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Critique de Fleitour


à l'extrême Orient, à travers l'extrême tension des sentiments, les vents marins défient l'histoire, on vibre à la fidèle et émouvante restitution d'une impossible cicatrisation des êtres touchés par la Bombe atomique.


Traçant un petit tatouage avec de l'encre rouge et noire, pareille à une fleur pommelée, Kazuko, venait de poser sur la fine coupure au ventre de son neveu Tateru, un camélia. La scène se déroulait en Chine à Qingdao, occupé alors par l'Armée Japonaise. Les japonais ont cultivé l'art de se taire dans la douleur, "Tateru baissa les yeux devant le filet de sang avant de retourner un regard clair vers son père."


Largement scalpé au cuir chevelu, à Qingdao en 2005, je me suis trouvé affublé par contre, d'une coiffe en forme de cheminée, loin de représenter une fleur de Lotus. J'étais loin d'imaginer que je foulais en courant une île où avaient piétiné 30 000 japonais avant moi. Tateru et la communauté japonaise vivait en 1945 ses dernières heures à Qingdao, la ville devenue si vivante aujourd'hui, est encore le berceau de la bière Chinoise, la Tsingtao. 


En 1945 c'est l'ingratitude qui dominait, les japonais pillaient, raflant les bronzes de la ville, comme de nombreux objets négociables.
Tateru évoque son enfance captant tout ce qu'il voit et discerne les territoires de la mer, et l'espace que dessine les oiseaux de l'île. L'expérience du vent marin et de toutes ses nuances resteront gravées dans son imaginaire. de même, les plats de Keiko sa mère ou de Kasuko vont imprégner ses sens. le goût des parfums l'envahit à tel point qu'il voyait les vents en couleur ou les distinguait par leurs odeurs. 


Son ami Ryu est plus sombre, sans doute depuis la disparition de sa mère. Son père est un photographe, qui engrange toute la vie de cette cité, ses rumeurs comme les faits et les gestes de ses habitants, chinois ou Japonais, c'est la mémoire vivante de Quingdao. Ryu pousse de guingois comme une plante mal éclairée, sans se sentir choyé.


Après le 7 puis le 9 août, après Hiroshima et Nagasaki, le monde bascule, le Japon capitule, les japonais doivent partir, c'est l'exode et son lot de ruptures, et notamment la disparition de Ryuichi le père de Ryu. 
A travers la vie des deux amis François Simon revisite l'Histoire du Japon avant et après Hiroshima.
Il analyse les deux facettes du Japon dévasté par la guerre, comme deux regards irréconciliables que le passionné du soleil levant va réveiller.


D'un côté la renaissance du Japon, comme la redécouverte des grandes traditions, comme sa vocation culinaire remise à jour que le célèbre journaliste François Simon excelle à décrire.
A l'opposé la fin des hostilité permettra à la pègre la plus cruelle et la plus sanguinaire de prospérer. On la découvre dans le décor de l'Hôtel Columbus Star, et son impitoyable Shinpei, Kamikase miraculeusement sauvé par un crash au décollage.
C'est là que Ryu reçoit ses ordres de fine lame, c'est aussi de là qu'il observe la belle Mamechiyo Guesha au service des plus riches japonais.


Bien des grands moments de la très meurtrière guerre du pacifique sont restitués. Ils viennent illustrer toutes les contradictions entre raffinements et cruautés. Les deux jeunes amis illustrent ce mélange de traditions très subtiles et élitistes, avec en arrière plan les disparitions sanguinolentes.


Le jeune Tateru devenu grand cuisinier grâce aux savoirs très anciens reçus de sa mère et de Kasuko, vous enchantera, et le langage poétique qu'il porte est remarquable de sensibilité.
François Simon est une brillante plume de toutes ces subtiles impressions olfactives ou de ses envolées personnelles sur la finesse des vents marins.

"C'est un feulement mélodieux, hypnotique, lancinant, mais tellement apaisant". Page 29 

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