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3.6/5 (sur 5 notes)

Nationalité : France
Né(e) le : 12/05/1978
Biographie :

Diplômé de l'Eole Nationale des Beaux Arts de Nancy, Alex Porker vit à Paris. Il a notamment écrit "Fermons les yeux, faisons un vœu" en 2008 et Makeup Artist en 2012

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Bibliographie de Alex Porker   (3)Voir plus

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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
En proie à une somnolence végétale et fumant cigarette sur cigarette, Bertin était à bout de force. Chiffonné. Recroquevillé sur lui-même, il passa dès lors le plus clair de la nuit à lire à la bougie et à jeter un œil égaré vers sa télévision qui passait les enregistrements de spots publicitaires ineptes, de clips, talk-shows retransmis en mondovision où Vinyl apparaissait aux temps révolus de sa gloire.
Elle était déjà malade. Cela ne faisait aucun doute. Maintenant il s’en apercevait. Il se rendait compte que la vie l’avait déserté depuis toujours. Que, derrière ses phrases occultes qu’elle terminait comme une seiche projetant son encre défensive sur le monde des rêves, que derrière le masque fantomatique de son épais maquillage, l’inexorable dépravation de son visage était déjà à l’œuvre. D’émission en émission, et, comme s’il avait été re-filmé des millions de fois, il se décomposait, se dégrafait lambeau par lambeau. Ses chairs noircissant, pourrissant en direct sous les projecteurs, les interviewers et les rires entêtés du public. Seuls ses yeux semblaient encore vivants. Indépendants à toute déchéance corporelle, impossibles, inextinguibles, imputrescibles, étincelants de haine. Avec ce vert incorruptible surtout qui, par-delà les pixels de l’écran, fixait Bertin et l’avalait lentement tel un œsophage externe.
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Les aéroclubs chics. Les clubs de tir à l’arc. Les billards. Les bibliothèques. Les partouzes du campus de l’UCLA. Les piscines (où, sous le sifflet ébahi du maître-nageur, Tim barbotait la clope allumée au bec). Les parcs d’attractions. Les conventions des fans-clubs. Les églises (où Bertin écrasait sa cigarette dans le bénitier avant de faire semblant de prier, agenouillé sur le banc, les mains jointes). Les tripots. Les croupiers camés. Les vernissages d’expos (où Bertin, ivre, se battait systématiquement avec les artistes qui exposaient). Les musées et leurs visites de groupes caquetantes et audio guidées. Les Studios Paramount. Les entrées assiégées des boîtes de nuit. Les physionomistes. Les voituriers. Les disc-jockeys foutus. Les chippendales désabusés. Les transformistes se saoulant dans leurs vestiaires à coups de démaquillants et de lotions capillaires. Les clubs go go. Les travelos ivres morts. Les lapdancings sordides. Les danseuses de French Cancan pour touristes iraniens. Les chauffeurs de taxi. Les salles de musculation. Les salons de beauté. Les coulisses des défilés de mode enfantine. Les marchés bios. Les salons de thé. Les ventes aux enchères (où, à cause d’une mouche particulièrement exaspérante, Tim acquit un bibelot de Michael Jackson des plus ridicules)…
Rien. Les jours défilaient.
– Vincent, on tourne en rond… Fit Tim, qui mâchouillait le bout de sa paille et considérait gravement son bibelot. Bertin était blême.
Les toiletteurs louches de caniches. Les hippodromes. Les cynodromes. Les bookmakers. Les patinoires. Les bowlings. Les pom pom girls. Les combats de catch féminins. Les combats de coqs. De scorpions. Les cours de yoga. De poledancing. De thérapies par le rire. Les tournages des pornos à San Fernando Valley (« Salut Vincent… Ça faisait longtemps…»). Les snuffs. Les saunas. Les magasins hi-fi (« Qu’est-ce que vous cherchez au juste ? » Demandait, agacée, la petite vendeuse à Tim, dont l’image du visage ruisselant se multipliait à l’infini sur les murs de télévisions). Les ateliers de pâte à modeler pour asociales (« Qu’est-ce que vous foutez là ? » Fit l’éducatrice à Bertin, qui errait dans les couloirs de l’institut). Les publics des jeux télévisés (où, à leur grand désespoir et devant des millions de téléspectateurs, ils gagnèrent tous les deux le premier prix. Une croisière absurde sur le Nil)…
Rien. Rien de rien.
Au bout de 15 jours, les deux hommes, éreintés, se rendirent à l’évidence. C’était un cuisant échec. Et l’échéance se rapprochait.
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Il y a de ces inconscients je vous jure (elle hoche la tête d’indignation)... J’en profite d’ailleurs pour vous avertir solennellement les enfants...Refusez toutes les propositions de ces infâmes créatures ! Car même en voie de disparition dans le centre de nos belles villes et malgré le travail acharné de nos milices, auxquelles je tiens personnellement ici à rendre hommage et que je félicite pour le zèle accompli ces derniers mois, les adultes rôdent encore...
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Julie s’élança comme une flèche hors la chambre puis, sans réfléchir, elle prit à droite. Courant à toutes jambes, elle déboucha du couloir dans la pièce principale de l’appartement, un grand salon où régnait un foutoir pas croyable. Arrivée au milieu, elle s’arrêta et considéra un instant les lieux. La fenêtre murée, le silence pesant, et toujours cet éclairage aussi puissant que permanent. Devant elle, il y avait un large rideau, et derrière elle, de l’autre côté de la pièce, se trouvait un long bar américain avec une grande cuisine dont la fenêtre était également murée. Tournant autour d’elle-même, Julie ne savait plus quoi faire et se mit à pleurer. Elle passa le lourd rideau et se retrouva alors dans un couloir très éclairé qui lui paraissait véritablement interminable. Au bout, il y avait une porte, mais cette fois-ci, elle avait tout l’air d’être celle de la sortie. Julie se rua dessus et tenta de l’ouvrir. Rien à faire, elle eut beau s’acharner, avec sa serrure électronique, cette maudite porte était solidement verrouillée.
– Imposs, imposs.
Julie sursauta. Quand elle se retourna, elle vit Niki. Accoudée au mur du couloir, elle était nue, une cigarette à la main.
– Te fatigue pas, reprit Niki en tirant sur sa cigarette, cette porte ne s’ouvrira pas.
– Je veux rentrer chez moi ! cria Julie.
– Imposs. C’est ici chez toi, répondit-elle d’un ton las.
– Non ! Je veux voir mes parents ! Je veux rentrer à la maison !
– C’est ici ta maison, bailla-t-elle, pas d’erreur, l’oisillon est bel et bien rentré au bercail…
Julie se mit alors à hurler et à marteler la porte de toutes ses forces. Fatiguée par ce tapage, Niki fit la grimace puis se décida à intervenir. Elle s’avança vers Julie, lui prit la main et la tira de force dans le salon.
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Un hyperenfant est un enfant – dont l’âge varie généralement entre 6 et 10 ans – qui se trouve être augmenté de comportements et d’attributs propres aux adolescents actuels de 16 ans et, par conséquent, potentiellement à tout autre jeune adulte. De sa morphologie enfantine, il conserve néanmoins l’apparence générale, la taille, l’absence de pilosité et une relative fraîcheur. Hyperprécoce tant sur le plan mental que physique, sexuellement actif, issu des classes privilégiées et disposant donc d’un pouvoir d’achat considérable, il peut évoluer à son gré dans la société adulte dont il est par ailleurs émancipé de toute autorité et de toute surveillance. Cette créature chimérique oisive a émergé de mon imaginaire par simple observation du champ culturel contemporain, et de sa tendance marketing régressive à surinvestir les qualités idiosyncrasiques de l’enfance et de son univers. Cet être transgénérationnel spéculatif est aussi le pendant mécanique, ou l’image érotique inversée, de l’adulte-enfant immature tel qu’il se présente aujourd’hui dans toute sa splendeur multifacette – atonie, inconsistance, instabilité, influençabilité, insatisfaction, futilité, perversité, narcissisme… – conséquence de la redoutable infantilisation progressive, ce totalitarisme mou, à l’œuvre au sein de la société.
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Une fois connecté, il éplucha ainsi la vie sociale de ces maudites jumelles. Et ce qu’il découvrit alors sur ce réseau parallèle lui fit froid dans le dos. Déverrouillées, leurs pages n’étaient qu’un ramassis malsain de ce qui pouvait se faire de pire au niveau de la pédopornographie inter-enfantine. Peu ou pas d’adultes. Il n’y avait que des enfants partouzant entre eux à l’infini sur les centaines de photos et de vidéos sidérantes que Jambart vit défiler devant ses yeux. Zoophilie, sadomasochisme, tout y passait dans la joie festive la plus abjecte. Et on se payait même le luxe du vintage cradingue avec ces vieilles cassettes numérisées où d’obscurs hippies sous LSD s’exhibaient nus en caressant leur bébé avant de le rouler dans la merde. Sans parler de ces antédiluviens films muets colonialistes des années 1930. Des pépites, à en croire les commentaires surexcités des gosses. Oh bien sûr pensa Jambart, ce n’était pas n’importe quelle enfance. C’était l’enfance dorée. Hyperconsumériste. Une enfance noyée dans un verre d’eau de piscine, une enfance insouciante jusqu’à l’os, belle jusqu’à la nausée, pénible progéniture dissolue et décadente issue d’un monde d’adultes qui ne se souciait guère désormais plus que d’une seule chose : leur ressembler.
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Le 17 septembre 2025 à Paris, un fait divers sans précédent fit la une de nombreux journaux. Dix ans se sont écoulés depuis, et, du dossier récemment déclassifié des « Demoiselles » (nom donné à l’époque par un journaliste du Parisien), de nouveaux éléments tenus longtemps secrets dans les archives de la police viennent apporter un éclairage inédit à cette affaire tragique qui défraya la chronique.
Sorti en octobre 2031, 5 rue Dickens (éditions Michel Lafon, sur des propos recueillis par Claire Félix), le livre du témoignage glaçant de la petite Julie Darrieux, 7 ans et demi au moment des faits, l’unique survivante de ce cauchemar à l’état pur, suscita en France une campagne de presse à grande échelle qui alerta les consciences sur le thème porteur de « l’enfance déviante ». Mais, si 5 rue Dickens fut rapidement promu au rang de best-seller dans une dizaine de pays, il faut se rendre à l’évidence : 10 ans après, à la vue de ces découvertes, cet ouvrage choc et, disons-le, un brin racoleur, ne suffit plus maintenant à décrypter ce qu’il faut désormais considérer non pas comme un phénomène isolé, mais bel et bien comme une possible et redoutable révolution sociétale en devenir.
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On signala tout d’abord les premiers foyers de cas dans les villages de pécheurs des régions reculées de l’Alaska puis, très vite, ce fut le tour des réserves indiennes du sud-ouest. Réserves Navajo, Chumash, Mohave, Apache et Pueblo… C’était incompréhensible et ce fut une véritable hécatombe. Personne ne comprenait fichtrement rien à rien mais tout le monde avait son petit avis sur la question. Certains geeks avaient même lancé le buzz de l’hypothèse crypto-zoologique. En effet, à voir ce petit film tourné quelques années auparavant au bord de l’océan Arctique par une équipe de scientifiques aux barbes gelées, on pouvait légitimement se poser des questions. Ce film, par ailleurs censuré par le gouvernement mais aussitôt piraté sur le Web, décrivait les mœurs d’obscures tribus autochtones isolées et parfaitement oubliées. Mais ce qui glaçait le sang dans les veines, c’était ces très jeunes enfants aux regards démoniaques et aux corps de vieillards en état de décomposition avancée, qui s’adonnaient à des rites confus et obscènes sur on ne sait quelle énorme et visqueuse substance marine échouée sur la plage. Ce n’était pas un canular. Enfin, on ne pouvait être sûr de rien.
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Les samedis soirs de grands vents bleu ciel, d'ouragans au creux du ventre, de bombes lacrymos à la menthe, je me ballade MP3, moi Billy, en pensant à ma Vickie Jones. Et devant le miroir des vitrines du boulevard, mes dix ans prennent soudain des poses hiératiques. Il faut que je vous explique. Je lui ai alors assuré que nous aurions un grand appartement tapissé de posters de pamplemousses, paons, papillons, planètes et galaxies tragiques. Qu'il y aurait un vaste dressing plein de kimonos pour elle et de camisoles de force pour moi. Que nous aurions dans notre living une fontaine où coulerait, clinquante et cristalline, la grenadine simple du bonheur, une eau de jouvence que nous enviera toute la vieillesse de ce monde adulte et stupide. Que je lui achèterais un pit-bull ailé aussi. Et que parfois, son beau corps de vinyle blanc voltigerait par-delà les crépuscules glacés et leurs longs rayons veinés de bleu pâle. C'est vrai qu'au fond j'étais peut-être un peu con, genre trop romantique. À table souvent, ma maman me surnommait même, en soupirant, Titanic Kid. (La ballade de Titanic Kid)
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Il avait alors étudié ces documents originaux rarissimes. Bobines vermoulues de films au celluloïd irréversiblement endommagé et rongé par une étrange gélatine. Photographies aux sourires irradiant un bonheur érotique aux couleurs délavées. Visages solaires exhalant une répugnante odeur d’eau de mer. Bandes sonores d’interviews inaudibles aux voix sous-marines lointaines et parfois terrifiantes… Car après le maquillage, ces femmes imaginaires, d’un autre temps, ces femmes en forme de coups de cravache, d’à-pic et de hasards balistiques mortels, étaient son unique obsession. Et il avait enfin trouvé en Vinyl le matériau de base idéal pour sculpter ce qui allait devenir le plus grand chef-d’œuvre de ce siècle.
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