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Critique de svecs


svecs
17 septembre 2018
Etonnante lecture que celle de ce roman soudanais.
Il faut d'abord s'habituer à un style parfois désarçonnant, souvent poétique et métaphorique.
Il y a ensuite un ton assez particulier, une manière de penser très étrange. Une part du roman ne révèle jamais vraiment son mystère.
Le narrateur revient d'Angleterre, où il a suivi un cursus universitaire. de retour dans son village, il y est intrigué par un nouvel habitant. Il s'appelle Mustapha Saïd et n'a pas vraiment l'air à sa place. Trop respectueux, trop bien mis, trop éduqué. Et pourquoi un homme comme lui est venu s'enterrer dans un village agricole au bord du Nil, loin de Khartoum ? le narrateur se lie avec lui et apprend une part de son histoire. Il fut le premier Soudanais à faire des études en Angleterre. il était brillant. Il y a même enseigné. Mais il y connut aussi la disgrâce, accusé d'être responsable de la mort de plusieurs femmes.
Lorsque Mustapha Saïd disparaît lors d'innondations, il reste trop de questions sans réponse. le narrateur tente de comprendre qui était cet homme. Quelle fut vraiment sa vie. Ce qui l'animait. Ce qui l'a perdu. S'il était un monstre. Ce questionnement lui fait aussi prendre conscience de l'écart grandissant entre lui et son village. du poids toujours bien présent de la tradition dans les villages, avec tout ce que cela engendre.
L'aspect le plus désarçonnant est certainement de se retrouver de l'autre côté du miroir. Nous sommes soudain "l'autre". L'altérité n'est plus la société africaine vue de l'Europe, mais bien la vision soudanaise de notre société. Ce changement de perspective n'a l'air de rien mais il amène un autre questionnement sur les rapports humains (homme-femme, Afrique-Europe, citadin-villageois) parce que les enjeux sont à la fois proches et très éloignés de ce dont nous avons l'habitude. le fossé grandissant entre le narrateur, devenu fonctionnaire à Khartoum et son ami resté au village, qu'il considère comme intelligent et moderne, mais qui reste pourtant prisonnier de la tradition lorsqu'il s'agit de la famille de Mustapha Saïd, les rapports compliqués de ce dernier avec la société anglaise... des sujets familiers mais à la perspective différente. le roman est très court mais très dense, d'autant qu'il n'apporte pas toutes les réponses, laissant au lecteur le soin de se faire sa propre vérité. Un peu comme Brecht qui clot la Ballade de Sechuan en se tournant vers le spectateur pour lui donner la "responsabilité" de la morale de son histoire. J'en ai finalement nourri une certaine frustration. La lecture reste malgrétout très intéressante parce qu'elle noius sort de notre zone de confort.
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