une histoire simple et bien écrite. On ne s'y ennuie jamais, même s'il y a parfois des longueurs. Une sorte de polar. Nouvelle façon. Contrairement au polar traditionnel, l'auteur ne tient pas le lecteur en haleine, en le menant par le bout du nez. Là, le lecteur s'attend à ce qui va arriver. L'intérêt du roman est dans le déroulement patient de l'enquête, et la description par le menu du contexte et de l'environnement dans lequel, policiers, victimes, proches des victimes, suspects et proches des suspects évoluent.
Cela se passe à P. Une ville d'Italie. L'action se déroule, entre 1993 et 2010.
12 septembre 1993. Un dimanche. (précision le 12/09/1993 était bien un dimanche) Gloria et Elena, deux adolescentes de 16 ans, ont menti à leurs parents en disant qu'elles se rendaient à la messe, à l'église de la Miséricorde. En fait, Gloria Prats a rendez-vous avec Damiano SolIvo, un adolescent travaillé par le sexe, qui est direct avec les femmes en général. Ce dernier veut lui offrir un cadeau.
Elle a peur et demande à Elena de l'accompagner.
La consigne est précise. 11H40 : Si je ne suis pas aux cabines téléphoniques, près de l'église, vient me chercher aussitôt sur le parvis.
Elena attends, attends jusqu'à 12h30, plus de Gloria, pas davantage de Damiano. Elle cache pendant un temps la vraie raison de leur venue à l'église puis le dévoile aux frères de Gloria.
S'ensuit une course poursuite dans la ville. A l'église. Chez Damiano. Rien.
Contactée, la police plaide en faveur de la fugue. La famille en faveur de l'enlèvement et pire. L'histoire est construite sur ce malentendu qui conduit à une enquête bâclée. Une tentative d'inculpation d'Elena pour faux témoignage.
Elle déclare :
« Et là, il faut que je précise quelque chose. Pour répondre aux accusations qui ont été proférées contre moi et qui m'ont valu un procès, une condamnation avec sursis et une amende : je n'ai pas omis de parler de Damiano pour dissimuler quoi que ce soit dans un but scélérat. J'ai juste cru bon de ne pas enfoncer le clou parce qu'à ce moment-là, ce 12 septembre 1993 à midi et des poussières, je ne pouvais absolument pas concevoir qu'une jeune fille entre dans une église, lieu public le plus fréquenté ce jour-là et à cette heure-là, dans une petite ville de province où tout le monde se connaît, et ne plus jamais en ressortir. »
Coup de théâtre 17 après, des ouvriers roumains, dont Nicolae, découvre le corps de Gloria, dans les combles de l'église. Un endroit dont Elena de Sanctis nous dit :
« Elle était là, sous notre nez. Ou plutôt non, pas sous notre nez mais juste au-dessus de nos têtes. Sous un toit. Un sous-toit. Les combles, baisodrome notoire, de l'église de la Très-Sainte-Miséricorde. »
Le récit alterne entre 1993 et 2010, à des rythmes différents. L'auteur retrace à merveille l'état d'esprit des protagonistes dans les deux époques.
On penche, comme la mère de Gloria, Giuseppa, pour la culpabilité de Damiano Solivo. Et la famille ne comprend pas pourquoi il n'est pas arrêté.
Les témoignages se succèdent. La plupart confirment que Gloria aurait été vue dans différents endroits du village après 12h30.
Le village est vite coupé en deux. Partisans contre partisans. Fugue contre enlèvement. Les relations se tendent. La police et la justice n'aident pas à l'apaisement en prenant clairement le parti de la fugue, contre la famille.
2010. La vérité éclate. Tout est remis à plat. Et au fond, c'est là que le roman commence réellement. Pourquoi ce corps se retrouve-t-il 17 ans après, là où la victime a disparue ?
Le 13 septembre 1993, la police déclare :
« Nous, ce qui nous embête un peu, c'est que personne ne peut nous dire ce qu'a fait Damiano entre 11 h 30, où il a rencontré Gloria à l'intérieur de la Miséricorde, et le moment où on l'a retrouvé aux urgences. Un trou de deux heures dans une affaire de disparition et quand on est le dernier témoin, c'est délicat. »
La conviction autour de la culpabilité de Damiano se confirme à la lecture de fragments du récit en italique. 1993, 1985,
Par ailleurs certains témoignages paraissent à charge :
Audition de Sabrina Falchi, connaissance de Damiano Solivo, 13 septembre 1993, 12 h 45 « Il essayait de me toucher et à diverses reprises m'avait proposé de me retirer dans un coin tranquille avec lui. Il disait qu'il voulait parler ou qu'il avait un petit cadeau pour moi. »
« Il est apparu également que par le passé SOLIVO Damiano, âgé seulement de quatorze ans, s'était rendu coupable d'actes de violence à l'aide d'un canif sur la personne d'un camarade de jeu. »
En 1994, Damiano est en prison, à l'isolement. Son père Vittorio déclare :
« Je me permets de vous rappeler que des témoins ont affirmé l'avoir croisée l'après-midi, sur ses deux pieds et frétillante comme une truite, en compagnie de ce petit rastaquouère, cet Albanais dont le nom m'échappe, et je pense qu'on ferait bien de continuer à fouiller la piste albanaise au lieu de s'acharner sur un pauvre garçon. »
Plus on avance dans le récit, plus les questions sur la culpabilité réelle de Damiano Solivo deviennent prégnantes. Des interrogations, des doutes apparaissent. Quel a été le rôle du curé qui en 2010 a déclaré avoir vu le corps deux mois avant sa découverte.
Et Alicia Toscanini, le Procureur, pourquoi a-t-elle tant de mansuétude à l'égard des Solivo ?
En 2011 :
« Gloria a maintenant un tombe et une histoire. Mais elle n'a toujours pas d'assassin. »
Nouvelles approximations découvertes dans l'enquête. Les vêtements sur le cadavre n'ont pas fait l'objet d'une recherche d'ADN.
Enfin, les recherches aboutissent et le coupable est confondu.
J'ai retenu de ce roman : la performance de l'écriture, les descriptions précises et jamais ennuyeuses, le travail méticuleux pour présenter par le menu le détail d'une enquête qui a foiré et les tentatives pour la remettre sur les rails. L'analyse des profils des différents protagonistes.
Un roman qui vaut le détour.

Lien : http://desecrits.blog.lemond..
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