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Critique de 5Arabella


Publié en 1928 en feuilleton, sorti tardivement en volume dans son pays d'origine, ce roman est resté inédit en français jusqu'à cette parution chez Philippe Picquier en 2018 (il est paru la même année en anglais), il ne faisait pas partie des deux gros volumes que la Pléiade a consacrée à l'écrivain nippon.

Un écrivain quelque peu marginal, Mizuno, survit en livrant difficilement des copies à une revue. Sa paresse et indolence font qu'il n'écrit que sous la pression économique, et son éditeur doit littéralement lui arracher les pages, Mizuno étant prêt à tous les mensonges et subterfuges pour obtenir de l'argent, qu'il dépense ensuite en dépit de bon sens, bien plus rapidement qu'il n'est en mesure d'en gagner. Son travail trop vite bâclé à la dernière minute lui a valu de faire une erreur pénible : dans les derniers feuillets de son nouveau roman, il a remplacé le nom d'emprunt par le véritable nom de la personne dont il s'est inspiré pour créer son personnage. Or il a présenté ce malheureux Kojima sous un jour peu avenant, il s'agit qui plus est d'un homme qui évolue aussi dans le monde de l'édition, et Mizuno craint un peu ses réactions. Sa paranoïa lui inspire en plus une autre crainte : Kojima étant assassiné dans le livre, il a maintenant peur que quelqu'un d'hostile ne saisisse cette opportunité pour lui attirer des ennuis en tuant Kojima dans les mêmes circonstances que celles décrites dans le roman : compte tenu de la mauvaise réputation de Mizuno, la police risquerait de le soupçonner. le voilà donc embarqué dans des stratégies délirantes censées le mettre hors de cause, et qui vont l'entraîner dans des mésaventures grotesques et surréalistes jusqu'à un dénouement final des plus surprenant.

Ce n'est sans doute pas le plus grand roman de Tanizaki, mais c'est loin d'être un fond de tiroir sans intérêt. La paranoïa de Mizuno, ses difficultés de travailler, de sortir de ses obsessions, son manque de bienveillance vis-à-vis des autres, dressent un portrait sans complaisance, même si pas sans humour, d'un auteur dans lequel beaucoup décèlent des ressemblances avec Tanizaki lui-même. C'est en réalité un exercice brillant, parodie de roman policier, qui ne sert que de prétexte pour disséquer le personnage principal, aussi une vision caustique des rapporta hommes-femmes, dans lequel le mâle japonais n'a pas le beau rôle. L'aperçu du monde de l'édition nippone est aussi drôle que sarcastique, l'art ne semble pas avoir grand-chose à faire dans ce qui est avant tout affaire de gros sous.

Un bon moment de lecture.
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