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Critique de Presence


Ce tome regroupe les 6 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2004/2005. le scénario a été écrit par George Romero (réalisateur, entre autres, de Trilogie des morts vivants, Land of the dead, le territoire des morts). Les dessins ont été réalisés par Tommy Castillo, et encrés par Rodney Ramos, avec une mise en couleurs de Lee Loughridge. Les couvertures ont été réalisées par Bernie Wrightson.

Dans un futur très proche, l'épidémie de zombies est devenue une réalité aux États-Unis. Ils sont partout et les humains s'organisent en petits groupes. L'histoire commence alors que Judy McMillan s'est réfugiée dans un immeuble et abat des zombies en leur tirant dans la cervelle, au fur et à mesure qu'elle monte les étages par l'escalier. Elle ne doit son salut qu'à l'intervention de Damien Cross, zombie ayant conservé son intelligence grâce à un sérum révolutionnaire, mis au point par le docteur Hoffman. Il s'en suit un affrontement à plusieurs niveaux entre Damien Cross dont l'allégeance oscille entre les humains et les zombies, un gouvernement provisoire américain, et des factions de zombies dirigées par des individus se faisant appeler Rasputin et Attila.

Vraisemblablement, l'éditeur DC Comics a décidé de republier ce récit (datant de 2004) sous forme de recueil en 2014, pour profiter de l'effet de publicité généré par Empire of the Dead, autre comics écrit par George Romero, et publié par Marvel Comics en 2014, en tout cas la coïncidence est troublante.

Le constat est que les 2 séries ne s'adressent pas au même public. "Empire of the dead" vise plutôt un public adulte, même s'il peine à faire passer toute l'horreur primale des zombies en bande dessinée. "Toe tags" s'adresse à un lectorat moins âgé de jeunes adolescents. Il n'est pas impossible de faire naître l'effroi avec un récit de zombies dépourvu de gore, mais ce n'est pas donné à tout le monde. Un exemple réussi en est Afterlife with Archie: Escape from Riverdale.

D'un point de vue visuel, Tommy Castillo commence par impressionner par le niveau de détails qu'il intègre dans chaque case. Il utilise une approche de type réaliste, mais avec une simplification de certains détails. Ce choix finit par être assez déconcertant. Quand un zombie reçoit une balle en plein crâne, il y a bien des bouts de machin qui giclent, sans qu'il soit possible d'identifier ce dont il s'agit. La peau des zombies est bien striée de traits pour marquer les déchirures ; elle est bien d'une couleur pas très fraîche. Seulement ces traits ne sont ni figuratifs, ni expressionnistes, et la couleur n'évoque aucune matière connue. À la fois le dessinateur, l'encreur et le metteur en couleur souhaitent montrer que les zombies sont marqués dans leur chair ; à la fois ils le représentent de manière à édulcorer cette dégénérescence. Au final, ces zombies donnent plus l'impression d'être en plastique, ou victime d'un mauvais maquillage, que d'être des individus en décomposition.

De la même manière, les affrontements finissent par perdre en crédibilité dans la mesure où Castillo, Ramos et Loughridge affadissent la représentation de la violence, pour la rendre supportable par un lectorat le plus large possible. Dans la mesure où ils restent dans un registre figuratif, leurs représentations perdent toute force, pour devenir insipides. Enfin, il est visible que Castillo a du mal à soutenir le rythme et les 2 derniers épisodes sont parsemés d'arrière plans réduits à la plus simple expression, voire vides.

Le scénario de George Romero souffre du même positionnement à cheval entre 2 chaises. le lecteur perçoit bien qu'il a souhaité créer un personnage pour partie zombie et pour partie humain, mais n'appartenant à aucune des 2 catégories. Il a également mis en place un chef d'entreprise reconverti en président autoproclamé sans scrupule. Il fait s'affronter différentes factions, avec des traîtres et des allégeances fluctuantes.

Le personnage de Damien Cross manque singulièrement de personnalité, et l'idée de l'avoir affublé d'une tenue tout en cuir fait penser à un costume aisément reconnaissable (comme pour un superhéros, mais sans les couleurs criardes). Romero a trouvé que ça ne suffisait pas encore, et il a rajouté un canon dans le bras droit, à la place de l'avant-bras. Bizarrement cette particularité n'est presque pas exploitée dans le récit (si ce n'est dans le dernier épisode), ce qui renforce encore le côté gadget de la chose. L'idée d'avoir inclus un éléphant comme animal familier docile et obéissant tire encore le récit vers un versant plus infantile que terrifiant.

George Romero installe Mister Powell en tant que président tyrannique, sans aucune légitimité. Il règne sur des séides sans épaisseur. Il est installé dans un bunker bénéficiant d'électricité, sans qu'il ne soit jamais expliqué comment il peut encore y avoir du courant électrique dans cet environnement post apocalyptique.

D'épisode en épisode, les motivations et les objectifs des différentes factions deviennent de plus en plus flous, au point que le lecteur finit par se désintéresser de ces individus qui s'affrontent pour des raisons peu claires.

À la fin du tome, le lecteur comprend que DC Comics n'ait pas réédité cette histoire avant. Elle se lit rapidement, mais les auteurs ont fini par lui retirer tout intérêt en essayant de faire une histoire de zombies réaliste, tout en édulcorant au maximum les composantes horrifiques pour essayer de toucher un lectorat plus jeune, et sans développer de deuxième niveau de lecture.
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