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Critique de CaroleBouchut


Un livre qu'il m'a été très difficile de lire, notamment par le fait que contrairement à l'auteur au moment de sa « naissance » au monde extérieur, je n'ai pas une vingtaine d'années, mais une quarantaine. À ce sentiment de « trop tard », c'est ajouté une drôle de sensation, comme si j'étais à la fois curieuse de réussir et de comprendre et écrasée par l'ampleur de la tache à devoir envisager que ma façon d'avoir été (et de toujours être) au monde était totalement erronée, pervertie. De nombreux passages ont fait douloureusement écho en moi, parfois m'apportant quelques « solutions » ou « réponses », souvent me laissant dans la douleur de ne pas savoir être autrement. De ne pas savoir être, tout court.
Je commence à cerner la marionnette vide que je suis : cette marionnette qui n'est vide que de moi, mais pleine de tous les autres que j'ai pu côtoyer ou seulement croiser, dans la vie de tous les jours, dans les livres, dans les films... Je commence à comprendre que ce que certains de ces autres ont pu aimer ou seulement apprécier en moi n'était que le reflet d'une partie d'eux-mêmes. Ainsi, le plus dur ne sera certainement pas MON acceptation de ce que je suis, mais plutôt celle de mes proches, de ceux qui disent me soutenir, alors qu'ils ont tant de mal à accepter et assumer mes différences, mes faiblesses, eux qui ne veulent surtout rien changer en eux pour m'aider à m'accepter, mais qui m'imposent de tout changer en moi pour leur agréer. Être comme avant que je ne puisse plus fonctionner, comme avant que je tombe en panne générale.

D'autres passages ont fait jaillir en moi des sensations hautement désagréables de « déjà vu », de « déjà ressenti ». Ainsi en est-il des passages sur le père ou la mère, pourtant si éloignés de mes propres parents par leur rapport à leur fille, et si proches par certains autres aspects trop flous pour être saisis. De ces passages, un texte c'est formé en moi plusieurs heures après les avoir lus ; texte visuellement semblable à ceux que je réécrivais à l'adolescence, mais sémantiquement plus lourd, les mots appris au fil des années ayant pris la place des ponctuations et des « blancs » de l'époque. Le voici :

Quand la compréhension tardive
De ces différences innommables
Ne sont pas les signes
D'une folie certaine
Ouvrant à tous les droits sur son « possesseur »
Fait sourdre du fond des entrailles
Une peur sourde
Chez ces autres
Aujourd'hui devenus irréprochables
Aux yeux de tous.

Cette folie n'est plus,
Et pourtant,
La parole emmurée
Reste prisonnière
Des souvenirs absents.

Enfin, ce livre m'a permis de comprendre ENCORE de nouvelles « choses » me concernant, donnant un nouvel éclairage sur de nombreux « faits inexpliqués et inexplicables » de ma vie d'adulte. Par exemple, cette capacité à cerner et comprendre les choses uniquement en « état d'inconscience », en utilisant ce que j'appelle mes « perceptions périphériques », alors que quand je veux faire, comprendre ou cerner CONSCIEMMENT les choses, j'échoue lamentablement.

Ce livre ne parle pas seulement du parcours particulier de l'auteur, mais aussi des « instants de vie » d'autres personnes autistes, enfants, adultes, verbales, non verbales, autonomes ou dépendantes... Il retrace à la fois la diversité des tableaux que rassemble ce spectre, mais aussi leurs similitudes. Il témoigne qu'un espoir peut être permis pour tous, à condition de ne pas se laisser stopper par l'ampleur du travail que cela demande, par les personnes autistes, mais aussi et surtout par ceux qui les accompagnent vers l'indépendance, la découverte et l'acceptation de leur moi.

Ce livre rejoint donc la catégorie des livres à lire et à méditer.
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