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Critique de MonsieurHyacinthe


Chet Baket a disparu ! Il devait enregistrer en studio, finir la bande-son d'un film italien, quand le trompettiste s'est volatilisé au détour d'un bureau de tabac. Drague, compagne, picole, overdose, rapt, agression, meurtre, ou simple poudre d'escampette sur un coup de tête ? Tous les possibles s'esquissent pour le lecteur.

De bonnes choses et de moins bonnes, dans cette publication de Jazz en Velay. La narration est intéressante, bien ficelée et captivante. J'adore ce procédé. Sur fond d'entretiens ou d'enquête, plusieurs personnages dépeignent les dernières heures de Baker en Italie, rapportent leur rencontre avec lui. Un producteur succède donc à un chauffeur de taxi, puis viennent un contrôleur de train et un ami. Tout se révèle peu à peu. La construction est nickel chrome ! On lit l'ensemble à vitesse grand V, ça file et passionne.

Mais pourquoi diable l'auteur n'a-t-il pas doté chaque protagoniste d'une voix qui lui est propre ? On ne distingue aucun langage, aucun travail sur la langue, sinon celui lancinant et peu jubilatoire de l'auteur, qui fait perdre tout corps aux personnages, rendus aphones. Aucun jargon ici, nulles trouvailles stylistiques, pas de relief dans les formulations, ni risque pris, c'est simplement écrit, trop simplement à mon goût. le taxi parle comme le producteur qui s'exprime comme le pote. Malgré d'excellents aliments, la mayonnaise retombe. J'aime les univers personnels, le caractère à l'état brut, les personnalités qui suintent à travers une prose unique, les écrivaillons qui font des vagues. Je ne cerne pas de styliste ici. Flûte, diantre, chiasse, un peu de vie, d'excès, de générosité ! Tel un bon scénario en mal de dialoguiste, le texte mériterait plus d'allant, une patte d'écrivain, une plume forte et sauvage.

De même, les termes musicaux (p. 8) ne sont pas très bien venus non plus, les "musiciens s'entraînent" (au lieu de s'exercer), "connaissent leur partition" (au lieu de "grilles d'accords", laissant libre cours aux variations). Quand on se frotte au jazz, art de l'improvisation, ça sonne un peu faux, approximatif et fabriqué. Emmanuel Roche semble se débattre avec des éléments qui ne sont pas de son monde. Mais peu importe, dirions-nous, si l'on prenait une gifle ! Pas besoin d'être musicien pour écrire sur ce monde, pourvu qu'il y ait un créateur aux manettes.

Un peu trop propret à mon goût donc. Vraiment dommage, car cela reste du bel ouvrage malgré cette faiblesse, l'auteur sait vraiment façonner une ambiance sans lourdeurs, sans descriptions intempestives, et sa trame narrative est fichtrement aboutie. On a affaire à un très bon artisan, il n'y a pas tromperie sur la marchandise. Les éléments sont là, le propos est noir, le héros désœuvré, le fond romantique à souhait. Il y a tant de bonnes choses, qu'on en attend encore plus ! On veut de l'écriture maintenant, du style, de la forme ! Au travail ! Chaque phrase doit être personnelle, ne ressembler à personne !
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