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Critique de latina


Qu'ai-je donc fait ? Eh bien, je viens de lire avec beaucoup d'intérêt et de plaisir le livre de Jean d'Ormesson : « Qu'ai-je donc fait ? »...

Je dis « le livre » car c'est assez difficile à classer :
Ce n'est pas un roman, c'est plutôt une biographie, mais pas très détaillée, pas très centrée sur les faits vécus par l'auteur. Il donne plutôt ses impressions, ses valeurs, ses manières de se comporter face aux joies et aux vicissitudes. Il narre avec humour et sincérité son éducation aristocratique (« Mon grand-père maternel avait une soeur : Mme de la Faulotte. C'était une vieille sorcière qui nous faisait grand-peur et que nous comparions volontiers, mon frère et moi, à Mme Fichini ou à Mme Popofski dans les romans de la comtesse de Ségur. Elle était, comme son frère, à la tête d'une fortune qui ne prêtait pas à rire »), sa jeunesse insouciante et paresseuse (« La paresse, rien de plus clair, est la mère des chefs-d'oeuvre »), et ose parler de son grand amour qui est à la fois sa grande honte due à son comportement lâche et irresponsable (« Cette page que vous êtes en train de tourner et que vous vous apprêtez maintenant à lire, je dois l'arracher à moi-même avec beaucoup d'efforts et de peine. J'aimais C. Non seulement j'ai fait tout ce que je pouvais pour lui plaire, mais je n'avais dès le départ, pas la moindre intention de faire ma vie avec elle. Voilà que nous glissons, je le crains, dans les pires poncifs de la littérature au niveau le plus bas. Je l'ai détruite, j'ai détruit tout un pan de cette famille à laquelle j'étais attaché et je me suis détruit moi-même. Puisque je l'aimais, je n'avais qu'à partir avec elle, à m'établir ailleurs à ses côtés, à construire ensemble quelque chose de durable. Je suis parti. Avec elle. Et je suis revenu. Chez mes parents, abreuvés de larmes et changés en personnages de Greuze devant un vase cassé. »)

C'est plutôt aussi un essai, une exposition de ses idées principales sur la Vie, qui est pour lui la littérature : « D'une façon ou d'une autre, pour le meilleur ou pour le pire, succès ou échec, j'étais entré en littérature. », mais aussi, en vrac, sur l'argent, la politique, le fait de suivre la mode, les valeurs, anciennes et nouvelles, la Science, la Philosophie, l'Histoire (« La question est de savoir si le monde n'a pas toujours été en train de se découdre et de se défaire. Depuis les temps reculés, chaque génération a eu le sentiment que ses valeurs disparaissaient et que l'avenir était lourd de menaces. A plusieurs reprises, la crise de découragement et de méfiance à l'égard de l'avenir semble avoir été aussi forte qu'aujourd'hui »)...

Et une interrogation surtout sur le sens de la vie. D'où venons-nous ? Que faisons-nous sur Terre ? Qu'est-ce que le Temps ? Qu'y a-t-il après la mort ? Dieu existe-t-il ? (« Je n'aime pas tellement ceux qui savent qu'il existe et qui en profitent pour me donner des leçons. J'aime encore moins ces esprits soi-disant libres qui savent avec certitude et qui répètent à tout vent qu'il n'existe pas. Tout ce qu'on peut faire avec Dieu, ce n'est pas de le connaître ni d'accumuler des arguments pour ou contre son existence. Ce n'est même pas de parler de lui. C'est d'espérer qu'il existe. »)

Et finalement, il en ressort un optimisme fondamental : Jean d'Ormesson aime la vie plus que tout et lui rend grâce, et c'est pour cela qu'il me plait. Je termine donc par cette ultime citation, parce que je me rends compte avec effroi que je ne parviens pas à clore ce billet, tellement il y aurait des choses à dire, tellement D Ormesson a suscité en moi bien des acquiescements, bien des interrogations aussi, et quelquefois quelques agacements :

« J'ai trouvé la vie très belle et assez longue à mon goût. J'ai eu de la chance. Merci. J'ai commis des fautes et des erreurs. Pardon. le monde est une drôle de machine à faire verser des larmes de sang et à rendre fou de bonheur. Je me retourne encore une fois sur ce temps perdu et gagné et je me dis, je me trompe peut-être, qu'il m'a donné – comme ça, pour rien, avec beaucoup de grâce et de bonne volonté - ce qu'il y a eu de meilleur de toute éternité : la vie d'un homme parmi les autres. »
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