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3.88/5 (sur 65 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Camille Teste est militante féministe et professeure de yoga.

Diplômée d'un Master II Communication de Sciences Po Paris (2014-2016), elle change de vie et devient professeure de yoga en 2019.

Ancienne journaliste spécialisée dans les enjeux de justice sociale, toujours aussi engagée, elle se propose d’allier le militantisme avec le "bien-être".

Camille Teste se fait connaître grâce à son compte instagram @camille_teste. Sur celui-ci, elle partage des réflexions politiques autour du corps, des émotions et des rapports de domination, sur un ton qui mêle humour et philosophie.

Elle est créatrice de Circé, qui propose des retraites de yoga et événements féministes, engagés pour des corps libres, et contre toute forme d'oppression.

Twitter : https://twitter.com/kamilleteste?lang=fr

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Bibliographie de Camille Teste   (1)Voir plus

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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Parce que j'avais un filet de sécurité [...] j'ai changé de voie
Je suis devenue professeure de yoga pour explorer autre chose : la possibilité d'être un corps, de l'habiter, de travailler avec lui et non contre lui. [...]
Mais en intégrant cet univers, j'ai découvert une culture qui était pas du tout raccord avec ma façon de voir le monde. Dans le milieu du bien-être il est d'usage de promettre aux gens de grandes choses : une meilleure vie, un équilibre psychologique, corporel et spirituel, bref, le bonheur. Pour atteindre ces états complexes, don on cherche pourtant le chemin depuis l'antiquité, il suffirait de s'auto-optimiser, grâce à des pratiques allant de la nutrition au fitness en passant par la méditation, le développement personnel, les soins esthétiques, le coaching et une multitude de pratiques aux accents New-Age. Cette logique de perfectionnement continu qui implique de consommer toujours plus, est une aubaine pour le capitalisme. Par ailleurs, ces pratiques individuelles, souvent présentées comme des solutions aux problèmes collectifs, nourrissent une logique de petits gestes, idéale pour ne surtout rien changer.
Enfin, il ne m'a pas fallu longtemps pour réaliser qu'outre les abus et autres dérives sectaires présentes dans ce secteur, les pratiques, outils et espace de bien-être volontiers présentés comme des solutions destinées à toustes, étaient surtout structurés pour convenir à des personnes jeunes, riches, blanches, minces et valides.
pp. 14-15
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7. « Récemment, je suis tombée sur la vidéo d'une youtubeuse réac – dont je ne crois pas essentiel de vous donner le nom. Elle y dit : "Une civilisation avancée, c'est une civilisation où les gens ne portent pas de jogging dans la rue." J'ai eu de la peine pour elle. Outre le classisme de cette phrase, cette remarque dit beaucoup de la façon dont une certaine frange de la population habite son corps. Ou plutôt, ne l'habite pas. Et si nous étions toustes en jogging dans la rue ? Qu'est-ce que cela donnerait ?
Peut-être que nous danserions sur les quais du métro. Peut-être grimperions-nous aux arbres des parcs municipaux. Et, plutôt que d'essayer de cacher tout ce qui fait de nous des corps vivants – nos poils, nos formes, nos rides et nos douleurs – peut-être que nous trouverions le moyen d'en profiter.
En remettant nos corps au centre, peut-être que l'on considérerait davantage le corps des autres. Alors, peut-être concevrait-on les villes pour que tous les corps puissent en jouir. À la tête de nos États, peut-être qu'on aurait des êtres capables de penser les réalités corporelles d'autrui, et non des individus trouvant judicieux de reculer l'âge du départ à la retraite pour ajouter plusieurs années de souffrances à des corps déjà exsangues. » (pp. 148-149)
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Des années plus tard, loin du giron familial, j’ai fait des études
universitaires. À la Sorbonne, de la philo. À Sciences Po, des sciences
sociales. J’y ai découvert une autre manière de penser. Dans ces
espaces, contrairement à chez moi, tout était politisé. On y pensait
en structures, en superstructures, en systèmes, en rapports de
domination, et on avait raison de le faire. Mais le bien-être n’y avait
pas sa place. Dans le monde universitaire, le corps n’a pas sa place.
Les muscles, les maux de ventre, les menstruations, les douleurs et
les hontes n’ont pas leur place. Chez les intellectuel·les, on
différencie le corps et l’esprit, l’émotionnel et le rationnel. En 2010, à
Sciences Po, on valorisait le manque de sommeil, les journées à
rallonge, les heures passées assis·es en bibliothèque, les gens qui
récitaient des exposés sans rougir et ceux qui débattaient sans
s’énerver. Si le corps existait, c’était seulement par le contrôle : en
tout temps, il fallait afficher un port de tête altier, être apprêté·e et,
dans l’idéal, légèrement sous-alimenté·e.
Quelques années dans le journalisme m’ont fait expérimenter à peu
près le même niveau de négligence psychologique et corporelle. Aux
nuits blanches servant à écrire des papiers qu’on vous commande
sans politesse, s’ajoutaient les blagues graveleuses qu’il fallait
encaisser sans sourciller et les horreurs de l’actualité, dont il fallait
témoigner sans s’en montrer affecté·e.
Comment des espaces ayant la prétention de vouloir améliorer
l’existence des gens peuvent-ils à ce point nier le corps et ce qui se
passe à l’intérieur ? C’est un mystère. Comment peut-on croire que,
depuis de tels environnements, froids, violents et dans la négation
totale de notre bien-être, puisse émerger autre chose que des
solutions froides, violentes et dans la négation totale de notre bien-
être ? Mystère aussi.
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Nous sommes sociabilisé.e.s à ignorer, mépriser ou au mieux à tolérer tout ce qui touche à la vulnérabilité et aux besoins particuliers des autres, encore plus lorsque ceux-là relèvent du tabou. Mais nous pourrions tout à fait nous re-sociabiliser à éprouver du plaisir dans les actes du care les plus anodins. Demain, peut-être que nous adapter aux besoins des autres dans les espaces de bien-être nous procurera autant de joie que l'acte de bien-être en lui-même.
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En remettant nos corps au centre, peut-être que l'on considérerait davantage le corps des autres. Alors, peut- être concevrait on les villes pour que tous les corps puissent en jouir. A la tête de nos Etats, peut-être qu'on aurait des êtres capables de penser les réalités corporelles d'autrui, et non des individus trouvant judicieux de reculer l'âge du départ à la retraite pour ajouter plusieurs années de souffrances à des corps déjà exsangues.
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Toute petite, pour me garder, iels me déposaient dans un coin de
leur cabinet, une grande pièce attenante à notre logement. Installée
entre mes coloriages et mes poupées, j’étais aux premières loges
pour les voir diagnostiquer et traiter toutes sortes de blocages et
dysfonctions somatiques.
Ma présence amusait beaucoup les patient·es. En général, iels
ressortaient du cabinet familial en allant déjà mieux. Mes parents
faisaient tout pour : iels adoraient leur métier et étaient
déterminé·es à améliorer le quotidien de ces gens. Pas une fois
cependant je ne les ai entendu·es dire que si monsieur X avait si mal
au dos, c’était peut-être parce qu’il avait commencé le travail à
16 ans. Que si le torticolis de madame Y revenait souvent, c’était
qu’elle avait du mal à trouver le sommeil depuis son licenciement.
Que si madame Z avait ce problème chronique au genou, c’était sans
doute parce qu’elle travaillait debout pour un salaire qui ne lui
permettait pas de déléguer ses tâches ménagères une fois rentrée
chez elle. Avec le recul, je me demande pourquoi je ne les ai jamais
entendu·es parler du lien entre les souffrances physiques de ces gens
et leur réalité sociale.
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6. « […] Comme l'explique l'anthropologue Jérémie Piolat dans son livre _Portrait du colonialiste_, ces pratiques ancestrales et vernaculaires ont bien existé dans les cultures occidentales. Et si elles se sont perdues, ce n'est pas par hasard : nous y avons renoncé, car rompre avec notre ancestralité nous a permis de nous ériger en figure de la modernité et de justifier, du même coup, notre légitimité à dominer le reste du monde. Mais cette rupture ne nous a pas laissé.es indemnes : elle a fait de nous des êtres "tissés de manques". […]
Là se trouve à mon sens la clé de notre problème : dans une culture occidentale qui a fait de la rationalité son alpha et son oméga, il nous est difficile d'assumer les chemins sinueux et non scientifiquement prouvés que nous empruntons parfois pour aller mieux. Alors, l'une des stratégies que nous adoptons est de nous dissimuler derrière les sagesses et les spiritualités d'autres cultures, dont on considère, au fond, qu'elles sont extérieures à la modernité. En fait, nous leur déléguons, dans une sorte de condescendance un peu raciste, la charge de l'irrationnel. » (pp. 119-120)
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Un divorce plus tard, ma mère s’est formée à l’accompagnement
psychologique. Ce n’étaient alors plus seulement des squelettes et
des muscles qui défilaient dans le cabinet familial, mais des
individus entiers, cherchant à s’alléger des peines qui pesaient sur
leur psyché. Je n’avais plus l’âge de traîner dans un coin, mais
comme tout ceci m’intéressait fort, je soutirais des infos. Le plus
souvent, les histoires que j’obtenais étaient des histoires de femmes,
les plus enclines à entreprendre un travail émotionnel. Il y avait
celles qui cherchaient à comprendre pourquoi leur mari les trompait
à répétition, celles que la maternité faisait souffrir en silence et
celles qui, à 12 ans, haïssaient déjà leur corps. Les hommes qui
faisaient le déplacement mettaient parfois trois consultations pour
dire « j’ai honte », « j’ai peur », « j’ai mal ». Il y avait ceux qui étaient
là à la demande d’une conjointe et ceux qui cherchaient à faire taire
cette attirance pour un collègue de travail. Il y avait, évidemment, de
nombreuses victimes de harcèlement, d’agression, de viol et
d’inceste.
Pendant des années, j’ai vu ma mère accompagner ces personnes
avec passion. Pas une fois cependant je ne l’ai entendue dire que ces
souffrances-là étaient imputables à un même bourreau : le régime
patriarcal. Elle ne le disait pas car elle ne le voyait pas, ce patriarcat,
posté en embuscade dans la vie des gens comme dans la sienne.
Dans les années 2000, l’ère #MeToo était un horizon lointain. Reste
que si elle avait pris en compte le caractère systémique de ces
problèmes, ma mère aurait pu les appréhender autrement. À une
femme venue consulter pour un mari négligent, elle aurait pu dire :
« Votre mari vous traite mal car nous vivons collectivement dans un
système patriarcal qui le lui permet. En un sens, il le valorise même
pour cela. Ce même contexte fait que votre entourage ne voit pas ce
qui se joue. Résultat, personne ou presque ne prend la peine de vous
défendre face à ces mauvais traitements : vous êtes donc très seule
dans cette situation. Vous-même lui donnez sans doute beaucoup
d’excuses, car on vous a aussi appris à être très tolérante vis-à-vis
des hommes, en particulier dans le cadre du mariage hétérosexuel –
le seul légal à cette époque –, qu’on vous présente comme l’acmé de
votre existence. Il est enfin tout à fait normal que vous ayez peur de
prendre des mesures pour vous soustraire à ses comportements :
dans une société patriarcale, se retrouver seule, pour une femme, est
parfois bien pire que de supporter une situation maltraitante. » Bref,
elle aurait pu replacer la réalité de cette personne dans un contexte
social et culturel. Elle aurait pu politiser son mal-être.
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Nous aurions tout intérêt à opter pour des pratiques qui nous permettent de résister au système en nous y "désadaptant". Je m'explique : depuis l'enfance, nous intégrons, dans nos corps, des logiques et des fonctionnements qui nous permettent de nous adapter aux modes de vie contemporains. Ainsi, dès l'école maternelle, nous apprenons à nous lever très tôt et à demeurer assis.es des heures durant, au mépris de nos besoins physiologiques les plus primaires. Peu à peu, nous apprenons à nos corps l'efficacité et la performance. Le repos devient de la fainéantise, et l'oisiveté, une tare morale. En parallèle, nous apprenons à faire taire nos émotions, à nous tenir à distance de nos paysages intérieurs, à ne plus vivre nos corps autrement que comme des objets servant à produire, à décorer ou à dominer. Bref, nous nous désincarnons.
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Dans le milieu du bien-être, il est d’usage de promettre aux gens de grandes choses : une meilleure vie, un équilibre psychologique, corporel et spirituel, bref, le bonheur. Pour atteindre ces états complexes, dont on cherche pourtant le chemin depuis l’Antiquité, il suffirait de s’auto-optimiser, grâce à des pratiques allant de la nutrition au fitness, en passant par la méditation, le développement personnel, les soins esthétiques, le coaching et une multitude de pratiques aux accents new Age. Cette logique de perfectionnement continu, qui implique de consommer toujours plus, est une aubaine pour le capitalisme,
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