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Critique de le_Bison


Carrefour, quartier pauvre de Port-au-Prince. C'est là que j'ai posé mon barda, un vent de poussière en terre haïtienne. du bruit, des odeurs et des hommes et femmes qui brassent. Ils brassent du béton, ils brassent l'air, ils brassent la vie et la ville, du matin au coucher de soleil, ce rond d'un orange flamboyant qui plonge dans le bleu amer de la mer. Des bus colorés sur des routes déglinguées klaxonnent leur humeur, moi je rêve d'être brasseur. Eux, cette mère, ce père, ne prennent même plus le temps de rêver. A quoi ça leur servirait dans ce quartier ?

Tour à tour, ils prennent la parole, se faisant narrateurs de leur histoire, de leur ville, te fais pas de bile, je m'assois dans la poussière, chaleur humide et bibine tempérée. J'aperçois cette misère, qui rime peut-être avec bière. Je comprends ce dilemme, chargé d'une lourde peine. Ils ont l'impression de s'être trahis, dans la pauvreté de cette vie, d'avoir vendu leur âme au diable, alors que certains traversent la mer jusqu'à la côte où poussent des érables à la place des palmiers. Un cri de douleur envahit les ruelles sales et boueuses. le leur, celui d'une mère, celui d'un père, de tout un peuple devant l'impuissance de leur vie, devant la « lâcheté » de leur âme. Carrefour en reggae.

Une jeune fille sort de la voiture, au bras d'un monsieur presque trois fois son âge, blanc et ambassadeur, ou blanc et expatrié, riche touriste visitant les cocktails cinq étoiles des grands hôtels, un air de jazz qui somnole au bord de la piscine. Peu importe le type. Revenons à la fille, belle comme un top-modèle, ses seins généreux, son cul fiévreux, c'est ce qu'elle se dit. Son sourire de façade devant une coupe qui pétille, ils se sont rencontrés probablement dans un bar sombre au coin du Parc historique de la Canne à sucre. En échange, il lui offre un vrai lit, les plus belles robes du marché, et plus si affinité. Comme on dit. Ce plus, c'est permettre à toute la famille de vivre un peu mieux, de trouver de quoi à manger… D'où le dilemme de cette mère, de ce père, d'avoir le sentiment de « putaniser » leur fille Babette, une poupée Barbie au coeur de cette mélodie.

Je découvre ainsi à l'ombre d'un cocotier, l'ombre d'un nouvel écrivain, haïtien, son premier roman, à la mélopée mélancolique, ambiance jazz et caraïbes, sex on the beach et strings sur la plage. Deux voix qui se mêlent dans l'écriture, et dans ma tête, pour peindre en toile de fond un pays, Haïti, une ville, Port-au-Prince, un quartier misère, et des brasseurs qui brassent toute leur putain de journée, sous les sunlights des tropiques où l'amour se raconte en musique. Des percussions qui vibrent la nuit, mon coeur caresse ces fesses du regard, mon âme s'est fracassée contre son rivage.
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