Je sortis les croquis de leur cachette. J'avais commencé à dessiner les lieux par lesquels j'étais passé dans ma jeunesse. Les premiers jours de la libération ressurgirent. Au premier plan, Siegfried, Yossef-Haïm et Hersh, près du feu, et à l'arrière-plan, l'orchestre des soldats russes. Bizarrement, je voyais cette période comme des jours heureux. J'avais passé des heures à croquer ces scènes, pour conserver une trace du prodige dont nous étions les témoins, si porteur d'espoir : tout redeviendrait comme autrefois. Je reviendrais dans ma maison, je retrouverais mon père et ma mère, mes camarades de même, et toutes les familles seraient de nouveau réunies.