AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de dedanso


Yallah Bye est une bande dessinée-témoignage qui, si l'histoire se déroule pendant le conflit israélo-libanais de 2006, met beaucoup plus l'accent sur les relations humaines que sur le conflit politico-religieux. Et heureusement car il n'est pas toujours facile de comprendre les motivations et les conséquences des guerres au Moyen-Orient (en ce qui me concerne en tous cas).

Le récit se concentre sur la famille El Chatawi, venue en vacances au Liban (le père étant d'origine libanaise) et qui se trouve prise dans une guerre entre Israël et le Hezbollah. Parviendront-ils à retourner en France sains et saufs?

Sur le bandeau du livre est écrit "Juillet 2006. Les bombes déchirent le Liban et soudent une famille". Pour moi, il s'agit là d'un mensonge, ou bien j'ai tout compris à côté de la plaque...
La famille est bien loin d'être soudée et c'est d'ailleurs le point négatif du récit. Difficile de s'attacher aux personnages masculins : ils sont complètement amorphes! Denis, le fils hémophile, vit sur sa planète et joue aux jeux vidéos comme si de rien n'était. A aucun moment il n'a l'air de s'inquiéter, ce qui est vraiment inquiétant! Les amis libanais de la famille ne s'inquiètent pas beaucoup plus, ou du moins tentent de cacher leur peur. Mais le pire de tous est sans conteste le père, Mustapha, qui passe son temps à dire que tout va bien et à fustiger sa femme à cause de l'inquiétude, ma foi légitime, qu'elle ressent.

Les points positifs, car il y en a bien-sûr, sont les descriptions d'un quotidien que l'on a du mal à imaginer, nous les Occidentaux. Tout me paraît réaliste, surtout lorsque l'on sait que le scénariste est franco-libanais et que l'histoire qu'il raconte puise directement dans les mésaventures familiales. Le manque d'eau et de nourriture, les bombes qui tombent au hasard et tuent les amis et la famille, les coupures de courant, la chaleur, les conflits, les communautés religieuses, la peur, la solidarité aussi... Bref, un quotidien difficile.

On ressent une grande sympathie pour le fils Gabriel, resté en France, qui a peu d'informations sur ce qui se passe au Liban. On angoisse à ses côtés, à l'affût de la moindre information sur un retour hypothétique de la famille. Ce que l'on vit à ses côtés est aussi fort que ce que l'on vit au Liban, sa souffrance étant bien décrite et dépeinte.

La part belle est faite aux sentiments qui habitent les exilés : l'impression d'abandonner les siens, de fuir un pays aimé. La douleur de laisser ceux que l'on aime dans le chaos et de se sentir impuissant. Si je comprends bien la douleur et le dilemme que peut ressentir le père, j'ai tout de même eu du mal à comprendre qu'il mette sa femme et ses enfants au second plan. Les flash-back qui donnent à voir la première fuite de Mustapha adolescent, n'apportent pas grand'chose de plus à la narration.

Enfin, le dessin, expressif, et la mise en couleurs sont de sérieux atouts. De même que les explications finales sur le conflit de 2006, les photos et les témoignages de Joseph Safieddine (qui a vécu les mêmes événements que la famille El Chatawi) et de Kyungeun Park (qui a fait le déplacement jusqu'au Liban afin d'être le plus réaliste possible).

Un album fort donc, soutenu par Amnesty International pour sa dimension humaine. Et c'est sans aucun doute ce qui restera à la fin, ce sentiment d'impuissance et d'incompréhension face aux conflits du Moyen-Orient, conflits qui tuent tant de personnes innocentes au nom de la religion.

*Challenge Variétés 2015 : "un roman graphique (ou bande dessinée)"*
Commenter  J’apprécie          110



Ont apprécié cette critique (10)voir plus




{* *}