AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de germanaud


Une photographie d'Alice Alice introduit ce recueil. On y voit un intérieur ombreux, maigrement éclairé par la lumière jaune d'un plafonnier et, dans le fond, un arbre estompé derrière une vitre. C'est une photo pleine de silence, de solitude, d'abandon peut-être.
Nous tournons la page et, en vis- à-vis, les deux premiers poèmes de Marcelline Roux s'ouvrent sur ce même vers : « Être là ».
Elles sont deux à « être là » : celle qui va mourir, celle qui rend les dernières visites. La mourante et la vivante. Elles sont là, en présence, mais le lien est défait et l'expérience, impartageable. Ce sont deux corps en de femme, des cheveux, un nez pour l'immobile, des bras et des jambes pour celle qui vient du dehors, et reprendra après la visite le cours de son existence.
Que dire à celle qui va mourir ? Les mots sont dérisoires, tout discours inapproprié : dire à celle sur le point de mourir l'achat d'un sac à dos ? Que peut comprendre celle qui se trouve du côté des vivants ? Comparer la peur de la mort à la peur de l'eau ? Se taire serait la seule voie/voix, mais elle semble interdite. le texte se ponctue, isolé et en italique d'abord, puis intégré dans le corps des poèmes, de cette phrase, qu'on devine dite par le personnel médical : « vous pouvez lui parler », comme une autorisation dont on se serait bien passé, car elle devient presque injonction. Tout serait mieux que le silence. Alors, on cherche du côté du quotidien, puis des souvenirs. On fait comme si. « Parler seule comme si on était deux ».
Rien de grand, rien de décisif, ni dans les mots prononcés, ni dans ceux qui sont écrits pour nous. le lecteur ne trouvera aucune image fracassante, aucun pathos, aucune vérité. Mais des doutes, des questions, de la langue ordinaire, qui font toute la force de ce texte, soulignée par le martellement presque oppressant de ce « vous pouvez lui parler », qui creuse encore le fossé entre les deux femmes, entre la vie et l'indicible.
Marcelline Roux et Alice Alice s'épaulent dans ce projet : teintes assourdies, vocabulaire simple, superposition de temporalités ou d'espaces dans un même cadre, enfermement de deux être dans la chambre d'hôpital. Les images et le texte tissent une toile funèbre et douce qui enveloppe le glissement vers la fin.

Commenter  J’apprécie          30



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}