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Critique de thedoc


«Donne-toi à moi». C'est un des messages (officiellement entendu) que faisait passer Harvey Weinstein aux femmes qu'il souhaitait séduire. Séduire.... Gros euphémisme.
Puis, suite aux attaques, il prône en ligne de défense : "Si une femme couche pour faire décoller sa carrière à Hollywood, ce n'est pas du viol". Voilà pour le personnage.

A partir d'un article paru dans le New York Times dans lequel l'actrice et réalisatrice italienne Asia Argento dénonce publiquement Harvey Weinstein de l'avoir violée en 1997, la machine est lancée. Les victimes d'harcèlement et d'agressions sexuelles ne se tairont plus. Ces prises de paroles fortes ont donné naissance sur les réseaux sociaux au mouvement féministe #MeToo sous l'instigation de l'actrice américaine Alyssa Milano qui a relancé le fameux hashtag créé dix ans plus tôt pour dénoncer les abus sexuels, encourageant les victimes de viol à parler. Des millions de femmes dans 85 pays y ont répondu en 24 heures. C'est également dans cette mouvance qu'est née l'association de lutte contre le harcèlement Time's Up (lancé par des actrices à l'instar de Meryl Streep, Natalie Portman et Cate Blanchett).
Ce mouvement a été considéré comme un séisme parce qu'il a fait tomber pour viol et harcèlement sexuel un magnat d'Hollywood, puis bien d'autres hommes célèbres et puissants qui n'avaient pas compris que le droit de cuissage n'existait plus et se croyaient protégés de la loi par leur omnipotence.

Depuis, #MeToo a fait des petits, partout dans le monde. Car les violences sexuelles ne connaissent pas les frontières. C'est une histoire qui dure tout de même depuis deux mille ans, souvenez-vous le rapt des Sabines... En France on retrouve ce mouvement sous la forme de #Balance ton porc, hashtag qui en a choqué et offusqué plus d'un. Une telle vulgarité, une telle violence dans ces mots ! Pour ma part, je vois la violence et la vulgarité dans les actes qui sont relatés sur les réseaux sociaux.

"Cours, petite-fille", un an après le lancement de #Me Too, est un ouvrage qui arrive à point nommé. Après le vent d'indignation et les colères - toujours vives et fondées -, cet ouvrage propose de réfléchir aux enjeux, aux expressions actuelles et au devenir de ce moment particulier qu'est #MeToo, qui s'inscrit résolument dans l'histoire internationale du féminisme.

Les auteurs ont convoqué pour cela des sociologues, chercheuses, militantes féministes, historiennes, écrivaines, journalistes, philosophes, anthropologues, artistes, politologues, vidéastes, de tous les bords et de tous les pays. Je me permets ici d'employer le féminin au détriment du masculin car ils ne sont que deux hommes à avoir participé à cet ouvrage pluridisciplinaire, ce que je regrette.

Généalogie du mouvement ; prise de parole des femmes grâce aux réseaux sociaux qui ont joué un rôle primordial, libérateur et solidaire pour les victimes ; réflexion sur le corps, le désir et la sexualité, sur les notions de séduction, de consentement et d'agressions ; inquiétude masculine et offensive réactionnaire ; institutions défaillantes et infantilisantes vis à vis des outrages aux femmes ; place des féminismes dans la société ... Toutes ces interviews, poèmes, confessions et autres analyses ancrent le mouvement #MeToo dans une perspective historique, sociale et politique. Plus encore, ces textes révèlent combien cette prise de parole a (r)éveillé un féminisme nécessaire dans les foyers les plus reclus, loin des discours politisés des mouvements féministes traditionnels.

Enfin, ces contributions qui nous sont données à lire sont autant de moyens de lutte et d'émancipation. A l'heure où certains pays ont la volonté déclarée de faire régresser les droits des femmes, la parole et les écrits doivent se multiplier pour dénoncer cet état de fait qui perdure depuis deux mille ans : la femme n'est pas l'égale de l'homme. Dénoncer, encore et toujours la domination masculine et les violences faites aux femmes, aidera peut-être à faire changer les choses.
Cet ouvrage, impressionnant par la diversité et la qualité des interventions, y contribue sans aucun doute.

Merci à Babelio et aux éditions des femmes-Antoinette Fouque pour l'envoi de cet ouvrage nécessaire.
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