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Critique de Zephirine


Le roman est construit sur la dualité entre deux personnages, Susanne et Sarah, avec une mise en abyme assez époustouflante.
Sarah raconte à l'écrivain sa propre histoire afin qu'il la retranscrive de façon fictive (elle ne veut pas être reconnue) Il invente Susanne, qui va vivre sa propre vie tout en traversant les mêmes drames que Sarah.
Toutes deux, mariées et mères de deux enfants, se sentent délaissées par leur mari. Elles vont décider de s'éloigner du domicile conjugal pour réfléchir et se reconstruire, espérant que cette rupture provisoire provoquera un choc positif chez le mari.
Sarah, qui se remet d'un cancer, a besoin de stabilité affective. Elle va pourtant assister à sa disparition dans la vie de son mari et de ses enfants, qui semblent très bien vivre sans elle. Choc aussi d'une vie précaire puisqu'elle a arrêté de travailler et que c'est le mari qui possède la majorité du patrimoine.
De son récit, l'écrivain tisse des similitudes avec son héroïne Susanne qui vit les mêmes affres dus à l'indifférence de son mari, mais il va le raconter différemment, allant même jusqu'à chercher une ville de province où situer son action, et ce sera Dijon dont il explique le choix à Sarah
« Il lui répondit qu'initialement, il avait voulu situer cette histoire dans le ventre du territoire français (si on peut dire), pour activer une sorte de métonymie. ».

Peu à peu, l'histoire se renverse, à la grande surprise du lecteur. On croyait avoir affaire à Sarah racontant son histoire, mais c'est en réalité l'écrivain qui parle de Susanne, à elle comme à nous, lecteurs, et qui mêle habilement les vies des deux femmes au point de nous perdre. Qui est qui, finalement ? Toutes deux frôlent la folie, leur détresse est la même, leur chute aussi, mais la progression qui les mène à ce même point ultime emprunte des chemins différents.
Si le rapport des deux mères avec leur fille Paloma est conflictuel, celui avec Luigi le fils adolescent est plus complexe et j'ai aimé cette connivence entre mère et fils et cette tendresse qui résiste aux assauts du père.
Si j'ai goûté à la forme de ce roman original qui mystifie son lecteur en l'entrainant dans deux histoires qui n'en font plus qu'une, j'ai été beaucoup moins conquise par le fond. Chez Susanne et Sarah, je n'ai pas apprécié leur posture de bourgeoises aisées aux métiers libéraux, et cette façon de se saborder toutes seules d'une vie dont le seul drame est ce mari égocentrique et distant qui deviendra vite toxique.

Ce procédé mettant en scène un écrivain s'appropriant l'histoire d'une femme qui se confie à lui, l'auteur l'avait déjà utilisé dans « L'amour et les forêts ». Mais je le trouve plus abouté, plus subtil aussi, dans « Sarah, Susanne et l'écrivain ».
Je sors tout de même avec une impression mitigée de ce roman qui présente des longueurs et des passages assez décousus. Dans l'ensemble, la lecture n'est pas facile et il faut accepter de se laisser mystifier par le mélange de deux personnages. Parfois, on suit le récit de Sarah pour passer, sans transition, à celui de Susanne et c'est déroutant. L'emprise du mari, la toxicité dans le couple auraient pu être davantage creusés, alors que l'auteur s'attarde beaucoup sur la crise de folie de son personnage et j'ai eu l'impression que l'écrivain cherchait davantage le spectaculaire que l'empathie avec son héroïne.
Pour le lecteur qui apprécie cette dualité entre réel et imaginaire, c'est le roman idéal ; Par contre, on peut être vite agacé par l'abus du procédé.
Un roman intrigant, sans aucun doute.
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