AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Woland


Une amie m'a demandé ce que j'avais pensé de cette biographie. Je suis tentée de répondre : pas grand chose.

D'abord, il faut savoir que j'ai toujours eu un problème avec Colette. Je n'ai en effet jamais compris comment une femme qui affirmait - et on veut bien la croire - se battre tous les jours avec les mots ait produit des romans si légers et tous axés sur des histoires sentimentales basiques : duo ou trio, tu-me-trompes/je-me-venge, etc ... Je n'ai jamais compris non plus comment une femme qui savait si bien mener sa vie extérieure, une "femme forte" en somme et une femme qui se voulait libre, ne se soit jamais dévouée à une cause sociale.

J'ai lu les "Claudine", bien sûr et je ne conserve ma sympathie originelle que pour le premier volume : "Claudine à l'école." J'ai lu "La Chatte", histoire bien mince dont la seule originalité est de transposer la relation de jalousie habituelle sur un animal. J'ai lu la majeure partie des recueils autobiographiques de l'auteur et j'admets qu'elle savait comme personne évoquer les animaux et la sensualité de l'univers en même temps qu'elle croquait une scène.

A part ça, que reste-t-il pour moi de Colette ? Une vie tapageuse, des relations aussi clinquantes que celles qu'on reproche aujourd'hui à certain président de la république, une façon bien à elle de faire son trou dans des endroits confortables et de retomber toujours sur ses pattes. La seule grande affaire de sa vie fut, semble-t-il, son premier mariage avec Henry Gauthier-Villars, dit Willy. Pour l'avoir haï comme elle le fit après leur divorce, elle a dû l'aimer passionnément et sincèrement. Mais eut-elle un geste lorsqu'il était sur la fin et sans grandes ressources ? On me dira qu'il l'avait exploitée. Soit. Mais la marquise de Balbeuf, Missy, qu'avait-elle fait à Colette pour que celle-ci se montrât avec elle d'une telle ingratitude ? ...

Et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.

Colette, pour moi, est une égoïste narcissique et une primaire. Fine, intelligente, avec un sens rare de la terre et de ses nourritures mais justement : elle ne s'élève jamais au-dessus des pâquerettes.

La biographie critique de Pichois & Brunet tente - modestement - de déboulonner l'idole, soulignant ses trop nombreuses contradictions et se faisant un devoir de noter ses défauts sur le même plan que ses vertus. On peut même y apprendre que Colette jeta tout simplement le cadavre de sa chatte, Kiki-la-Doucette, par la fenêtre, estimant que c'était là la seule chose à faire. Si on se rappelle que Colette avait poussé les hauts cris en lisant "La Terre" de Zola et affirmé à l'époque (et aussi dans "Claudine à l'école" si mes souvenirs sont bons) que les paysans n'étaient certainement pas aussi noirs que ça, on est en droit de se poser beaucoup de questions sur sa sincérité ...

Mais cette biographie passe à mon avis à côté (volontairement ? involontairement ?) des vraies questions :

1) Colette envisageait l'écriture avec sérieux. S'il est un domaine où elle n'a jamais triché, c'est dans le style. Elle s'est attachée à donner le meilleur d'elle-même - ou ce qu'elle croyait être le meilleur. Pourquoi n'a-t-elle jamais appliqué pareille rigueur à ses sujets ? Pourquoi cette femme, qui prônait l'originalité en tout, oublia-t-elle d'être originale en ce domaine ?

2) Pourquoi Colette, qui a passé toute sa vie à enrichir, à travailler son style, n'a-t-elle jamais décollé de ses histoires de coucheries, légitimes ou pas ?

3) Pourquoi ne pas reconnaître que, plus qu'à son style, Colette doit sa réputation à ses relations dans les milieux littéraires parisiens (héritées de Willy) et à son anti-conformisme de bon ton ?

4) Pourquoi ne pas admettre que Colette ne se révolta jamais que pour elle-même - et jamais pour les autres ? ...

J'attends la biographie qui osera - enfin - dire cela de la "bonne dame du Palais-Royal" qui ne semble avoir eu, en fin de compte, pas grand chose de bon, si ce n'est un amour certain du beau style.

Mais est-ce suffisant ? ...
Commenter  J’apprécie          40







{* *}