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Critique de morganex


Une trilogie devenue one-shot en intégrale :

« Identités troubles » est une BD parue en 2020 chez Les Humanoïdes Associés. Les 140 pages qu'elle contient reprennent dans l'ordre chronologique de parution les trois tomes d'une série intitulée « Milo » parue chez Delcourt*. le cycle comprenait alors « Un jour de plus » (2008), « Retrouvailles » (2009) et « Soldats à terre » (2011).
Chaque nouvel épisode est la stricte suite du précédent. En intégrale, on ne perçoit aucune rupture dans la continuité graphique, dans celle scénaristique, la manière d'utiliser les couleurs reste inchangée.
Y a-t-il eu retouches ?
Le passage d'un épisode à l'autre se fait sans heurts, comme allant de soi. La présente réédition s'abstient d'inclure deux des unes de couv d'origine, la première et la dernière. L'intégrale présentée ne se contente pas d'aligner les tomes mais les emboite, les fond l'un dans l'autre.
L'objet lui-même est, comme d'habitude chez les Humanos, conçu grand luxe et ne dépareille pas sur des étagères consacrées à la bande-dessinée.

Un background techno futuriste :

En filigrane graphique apparait Los Angeles en 2050. La mégapole est richement détaillée. de nombreuses et belles vignettes muettes lui sont consacrées : gratte-ciels, noeuds autoroutiers inextricables, zones interlopes, bords de mer ... La ville est propre, semble curieusement déserte ou du moins peu peuplée. On est loin de la vision du Los Angeles de 2019 entrevue par Ridley Scott dans Blade Runner. Un clin d'oeil est néanmoins adressé au film en haut de la page 59 : une fenêtre de gratte-ciel s'inscrit dans la pupille d'une gigantesque pin-up en publicité.
Les personnages utilisent de nombreux objets connectés : écrans tactiles translucides, hologrammes parlants, casques de réalité virtuelle recréant des scènes idylliques de vie au grand air … On sent les nanotechnologies omniprésentes derrière nombre d'objets et peut-être même à l'oeuvre dans les corps. Dans les rues, figures récurrentes, circulent des voitures racées relativement futuristes. Certaines font l'objet d'un court portfolio en postface.
L'emballage graphique futuriste est soft mais se suffit à lui-même.

Un techno polar d'anticipation:

A la morgue, deux identités rétiniennes différentes sont retrouvées sur le corps d'une femme assassinée, deux maris reconnaissent le corps comme étant celui de leur épouse. le criminagent Milo Deckman (le héros de Blade Runner se nommait Rick Deckard) mène l'enquête et se glisse peu à peu au coeur d'une intrigue complexe, sa hiérarchie semble ne guère vouloir l'aider, voire le pousse à abandonner…
Les flingues règnent et font parler la poudre, la mort règne et prend son du : entre les mains de policiers et militaires matelassés de gilets pare-balles ; d'agents des stups en filature ; de narco-trafiquants accompagnés de belles et plantureuses pépées ; d'hommes de pouvoir, troubles et inquiétants, à la solde de groupuscules politico-economiques indéfinis ; d'homme de mains en costard-cravates ; de deux femmes intrigantes : une belle eurasienne et une charismatique héroïne dont je ne dirai rien ici … la suite appartenant à la BD.
Chaque personnage semble sonder psychologiquement son voisin, à la recherche vaine de ce qu'il cache au-delà de ce qu'il montre ; il en résulte des réalités mouvantes presque dickiennes attachées à chaque personnage. Chaque individu sait de quoi il est fait lui-même, n'ignore pas ses buts et objectifs, mais doute de tous ceux qu'il côtoie. le scénario, naviguant de plus en eaux troubles, offre un jeu dickien avec la réalité non pas tant des choses mais des êtres.

L'art et la manière:

Les dessins, leurs mises en page sont classiques. Précision de trait, cadrages efficaces. Chaque vignette offre un background qui n'est pas sans importance quand il s'agit de décrypter la suite des évènements. Les phylactères sont peu nombreux, leurs contenus peu bavards. Ils sont au service des images. Les deux s'entremêlent efficacement ; le décryptage est assez aisé même si, parfois, la difficulté à différencier un personnage d'un autre demande de l'attention. Un défilé presque cinématographique des vignettes offre un rendu pragmatique des situations. le travail de colorisation est remarquablement précis et inspiré dans les tons choisis, il ne gâche pas les dessins mais les rehausse.

Quand une bonne histoire est en marche, quand les dessins qui la complètent sont en osmose : on peut s'attendre à passer un bon moment.

Merci Babelio, Masse Critique, Les Humanos et les auteurs : Benoit Rivière et Philippe Scoffoni.

*A noter que le passage d'un éditeur à l'autre s'est accompagné d'un renommage. La trilogie titrée « Milo » en première intention devient « Identités troubles » en seconde. Ce n'est pas plus mal dans la mesure où Milo Deckman ne tient pas le rôle principal, loin de là. le casting se fait à égalité de participation de chaque protagoniste.
Lien : https://laconvergenceparalle..
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