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Critique de Tachan


Je profite de la sortie du tome 2 ce jour, pour vous parler de ce nouveau seinen proposé au catalogue de Glénat qui a malheureusement eu l'idée plus que douteuse d'en changer la classification japonaise pour l'inclure dans sa collection "Shojo +". Je trouve ça sexiste de considérer que parce qu'il y a de la romance dans un titre, il faut le ranger dans la catégorie des oeuvres plutôt destinées à un public féminin... Mais passons, nous allons plutôt parler de l'oeuvre en elle-même.

Le titre, toujours en cours à ce jour au Japon, compte 3 tomes et est signé Nozomi Suzuki, dont c'est la première oeuvre. Il est publié au Japon dans la magazine seinen Gekkan Action. Pour autant, j'ai trouvé que l'autrice faisait preuve d'une rare maîtrise aussi bien dans le trait que dans la narration. Tout est extrêmement fluide et bien fait, même si c'est un récit fort classique dans le fond et la forme.

Loin de révolutionner le genre, la mangaka propose une tranche de vie se déroulant dans un lycée japonais où l'on sent vite poindre de tendres sentiments entre une lycéenne et son professeur. L'originalité vient de la caractérisation des personnages, Ruriko est dotée depuis sa naissance d'une grande tache bleue qui lui mange une partie du visage, tandis que Monsieur Kanda, lui, souffre d'une maladie/un syndrome l'empêchant de distinguer les visages des gens, qui pour lui se ressemblent tous... de là va naître une très belle histoire sur la différence.

J'ai d'emblée été séduite par l'héroïne. Loin de se laisser accabler par sa différence, elle a pris le parti de vivre avec, quitte à forcer sans cesse le trait pour ne pas gêner les autres. Elle fait preuve de beaucoup de maturité et de caractère. Elle m'a souvent fait de la peine et en même temps je l'ai admirée. L'autrice met en scène des réactions très juste de la part de ceux qui sont confrontés à elle et à sa particularité. Oui, c'est normal d'être surpris. Oui, on peut avoir une réaction étrange la première fois. Je ne pense pas qu'il faille le nier, le cacher ou s'attendre à autre chose, c'est humain. Là où c'est intéressant, c'est de voir comment les autres vont ensuite se comporter : rester moqueur, rester gêné, rester à l'écart, ou juste l'accepter comme n'importe qui d'autre. Pour le moment, la mangaka ne développe pas encore trop ça mais j'aimerais bien.

Face à elle, Monsieur Kanda souffre d'un trouble que je ne connaissais absolument pas, la prosopagnosie qui l'empêche de différencier les visages les uns des autres, et dans un métier comme le sien où aussi bien ses élèves (vive l'uniforme) que ses collègues s'habillent pareil, dur dur de différencier les gens. Mais là aussi, nous sommes face à un héros qui ne souhaite pas être pris en pitié et qui va chercher des astuces pour vivre normalement, quitte à se faire aider par une élève ;)

Une belle dynamique s'installe rapidement, Ruriko aidant régulièrement son prof en le sortant de l'embarras. L'autrice a accès son histoire sur des personnages très positifs malgré ce qu'ils vivent ou ont vécu. Elle ne culpabilise pas du tout ceux qui réagissent mal à leur contact. En revanche, elle montre bien les effets dévastateurs que cela peut avoir sur eux. J'ai d'ailleurs vraiment apprécié qu'elle montre un peu la vie de famille de Ruriko où ses parents en voulant faire comme si de rien n'était sont parfois un peu maladroits. J'ai également été marquée par le passage où elle nous présente l'école pour décrocheurs où a été Ruriko, ça m'a rappelé un peu Cat Street de Yoko Kamio, et ça m'a serré le coeur.

Cependant ce premier tome est fort classique dans la mise en scène. Il y a d'abord la présentation et la rencontre des personnages d'une façon un peu déjà vue et revue. On les voit ensuite progressivement faire connaissance sous le regard parfois jaloux des autres, élèves et professeurs, mais c'est assez lisse. L'aspérité arrive seulement vraiment à la moitié du tome quand on découvre le passé de l'héroïne et qu'elle commence à montrer des sentiments pour son professeurs dont elle se sent de plus en plus proche. On a déjà vu des histoires entre prof et élève, j'en ai aimé certaines et d'autres m'ont dérangée. Ici, je suis plutôt dans la première catégorie. J'aime parce que je suis touchée par ce qui les rapproche, je sens beaucoup de douceur entre eux, je pense qu'ils peuvent se faire beaucoup de bien l'un à l'autre. Après j'aurais peut-être aimé qu'on reste plus sur une relation platonique plutôt que de tomber dans une classique romance, mais peut-être que j'aurais une bonne surprise par la suite.

Du côté des dessins, c'est une belle surprise pour une première oeuvre. Certes il y a quelques cases perfectibles, je pense notamment à celles où l'héroïne fait sport où on sent un peu de maladresse, mais dans l'ensemble c'est très réussi. La mangaka a vraiment donné un joli design aux personnages. J'aime en particulier la meilleure amie de l'héroïne qui a un petit look qui me rappelle celui des meilleurs amies des héroïnes de Cat Street et Moving Forward, peut-être des inspirations pour l'autrice ? le découpage est clair et bien rythmé. Franchement ça se lit très très bien.

Même si Glénat m'a un peu braquée avec le changement d'étiquette de la série, je ressors conquise de ma lecture. C'est un joli classique revisité : une romance prof-élève, mais avec un angle de vue qui me plaît et me touche : des héros avec une forme de handicap, visible ou non. L'autrice propose un vrai voyage vers l'acceptation des différences.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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