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Critique de Faignan


Parfois, quand tu fouilles les vides greniers, tu tombes sur de vieux livres qui ne paient pas de mine. Des Hachette qui datent de la Seconde Guerre mondiale, des couvertures vertes. Puis, tu découvres des titres de Verne que tu ne connaissais pas. Tu les achètes, 50 centimes en général, et tu les laisses de côté. Il y a tellement de bouquins à lire. Et finalement, tu les ouvres et tu découvres quelque chose que tu n'attendais pas. Tu as beau être un lecteur de Verne depuis l'enfance, il y en a toujours que tu n'as pas lu. Tu as beau avoir une image un peu réduite de ce qu'est l'oeuvre de Verne, entre Nemo d'un côté et Michel Strogoff de l'autre, tu découvres toujours des textes qui divergent. Ce fut le cas, pour moi, avec le Serpent de mer.
De quoi s'agit-il ? Déjà d'une sorte de dépaysement, de décentrement même. La majeure partie du livre raconte la vie sur un baleinier du XIXe siècle, le Saint-Enoch. le lexique des voiliers provoque naturellement une plongée dans l'inconnu. Même si tu regardes de temps à autre ce que désigne tel ou tel mot, tu abandonnes rapidement face à la mâture. Bref, ce qui dérange et intéresse le plus est encore la chasse à la baleine. Je suis un homme de la fin du XXe siècle et j'éprouve donc des difficultés morales à accepter que l'on puisse chasser la baleine. Pourtant Verne qui oeuvre bien avant que la morale occidentale évolue dans ce sens dépeint de façon sobre une chasse qui est normale pour lui. La façon d'acculer les baleineaux, d'attraper les mères et autres animaux en déperdition. Il s'agit d'une fenêtre ouverte sur une part de notre passé que nous voudrions oublier, sans doute, mais qui se révèle étonnamment neutre. Il s'agissait finalement de la vie d'hommes ni plus ni moins mauvais que d'autres.
Le serpent de mer finalement est véritablement un serpent de mer stylistique. Il apparait et disparait sans que l'on puisse le découvrir ou non. Tout au long de l'histoire, entre la France, la Nouvelle-Zélande et le Kamtchatka nous doutons de son existence. Et c'est ce doute soigneusement entretenu qui fait que ce livre est sans doute l'un des Verne les plus intéressants que j'ai lus. Ne s'agit-il pas que des fantasmes de Jean-Marie Cabidoulin ? C'est dans cette direction que pousse le narrateur qui, comme le capitaine ou le médecin de bord, préfèrent les explications physiques aux événements. Verne pourtant, en bon lecteur des sciences naturelles, ne ferme pas la porte complètement et se contente de dire que nous n'avons encore jamais rencontré de serpent de mer.
En refermant ce roman, je ne peux pas m'empêcher de penser au rôle qu'attribut Tzvetan Todorov au doute dans L'introduction à la littérature fantastique.
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