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Critique de PhilippeCastellain


Dans les éditions Plon, les « Terre humaine » étaient d'énormes bouquins rapportant des témoignages des quatre coins du monde sur les peuples lointains, les évènements majeurs et peu connus, les minorités en voie d'acculturation… Bref, l'une de ces collections de l'époque où les éditeurs pensaient être porteurs d'une mission sacrée de préservation des connaissances et de diffusion du savoir, qu'ils plaçaient au dessus de leur rentabilité financière. Qu'est-ce que ça parait loin tout ça…

Pour les ethnologues ou les gens un peu curieux, ces ouvrages sont de véritables mines d'or. Et celui-ci a marqué ma jeunesse. Vous savez peut-être qui sont les Hopis, ce petit peuple Amérindien du fin-fond des déserts de l'Arizona, qui vivaient (et pour quelques-uns vivent encore) dans de petits villages de style Pueblos perchés au sommet d'imprenables mesas. Don C. Talayesva était l'un d'entre eux, un shaman si l'on peut dire. Dans l'entre-deux guerres, à la demande d'un sociologue américain, il rédigea ses mémoires.

Logiquement, il commence par ses souvenirs d'enfance. Sa découverte progressive du monde qui l'entoure, fait de traditions, de coutumes, de croyances. Bien loin de notre univers rationnel, c'est un univers peuplé d'esprits et de magie, où chaque chose a un sens caché et une symbolique, où outrepasser les interdits rituels se paye de lourdes malédictions.

Vers dix ans, comme tous les enfants indiens, il doit partir dans les écoles des blancs, loin des réserves. A l'époque, ces institutions ont été lourdement réformées, et n'ont plus trop à voir avec les mouroirs des débuts. A part la douleur d'être séparé des siens, les années qu'il y passera ne seront donc pas par trop détestables. Il a bien intégré que mieux valait comprendre les blancs pour arriver à ce qu'ils vous fichent la paix. Il y a même deux ou trois choses utiles à apprendre. Mais rien de ce qu'on lui enseignera ne modifiera sa vision du monde.

Son retour dans la réserve marque, grosso modo, son passage au statut d'homme. Dès lors, son récit se polarise sur les deux aspects importants de la vie pour un Hopi : la religiosité et la sexualité. La première rythme tous les aspects de la vie, et rejoint souvent la seconde – beaucoup de cérémonies comportent une simulation d'acte sexuel, voir un acte sexuel tout court. Pour la seconde, la société Hopi est visiblement très libre pour tout ce qui se passe avant le mariage – après c'est une autre affaire.

La peur de la sorcellerie est l'un des autres aspects marquants. Il y a les « deux-coeurs », ceux qu'on accuse de s'y livrer. On les tient pour responsables des maladies, des évènements tragiques. Ils ne sont pas mal traités, mais craints et ostracisés. Un sujet à l'évidence totalement tabou, sur lequel son témoignage n'en est que plus précieux.

Avec ce livre, on se retrouve plongé tout droit dans la vie de ce petit peuple si particulier qui a mis tant d'obstination à survivre... Et c'était bien le but de son éditeur.
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