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Critique de Aderu


Magistral.

M. E. O'Brien et Eman Abdelhadi signent un ouvrage spectaculaire. Une utopie, dans notre monde, dans un futur proche, à l'échelle mondiale. le défi est de taille et brillamment relevé.

Le format est prenant : les autrices se placent au coeur de cette histoire en s'imaginant récolter des témoignages pour une "histoire orale de la Commune de New-York" - ce qui est le sous-titre du roman, soit dit en passant.
Après une introduction traçant les grandes lignes de cette histoire incroyable, douze entretiens sont proposés. On apprend qu'il s'agit d'une version raccourcie de ce projet, destinée à cette excentricité qu'est (alors) l'impression papier.

Au travers de cette douzaine de portraits se dessinent les contours de cette Commune de New-York, parfois très explicitement, parfois en creux. le dosage est réussi et permet de se plonger dans ce futur sans avoir l'impression de lire un essai.
D'un entretien à l'autre, les sujets se retrouvent, les thématiques rebootent et les boucles se forment. Par ailleurs, des personnages en citent parfois d'autres.

Si New-York est au coeur des échanges, le périple oral nous emmène dans divers recoins de l'Amérique du nord, comme de la Chine ou des Andes, sans oublier la Palestine. Une véritable histoire mondiale. Ses contours sont à découvrir et je n'en dirai rien ici.
Si ce n'est que les autrices ne font pas l'impasse sur la violence à l'origine de ces changements mondiaux.
Et c'est là l'une des forces du texte : il ne cache rien.
Petit plaisir à la lecture du chapitre sur l'ascenseur spatial et sur le sort des exilés spatiaux.
Au-delà, les difficultés en tout genre ne sont pas masquées et cela donne du crédit au projet.

Le pastiche de documentaire est très crédible. le ton est donné dès l'introduction avec des questions de méthodologie et théoriques très intéressantes - rien que le point sur l'orthographe de "Commune" versus "commune".
Pendant les entretiens, les tenantes du projet sont parfois chahutées par leurs interlocuteurices. Cela donne du rythme et donne un côté vivant et réaliste.
L'aspect romanesque est bien mené, avec des trajectoires qui se croisent et des questions soulevées qui trouvent leur réponse quelques pages plus loin. Un exemple parmi d'autres, le concept de Séjour, dont l'on peut deviner la logique dès sa première mention, ou bien plus tard, quand il deviendra le sujet d'un échange.

Il y a tant de thématiques abordées qu'il serait long d'en dresser une liste - et autant les découvrir au fil de la lecture. Néanmoins, l'on peut souligner l'importance des notions de parentalité et de famille. M. E. O'Brien ayant par ailleurs écrit un essai intitulé "Abolir la famille" (éditions La Tempête), cela n'est pas surprenant !
Un autre sujet que j'ai envie de mentionner est celui de la production et de la transmission du savoir. J'ai bien aimé l'ironie de ce texte qui pourrait être universitaire dans un monde où les universités ne sont plus - en l'état tout du moins.
Étonnamment, les IAs et robots sont assez peu présents - si ce n'est dans le dernier témoignage. Ce qui est significatif : l'humain est au coeur du projet.

À signaler, la présence d'une courte nouvelle parue en ligne et qui s'inscrit dans le même univers, reprenant une partie des personnages.
La couverture est l'une de mes favorites de la maison d'édition, ce qui ne gâche rien.

Je ne peux que vous conseillez de lire ce livre, de l'arpenter, de le mettre en scène et que sais-je encore !

Merci à Argyll, pour l'édition de ce livre, et pour le SP.
C'est une franche réussite.
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