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Critique de ClarissaDalloway




Nell va s'éteindre, bientôt, à Sainte-Perrine, rue Chardon Lagache, dans cette maison de retraite, de fin de vie, ultime étape de son long voyage au creux de l'écriture, au sein des rêves les plus fous, au coeur du souvenir de celui qui n'est plus, entourée de ses enfants, toujours...
Nell, de son nom d'auteur Nell Pierlain, est la mère de Patrick Souchon, l'écrivain, celle d'Alain aussi, l'orfèvre des mots et des notes de musique.
Et tandis qu'elle vit ses derniers jours, tout près de la rue d'Auteuil, à deux pas de la rue Verderet et du petit appartement qu'ils habitaient alors « tous ensemble », son fils Patrick vient lui rendre quotidiennement visite dans sa petite chambre, et il se souvient, composant déjà peut-être sans le savoir "La chanson de Nell", comme pour noircir de ses mots le voile blanc qui se profile, inexorablement, blanc comme ce sang "qui nous inonde, le silence plein la voiture.", comme le "blanc de l'immense drap que les ouvreuses déploient en fin de saison sur les fauteuils rouges des théâtres.". le blanc de la fin.
Le départ annoncé de la mère rappelle comme une fulgurance celui du père, des années plus tôt. "La chanson de Nell" s'ouvre sur ce terrible accident de voiture qui allait tous les mutiler à tout jamais, un certain janvier 1959. Et puis comme en écho, une boucle qui se ferme, la mort de Nell, en 2004... Entre deux, tout un pan de vie, et une mère droite comme un I qui prend le gouvernail entre larmes et sourires.
« Tu ne réponds plus quand je te parle. Tu ne me regardes plus. Tu ne me demandes plus ton sac, tes lunettes, une orange, un verre d'eau. Plus envie de rire. de rien. Qu'ai-je fait pour te retenir et que vais-je faire maintenant ; seul ici, seul en ta présence, seul avec nos souvenirs en fuite ? »
Ecrire, écrire ces souvenirs en fuite, les garder, les rassembler, les coudre ensemble, un peu comme ils viennent, comme une robe, une parure pour sa mère défunte, définitivement partie et pourtant tellement présente, « vivante » à ses côtés.
Ecrire pour ne pas oublier, et poursuivre l'existence ce celui qui reste. Ecrire pour rester proche, aussi proche que possible de celle qui fut sa mère, mais aussi une romancière à succès, Nell Pierlain (Pierre et Alain comme anges tutélaires) et qui désirait tant que lui aussi, Patrick, écrive un jour.
« Tu disais, facile : il suffit d'un papier et d'un crayon, c'est simple.
Ecrire était une façon de me garder près de toi, en réserve. »

Qui était Nell ? Une femme aux mille facettes, inventive, enjouée, toujours sur le qui-vive, inquiète, angoissée, désemparée devant les factures et le peu de recettes, en proie au cafard du petit matin, comme ses héroïnes de papier...
Sombrer et rebondir, acheter s'il le faut et pourquoi pas leur château en Espagne à tous, le château de Nell, un vrai, en ruines, en Touraine.
« Château à ciel ouvert, la nuit. Les étoiles brillent à travers les toitures défoncées, il y a des trous dans les poivrières, des trous dans la tête, enchevêtrement de poutres, étoiles qui viennent avec le vent, nous transportent dans l'au-delà dont nous respirons l'air humide et frais cent fois respiré par ceux qui nous ont quittés, les disparus. »

« La chanson de Nell », est un livre merveilleusement émouvant, sincère, juste jusque dans la douleur ou le sourire. Un livre tout plein de courants d'air et de vie, un des ces livres rêvés, « châteaux de lumière, creusés de l'intérieur, ouverts à tous vents. »

Un grand coup de coeur
Lien : http://lily-et-ses-livres.bl..
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