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Critiques de Adolphe Retté (2)
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Dans la fôret (et autres textes)

Connaissez-vous vraiment la forêt ?

Connaissez-vous la forêt d'Adolphe Retté ? Cette curieuse métamorphose de mots en une alchimie sensorielle, cette écoute avec les yeux, cette présence temporelle qui abandonne plusieurs visages au regard fasciné du lecteur ?

Entrez dans la forêt. Revenez sans arrêt sous cet arbre, ou cet autre, respirez-le, écoutez-le, fermez les yeux, rêvez.

On peut s'y cacher, la forêt nous rend invisible, on entre dans son cercle, on disparaît sous les feuillages, on désapparaît aux yeux des hommes.

Une caverne à l'air libre. Asile hors du temps, récits du merveilleux qui ne sont pas racontés mais qui s'incarnent, s'articulent en sous-main, en sous-bois. le dehors, d'emblée, est aboli. Plus de circulation, d'événements, de fausses informations, de bêtises, de désolantes cotations, de psychisme abusif ou d'hystérie inutile : la forêt interrompt tout. Elle rompt.

Elle illumine de l'intérieur, elle irradie les rêves. Il faut lire et relire la forêt. Elle est, faussement évidente, dissimulée, trompeuse, irrationnelle, violente, retenue, enchanteresse, extravagante, varie à mille occasions ; on se croit nymphe, dieu ou déesse, Pan enivre l'espace, contrarie le temps.

Un règne végétal riche en noeuds, en torsions, en entrelacements. Rampant, grimpant, se limitant et se délimitant, exubérant, luxuriant, fort, faible, incroyablement fixé à la sauvagerie et la beauté des sentiments.

Adolphe Retté nous offre des pages exubérantes, ravageuses et sensuelles. "Hêtres, je pourrais dire vos troncs lisses et durs que les lichens damasquinent. Je pourrais rapporter vos luttes contre les autres essences pour l'empire de ce terroir et le bruit guerrier que font vos ramures arrogantes quand la bise les stimule."

L'arbre est un dieu, une métaphore, une âme. Quel paradis profond et frais, quel concert. Quel univers trouble et charmant. Les mots qui en forment le cercle n'en finissent pas de s'enchanter des figures incompatibles qui le bordent, toutes occupées à une action rentrée. Les nymphes perchées sur les roches, ont une insolence de bonheur énigmatique dont tous les esprits libres se souviendront. Aux forêts , tant qu'elles veulent, la puissance ou le bruit des richesses. À elles, la sûre jouissance de la gloire secrète, comme de la vérité qui se tait :

"Vous pins dont les rameaux s'alternent comme les vers d'un pantoum accompli, dont la voix onduleuse rappelle les plaintes de l'océan sauvage, je mettrai celle de mes âmes que je tiens pur la plus lyrique à l'unisson de la vôtre".

Fontainebleau frémit incessamment sous l'effort qui tend à l'éloigner d'un monde, elle s'affranchit de l'ombre immortelle d'un mystérieux cavalier, un élan plus ardent en la jeunesse des arbres.

"Toutes les divinités de l'olympe éternel passent tour à tour devant ses yeux charmés. Mais c'est surtout le Grand Pan, seigneur des germes, des bourgeons et des pollens, qui hante la forêt."

Les hommes sont imprécis, lacunaires, se trompent sur les détails essentiels, sont doués pour l'oubli sauf pour leurs humiliations, leurs ressentiments, leurs vengeances. Écoutez Mr Grume conter sa forêt des songes, ses futaies radieuses, ses Dryades insolentes, ses Sylvains complices.

Faut-il secouer l'enfance pour que resurgissent les paysages comme des livres d'images ?

Somme de beauté , d'énergie, d'allusion omniprésente, "Dans la forêt" ne se laisse pas résumer. C'est un livre envoûtant gardé passionnément par sa sentinelle d'arbres immortels.

Si vous souhaitez des nouvelles de ce surprenant Monsieur Retté, lisez La belle postface de Norbert Gaulard

car "La forêt vous réserve ses profondeurs les plus reculées pour y développer la cosmogonie de vos rêves"



Anne Bolenne
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Dans la fôret (et autres textes)

Le naturisme, c’est aussi un mouvement littéraire ! Adolphe Retté un temps fut de ceux-là. "Dans la forêt" en porte témoignage. Trois textes sont présentés ici. Le premier, "Dans la Forêt", qui a donné son titre à cette édition, est une redécouverte de la nature. Une sorte de renaissance, ce que l’auteur vit comme telle, s’exilant de Paris pour Fontainebleau. On remarquera l’emploi des noms de mois du calendrier républicain pour désigner la période du printemps, celle où brame le cerf. L’automne des feuillages dorés, pâlis, empourprés çà et là, sera, lui, retourné au calendrier grégorien, Retté parlera alors d’octobre et de novembre. On sait que cette tentative de retour à la nature n’aura qu’un temps, Retté abandonnant le Grand Pan pour se convertir au christianisme. Fils de ce XIXème siècle romantique, il aura cherché à se ressourcer auprès des grands arbres et des dieux de la forêt.



Les deux textes qui suivent, dignes héritiers de la littérature fantastique, sont, eux aussi, un hommage à la forêt. On s’y promène entre fantasme et réalité, le narrateur prenant toujours soin de maintenir le doute.



Dans le premier texte, "Le Chasseur Noir", les codes sont là bien sûr : l’Écosse, la pièce dans l’obscurité, l’histoire rapportée par quelqu’un qui l’a entendue raconter, la réfutation par un esprit positif… ainsi que les origines attestées de la légende. La forêt sert naturellement de décor à une histoire supposée faire peur.



Dans le deuxième texte, "La Dryade", la forêt n’est plus seulement le lieu de l’histoire, les arbres sont bien vivants, mais leur intégrité est jalousement gardée. Les hamadryades qui les accompagnent n’accepteront pas que la main de l’homme vienne abréger leur vie, fût-elle finissante. Cette vengeance de la nature marque le point culminant de la culpabilité romantique. Les dieux indiquent clairement à l’homme qu’il doit respecter la vie sous toutes ses formes, Adolphe Retté n’ira pas plus loin ; il songera au suicide, ce grand rêve d’un retour purificateur vers la forêt primitive s’effondrera :



Je m’effondrais, plein d’épouvante, sous ce cauchemar quand la voix diabolique se fit entendre : « Voilà ton âme, dit-elle. Comprends-tu maintenant que rien ne peut plus la purifier ? Tes prières ont échoué ; le stupide espoir que tu gardais dans un Dieu que tu dégoûtes t’a déçu. Tue-toi donc, lâche ! »



Ces quelques textes ne donnent bien sûr qu’un aperçu de l’œuvre de Retté, mais tels qu’ils sont présentés par le Vampire Actif, accompagnés de documents qui éclairent leur genèse, ils offrent une ouverture sur une littérature que l’on avait eu tort de mettre de côté.



(critique de Penvins, publiée sur e-litterature.net)
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