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Critique de Wolkaiw


Silence les enfants, les Dieux ont encore parlé. Seth et Horus se préparent à livrer bataille, n'hésitant pas à se servir des humains comme de simples pions et de leur monde comme un vaste théâtre à ciel ouvert. Une querelle intestine, alimentée depuis des siècles, se déploie avec fracas sur l'Egypte. Ayez bien à l'esprit que Seth a assassiné son propre frère, Osiris, afin d'accéder au trône à sa place. Seth, toujours lui, s'oppose également à ce qu'Horus, le fils d'Osiris et d'Isis, monte sur ce même trône. le récit de L'Ordre d'Horus, à travers le parcours de ses personnages, retrace l'histoire d'une période troublée en Egypte et illustre les rivalités divines qui déciment le pays.

Sethi II est sur le trône, nous sommes vers 1200 avant J.-C. et le vizir du pharaon n'est autre que Bay. Une recontextualisation a besoin d'être effectuée car cela n'est pas forcément clair et évident dans le livre. Les informations sont précises mais jamais situées dans le temps, ce qui peut grandement perturber le lecteur, pour peu que l'on aime avoir des repères temporels. Prenez donc place entre les pages et partez à la découverte d'une autre époque et d'une grande civilisation. Laissez derrière vous tout ce que vous savez et savourez la romance très sensuelle qui se profile.

Accordez une attention toute particulière à la jeune Iâh ainsi qu'à ses visions. Il se pourrait bien que sur ses frêles épaules repose le destin de toute une nation. Iâh possède un don particulier, un don qu'elle considère comme une malédiction, un don qu'elle estime être l'origine du mal qui la ronge et qui porte le nom de solitude. Elle peut voir le futur mais également communiquer avec une personne très importante et ô combien estimée. Arrachée des griffes d'une famille qui ne l'a jamais comprise, la jeune femme se retrouve propulsée au coeur d'une nouvelle vie.



Le Temple d'Horus ouvre ses portes à Iâh, lui dévoilant toute la magnificence du lieu ainsi que toute la dévotion des fidèles du Dieu. Suivez, au fil des chapitres, son apprentissage ainsi que la vie au sein du Temple, les leçons et les cours qui lui sont dispensés, les rencontres et les imprévus, les ennemis et les alliés sur lesquels elle pourra toujours compter. Kaour-Râ, Margalit, Dana, Apotrop et Bay représentent autant d'étapes qui pimenteront son existence, autant de visages qui l'accompagneront. L'amour, l'amitié, le pouvoir politique et la pression, son quotidien va être jalonné de nombreuses expériences, aussi enrichissantes qu'éprouvantes. Par la force des choses, vous vous attacherez au personnage d'Iâh, à son caractère rebelle, son tempérament de feu, à la passion qui l'anime et l'amour qui la consume.

Au sein du Temple, chaque élève poursuit son apprentissage avec un Maître (Paneb) qui lui est en quelque sorte attribué selon une tradition divine. Iâh doute énormément quant au Maître qui s'occupera et supervisera sa progression ; d'effrayantes rumeurs circulent au sujet de certains d'entre eux, des bruits de couloir si terribles que la jeune Egyptienne préfère ne pas y penser. Lorsque son Paneb lui est attribué, elle oscille entre soulagement et terreur, incapable de réaliser ce qui se passe et l'importance de ce moment pour la suite de ses aventures.

La relation Maître/élève que va nouer Iâh et son Paneb est aussi passionnelle que dangereuse. Regardez cette couverture et la tension sexuelle qui en émane, admirez ces deux corps que rien ne semble pouvoir troubler. A eux deux, ils incarnent l'interdit et le danger, la passion et l'amour envers et contre tout. Une naissance timide puis des échanges complices et carrément sulfureux, leur liaison occupe une place essentielle dans la construction du récit. Iâh apprend à se découvrir, à se connaître, à s'accepter en même temps qu'elle permet à son Paneb d'ouvrir les yeux et d'en découvrir davantage sur lui-même. Il règne une telle tension entre eux, un tel désir que chacune de leur rencontre est explosive et très érotique. Les sentiments qu'ils éprouvent l'un envers l'autre sont surpuissants et dévastateurs.

Vous comprenez donc qu'en plus d'aborder le conflit qui oppose les Dieux (Seth et Horus), de soulever les problèmes du règne de Sethi II, ce livre narre une magnifique histoire d'amour, compliquée et intense, charnelle et mystique. Avec ces deux amants, nous oublions le monde autour, les dangers et les pressions exercés par quelques personnalités influentes, avec eux nous sommes comme sur un petit nuage, entraînés au coeur de leur folie, nous ne nous soucions plus des tracas du quotidien ni de quoi que ce soit d'autres. Incontestablement, cela représente une des forces du récit mais également une de ses faiblesses. Les actions et personnages secondaires sont occultés au profit des étreintes à répétition, tout ce qui constitue la vie au Temple et à l'extérieur disparaît pour laisser la passion des deux âmes s'exprimer pleinement. Leurs élans de plaisir rythment, d'une certaine manière, l'histoire, mais je les ai trouvés cependant trop nombreux, trop insistants. J'ai toutefois apprécié le fait que ces scènes ne soient pas ni crues ni triviales, je trouve juste qu'elles scindent trop l'histoire et font oublier le reste.

Sachez une chose les amis, ce livre a été écrit à quatre mains. Oui oui, par deux auteures. C'est un pari risqué que celui de se lancer dans l'écriture à plusieurs, je peux pourtant affirmer ici que c'est un pari réussi, et haut la main! Je n'ai ressenti aucune variation de style, pas la moindre fausse note. Au contraire, tout est harmonieux et cohérent, réfléchi et mesuré, le style est limpide et très agréable. Les dialogues sont très bien dosés, tout en finesse. Les mots étrangers (égyptiens) sont en italique et un lexique est consultable à la fin, ce qui facilite l'immersion et contribue à installer une véritable ambiance. On se croirait presque en Egypte au temps de Sethi II, à déambuler librement au sein du Temple d'Horus parmi les fidèles. Je regrette juste que l'histoire ne s'éloigne jamais d'Iâh afin de nous faire découvrir le monde du dehors, celui du peuple qui subit le règne du Pharaon, celui de ces hommes et femmes qui vivent hors des murs du Temple.

Le pays est divisé depuis l'arrivée au pouvoir de Sethi II, Pharaon que l'on veut renverser. Les temps sont troubles et plus que jamais on a besoin des Dieux, de leurs fidèles et des dons de ces derniers. Les tensions, palpables, font régner une ambiance oppressante, une atmosphère lourde. Les visions qu'Iâh a concernant le futur de l'Egypte ne laissent rien présager de bon mais elle préfère se taire. Que dire ? Pourquoi ? Cela changera-t-il les choses ? En plus de découvrir l'importance de son don, la jeune femme est confrontée à plusieurs dilemmes, elle se torture le coeur et l'esprit. Avec elle, sentez et ressentez le danger, cette ombre malfaisante qui plane et se dévoile au fil des pages, un danger qui peut revêtir bien des formes.

L'univers dépeint dans ce livre s'avère fascinant mais dangereux, comme un jeu dans lequel on pourrait se brûler les ailes et y laisser quelques plumes. Préparez-vous à suivre des enseignements philosophiques et à ouvrir votre esprit à une autre façon de penser. le monde n'est pas forcément celui que vous imaginez. J'ai particulièrement aimé les réflexions intellectuelles sur le Soi, la Vie, l'Amour, le Couple, la Source et tant d'autres notions. Tout ne va pas de soi pour le lecteur, de même que pour Iâh, pourtant tout suit une certaine logique ainsi qu'une démarche pédagogique très appréciable. Je me suis familiarisée, en même temps que les personnages, avec ces concepts qui guident la lecture. Iâh représente l'élève appliquée, curieuse, celle qui a soif d'apprendre, qui meurt d'envie de se mettre à la pratique, celle qui ne recule devant rien pour arriver à ses fins.

Si j'ai aimé la construction de l'histoire, le parcours d'Iâh et celui de Kaour-Râ, si j'ai aimé suivre les aventures des protagonistes et plonger au coeur de l'Egypte, j'ai eu un peu de mal avec l'enchaînement trop rapide des événements précédents la fin de l'histoire. Certes, le final est surprenant mais pas assez approfondi sur certains aspects. Entendez par-là que l'ensemble du récit est riche, fouillé et documenté, alors que les derniers chapitres me semblent un peu trop précipités. J'aurais aimé comprendre le fonctionnement, le mécanisme, le pourquoi du doute, les intentions de chacun, tout apparaît presque trop facile, surtout au regard de quelques personnages pourtant présentés comme des monstres. Les dernières pages me donnent vraiment cette sensation de rapidité, presque de frustration parfois. Je reconnais toutefois que l'épilogue arrive à point nommé, en parfait miroir du prologue. Ils se répondent dans un superbe écho qui puise toute sa puissance à la lumière de l'intrigue du livre. le titre délivre ainsi toute sa saveur et l'on comprend le terme de “Réminiscences” qui prône juste en dessous du nom de la saga. J'attends impatient le tome deux et les réponses qu'il réserve à mes nombreuses interrogations.

Écoutez mes chers enfants, je conclurai cette histoire en insistant sur le caractère historique et érotique de ce récit, sur la passion des deux amants et les problèmes rencontrés par l'Egypte, sur la place des Dieux et le poids des contraintes. Écrit à quatre mains, dans un style aussi élégant qu'agréable, L'Ordre d'Horus retrace un parcours fascinant et atypique, improbable et dangereux. Bien que les scènes érotiques, très sensuelles, soient très nombreuses, elles ne sont pas crues ni vulgaires pour autant, elles alimentent le feu ardent qui consume les personnages, ravivent les flammes d'un amour vieux comme le monde. Ce premier tome pose le premier pilier d'une saga qui s'annonce palpitante, oscillant entre passé et présent, entre croyance et doute, entre passion et peur.

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