Les enfants n'entendent rien aux conflits ni à la politique.
L'enfance s'écoule toujours oublieuse du passé et ignorante du futur. Comment imaginer que les lieux qui imprègnent notre quotidien, qui bercent notre vie, qui nous couvrent et nous protègent pourraient un jour disparaître de notre environnement ? Quelle menace pourrait un jour rompre ce bonheur ? Et pourtant, la guerre éclate, brutale et cruelle.
La défaite s'était insinuée dans cette horde disciplinée de nomades scotchés à leurs maigres biens. Dans leurs regards, il n'y avait ni révolte, ni haine ni panique. Seulement une immense tristesse. Nous partions presque sans bagages, comme trois ou quatre générations auparavant étaient arrivés nos ancêtres, pleins d'espoir, tournés confiants vers l'avenir. Et maintenant, c'est vers le passé que chacun se tournait, essayant d'emporter l'essentiel, les souvenirs des meilleurs moments, essayant de comprendre où et quand tout avait basculé jusqu'à cette situation.
Cette bande d'amis avait fait d'un coin de plage, d'une tente en toile ou d'un cabanon grand comme un mouchoir de poche, un palais merveilleux. Ils vivaient leur vie simplement, en savourant le quotidien, sans luxe, sans projets, sans à priori, sans envisager de changements. Les choses étaient ainsi parce qu'ils en avaient hérité ainsi.