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Critique de ileana


Un roman de formation et une fresque sociale située à Genève au début du XXè siècle ; paru en 1937. Au centre du roman le jeune Paul de Villars, alter ego de l'auteur. Il est bien né et cultivé. Cette fresque gagne en épaisseur au dernier tiers, lors de la Grande Guerre – elle est bien sûr le séisme qui disloque les anciennes structures.
J'ai goûté pleinement l'univers social, mais je me suis ennuyée avec les détresses du coeur du héros. Des scènes de funérailles qui réunissaient la tribu étaient pour moi plus prégnantes que le moment de la déclaration amoureuse et du baiser.

Des thèmes secondaires : par exemple l'identité nationale et les racines – nous sommes en Suisse romande, au carrefour des grands courants de pensée français et allemands.
Et puis le sentiment de la nature : la rêverie face au Léman, une certaine douceur et un dépaysement alpestre.
L'ampleur de ce pavé et, par endroits, l'allure languissante m'ont fait avancer lentement. Je suis contente d'avoir tenu jusqu'au bout, moi qui n'aime pas les pavés.

D'une certaine manière, cette chronique est le pendant suisse de « Au Plaisir de Dieu ». Les deux oeuvres montrent un microcosme depuis longtemps disparu : à Genève, des patriciens habitant un hôtel particulier de la très discrète et cossue rue des Granges (la ville haute dominée par la cathédrale Saint-Pierre) ; dans la chronique de d'Ormesson, des aristocrates nés au château de Saint-Fargeau, alias Plessis-lez-Vaudreuil.

L'extrait que j'ai choisi est le portait de l'oncle du personnage principal :

« Victor Galland n'avait gardé de sa jeunesse que des souvenirs avouables. [ ] Son père ne lui avait jamais permis de débuter dans la banque chez ses correspondants de Paris : à l'étranger la banque était entre les mains des Juifs et des parvenus ; à Genève, elle appartient aux nobles et aux patriciens, comme jadis à Gênes et à Venise. Entré de bonne heure dans les Unions Chrétiennes, diacre De Saint-Pierre à vingt-sept ans, marié à trente, fondé de pouvoirs de la maison de banque Galland Frères, [ ] il croyait sincèrement en Dieu, au Bulletin politique du Journal de Genève, à la noblesse de sa famille qui valait en ancienneté, selon lui, toutes celles du Gotha. [ ] Pour lui, il n'y avait plus d'honnêteté en France depuis la première conversion des rentes et il avait pensé renvoyer sa croix de la Légion d'Honneur au moment de l'affaire Dreyfus. (A la réflexion, pourtant, il la conserva.) La Russie, l'Autriche, l'Italie étaient, à l'en croire, des pays pourris. L'Angleterre ne conservait son prestige qu'à cause de la famille royale [ ]. Comme beaucoup de vieilles gens, il disait qu'il « allait en Suisse » lorsqu'il s'aventurait hors du canton, ce qui ne lui arrivait guère. Et, bien qu'il fit profession d'admirer les moeurs et le sérieux des Suisses allemands, il ne voyait en eux que peuplades rustiques ou industriels parvenus, d'une civilisation encore naïve et rude. Seule la Prusse et sa cour protestante, où l'Impératrice (la Kirchen-Augusta, comme on l'appelait à Berlin) exigeait que ses fils allassent tous les dimanches à l'église, lui semblait incarner ce qui restait en ce monde de conscience morale et de solidité aristocratique. Genève elle-même, gouvernée par les radicaux, courait aux abîmes. Ses meilleures traditions se perdaient » p227
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