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Critique de juten-doji


Pas franchement friande d'art contemporain que je ne comprends pas toujours et que je vois parfois comme un business sans aucune profondeur contrairement à ce qu'il devrait être, je suis tombée sur ce livre grâce à un avis sur booktube (merci Opalyne) qui a titillé ma curiosité. Si un livre avait été écrit pour exposer le cheminement qui fait qu'un jour on décide de faire une copie de son sexe en 3D et d'appeler ça de l'art, il y avait peut-être eu assez de réflexion derrière l'oeuvre pour assouvir ma curiosité.

Avant d'être plasticienne, Megumi Igarashi est auteur de manga et c'est sous cette forme qu'elle a raconté cette biographie qui commence avec son arrestation pour finir sur son enfance et ce qui l'a menée vers ce qu'elle est aujourd'hui sans le vouloir, la porte-parole d'une partie anatomique qui ne devrait pas être honteuse et cachée comme quelque-chose de sale alors que l'équivalent masculin est vénéré et source de fierté.
Ce manga, c'est bien plus que l'explication d'un type d'art que l'on a le droit d'apprécier ou non. C'est aussi une réflexion sur une société pleine de paradoxes et d'hypocrisie, où on est mis en prison pour avoir fait une copie de son propre sexe pour le donner en petit comité et non aux yeux du grand public, pendant qu'on peut trouver en vente libre des sexes féminins réalistes pour son propre plaisir (y compris de petite taille) fait par des hommes pour des hommes, que le sexe masculin est célébré pendant certains festivals où il est vendu comme souvenir, et dont l'industrie pornographique est l'une des plus prolifiques autant du point de vue de la production que de la consommation.

L'univers carcéral et la corruption policière en particulier étaient très parlants: pas le droit de prévenir qu'on s'est fait arrêter, douche 2 fois par semaine, l'obligation de tout acheter à un prix très élevé même sa savonnette, même pas le droit d'écrire de lettres le weekend ou après 15h, on ne peut pas déchirer les sachets de nourriture n'importe comment...des petits détails fondés sur des règles ridicules mais qui permettent de tenir tout le monde au pas dans une mini-dictature où on a le droit par exemple d'être puni pour s'être essuyé la transpiration alors qu'on n'y a pas été autorisé. La prison n'est pas censée être un lieu de vacances mais ça ne justifie pas la débilité.
Les pages dessinées alternent avec des citations, articles de loi et autres documents qui éclairent un peu plus le sujet en cours, et dont j'ai copié un extrait plus bas en guise d'exemple.
En bref, une lecture inattendue, aussi intéressante que drôle, de la part d'une artiste à soutenir pour son travail qui s'il était parti d'une idée un peu superficielle défend désormais une liberté nécessaire qui devrait déjà être acquise au XXIème siècle dans un pays "développé".

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"Au Japon, la cour d'assises s'appuie depuis longtemps sur les aveux en guise de preuves de culpabilité. Malgré le droit de l'accusé à garder le silence, la non-reconnaissance de la culpabilité est très mal vue. En outre, la police est fortement encouragée à extorquer des confessions, et elle dispose de 23 jours pour interroger un suspect avec toute la brutalité nécessaire, comme l'ont démontré une série d'incidents inquiétants. Des policiers à la recherche d'un hacker anonyme ont ainsi extorqué les aveux séparés de quatre personnes innocentes avant de se voir obligés, en décembre, de présenter des excuses humiliantes. le taux de condamnation dépasse les 99%"
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