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Citation de araucaria


(...) Les pauvres du tiers monde ne connaissent pas le désespoir. La première fois qu'on me fit cadeau pour les chiffonniers de médicaments venus d'Europe, le médecin éclata de rire en ouvrant le paquet ; "Des tranquillisants! mais pour qui, au bidonville? Je les emporte pour les beaux quartiers où il m'arrive d'en prescrire." En France, quel appétit pour les tranquillisants? Plus profondément, chez combien de chômeurs, de prostituées, de SDF, et même dans les confidences reçues de tant de jeunes dont la misère n'est pas matérielle, n'ai-je pas rencontré ce néant : ne plus croire en rien, être au fond d'un trou, ne pas voir l'issue, penser que rien ne sert à rien? Pourquoi vivre? Ailleurs, une mentalité tout à fait différente empêche le désespoir. Cette attitude face à l'existence se satisfait de peu de chose car un objet récupéré constitue un trésor. Lorsque les idéaux de vie sont très simples, les solutions aux problèmes apparaissent comme à portée de main : on peut toujours vendre des pépins sur le trottoir, gagner cinq piastres, s'acheter du pain et de la salade, s'asseoir, content, avec des copains pour manger ensemble.
Finalement, ce sont deux mondes à des années-lumière l'un de l'autre. Je ne dis pas que, là-bas, tout est bien. Je dis qu'ici, pour les individus, cela peut- être pire. Je m'insurge contre les injustices subies dans le tiers monde, je refuse le statu quo, je ne prétends en aucun cas qu'il s'agit d'un système idyllique. J'affirme pourtant que, là-bas, les pauvres ne sont pas des misérables dans la détresse, mais des êtres humains qui jouissent de la vie telle qu'elle se présente. Ici, une certaine psychologie et un type de système social provoquent une sensation générale de vide, un sentiment d'agression et d'injustice. Pourquoi les uns sont-ils privés des biens qui passent sous leurs yeux, à portée de main, et dont d'autres jouissent? D'une part, ceux qui sont en situation d'exclusion ont connu des jours meilleurs et, d'autre part, la dynamique d'échec dans laquelle ils sont embarqués les désocialise et constitue une impasse. Voici la misère fondamentale : je ne suis rien et je ne serai jamais rien, pour personne.
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