AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de helione


Le titre français donné au livre de Chika Unigwe , FATA MORGANA m'a étonnée, le titre original «  dans la rue des soeurs noires » étant bien plus proche du sujet. Ce titre trouve sa justification néanmoins si on sait que  la fée Morgane (Fata Morgana en italien) avait le pouvoir d'élever des palais au-dessus des flots, trompant ainsi le marin. Icic ce sont les femmes nigérianes à la poursuite d'un rêve insufflé par un proxénète nigérian qui les envoie en Belgique.
Je dois dire que j'ai entamé la lecture avec beaucoup d'appréhension. Je me suis demandé ce qu'un roman pourrait apporter de plus qu'une enquête journalistique d'autant que l'auteur a rencontré de très nombreuses prostituées nigérianes en Belgique.
Pourtant j'ai été embarquée dans ces quatre histoires.
Quatre jeunes filles presque des enfants, toutes originaires de Lagos partage à Anvers le même appartement surveillées par Madame et son homme à tout faire, le mutique Segun.
Elles ne partagent que très peu de choses jusqu'à la mort de l'une d'elles, Sisi.
Le roman est en quelque sorte la veillée funèbre de Sisi pendant laquelle finissent par sortir les souvenirs du passé que les trois survivantes n'avait jamais partagé jusque là. C'est ce qui fait le prix de ce roman qui n'évoque que très peu le travail de ces filles mais s'attache à décrire ce qui les a amenées dans ces vitrines.

- Ama, la fille de bonne famille, victime de l'inceste au sein d'un milieu aussi religieux qu'hypocrite,
- Efe, naïve et fragile qui trouve de la détermination pour subvenir aux besoins de son fils resté au pays.
- Joyce, une soudanaise qui subira de multiples viols dans son pays et le rejet en Belgique.

L'auteur évoque aussi le passé et les aspirations de Sisi qui, pourtant a fait des études mais qui sans réseau n'est jamais parvenue à trouver un travail qui la fasse vivre décemment au Nigéria.

Chika Unigwe même si elle a travaillé le fond comme une journaliste, a fait oeuvre d'écrivain. Brodant ses phrases d'idiomes ibgo et de pidgin nigérian, elle a un style enlevé et dynamique qui décrit avec vitalité le destin de ces quatre femmes qui se refusent à toucher le fond malgré leur exploitation sexuelle.

Ce roman refuse de présenter ces prostituées comme des victimes passives, bien au contraire. Elles veulent survivre avant tout, et dépasser les apparences de leur situation, femmes objets dans une vitrine que quartier rouge d'Anvers. C'est d'ailleurs pendant la conquête de cet amour-propre retrouvé que Sisi est tuée.
La dignité que leur donne Chika Unigwe fait chaud au coeur. Un grand roman, très fort.

Commenter  J’apprécie          10



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}