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Critique de Butylphenyl


"Ne désespérez pas [...] certains livres sont à retardement…" nous apprend sans motif apparent la quatrième de couverture. Assez rapidement toutefois, on comprend que ce conseil n'est pas anodin et qu'il a trait au Libraire.

L'ouvrage de Régis de Sá Moreira en est en effet l'incarnation parfaite du livre dit "à retardement". Bien qu'il soit extrêmement court et donc, qu'on en vienne vite à bout, il faut un certain temps pour le digérer.

La première lecture peut d'ailleurs ne pas être la bonne. La seconde non plus. En fait, le délai entre le moment où on le lit, l'aime et/ou le déteste (personnellement je suis passée par les deux phases) et le moment où on le "saisit" peut être plus ou moins long.

C'est donc une lecture peu commune avec pour effet secondaire une délicieuse confusion.

Comme son titre le suggère, le libraire évoque le quotidien d'une profession. A ceci près que le personnage principal, qui n'a ni nom ni prénom, est un libraire on ne peut plus singulier : il travaille nuit et jour, 7 jours sur 7, refuse de vendre, je cite, "de la merde", ne se nourrit que de tisanes et de livres et se cache quand des couples pénètrent dans sa librairie (la liste est non exhaustive mais cela vous donnera déjà une petite idée de l'hurluberlu dont traite ces quelques 190 pages).

Naturellement, l'auteur évoque également les différents clients auxquels est confronté le libraire. C'est donc essentiellement une sucession absurde de saynètes qui permettent d'en savoir peu à peu plus (bien que jamais trop non plus) sur le libraire, sa famille, ses histoires de coeur, ses pensées les plus profondes, ses oeuvres favorites etc. Chaque rencontre (ou altercation) est courte, volatile, insaisissable comme si Régis de Sá Moreira désirait capturer des bribes de vie, saisir l'instant.

Paradoxalement l'écriture est toutefois, elle, redondante ; d'une musicalité inouïe elle hypnotise totalement le lecteur qui, sans rien y comprendre (faut-il y voir une forme dérivée du réflexe de Pavlov ?) tourne irrémédiablement les pages. L'atmosphère qui émane du livre est qui plus est pour le moins étrange. le réel et l'imaginaire se rencontrent sans arrêt, au point de finir par cohabiter : en effet le libraire est confronté tant à la fleuriste et au témoin de Jéhovah qu'au Dalaï-lama, à la mort ou encore à la question.

Certains passages sont très drôles (les dialogues des couples retranscrits par des "coupli-coupla-couploplo") ou encore mystiques (l'utilisation de la phrase "Il y a beaucoup de choses intéressantes à apprendre sur les icebergs"). J'ai également trouvé l'idée que la poésie mène à l'orgasme (comme je le rejoins sur ce point !) très belle et son dialogue muet avec sa famille novateur : il déchire les pages des livres qui lui font penser à eux et il leur envoie, individuellement, sans rien ajouter.

Bien que j'ai longtemps été dans l'incapacité de dire si j'avais aimé ou non cette histoire (dénuée de toute histoire), j'ai fini par opter pour un oui, non sans réserve toutefois.

L'épilogue et le prologue m'ont par exemple complètement déroutée et à ce jour, je n'ai toujours pas compris leur utilité. Rêve ? Fruit d'une lecture ? de même pour le livre en lui-même. Pourquoi cette histoire ? Pourquoi cet ouvrage ? Qu'est-ce qui a pu motiver Régis de Sá Moreira ? Y a t-il une idée tacite ? Si oui, laquelle ? Autant de questions qui restent à mon grand dam sans réponse.

En résumé, un roman (très) particulier qui nécessite un lâcher prise total pour pouvoir être pleinement savouré.

Plus de détails -mes rubriques "n'hésitez pas si ; fuyez si ; le petit plus ; le conseil (in)utile, en savoir plus sur l'auteur- en cliquant sur le lien ci-dessous.
Lien : http://blopblopblopblopblopb..
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