AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de NuitDeChine


Les trois meubles du mage surranés.

I

MINÉRAL

Vase olivâtre et vain d’où l’âme est envolée,
Crâne, tu tournes un bon visage indulgent
Vers nous, et souris de ta bouche crénelée.
Mais tu regrettes ton corps, tes cheveux d’argent,
Tes lèvres qui s’ouvraient à la parole ailée.
Et l’orbite creuse où mon regard va plongeant,
Bâille à l’ombre et soupire et s’ennuie esseulée,
Très nette, vide box d’un cheval voyageant.
Tu n’es plus qu’argile et mort. Tes blanches molaires
Sur les tons mats de l’os brillent de flammes claires,
Tels les cuivres fourbis par un larbin soigneux.
Et, presse-papier lourd, sur le haut d’une armoire
Serrant de l’occiput les feuillets du grimoire,
Contre le vent rôdeur tu rechignes, hargneux.

II

VÉGÉTAL

Le vélin écrit rit et grimace, livide.
Les signes sont dansants et fous. Les uns, flambeaux,
Pétillent radieux dans une page vide.
D’autres en rangs pressés, acrobates corbeaux,
Dans la neige épandue ouvrent leur bec avide.
Le livre est un grand arbre émergé des tombeaux.
Et ses feuilles, ainsi que d’un sac qui se vide,
Volent au vent vorace et partent par lambeaux.
Et son tronc est humain comme la mandragore ;
Ses fruits vivants sont les fèves de Pythagore ;
Des feuillets verdoyants lui poussent en avril.
Et les prédictions d’or qu’il emmagasine,
Seul le nécromant peut les lire sans péril,
La nuit, à la lueur des torches de résine.

III

ANIMAL

Tout vêtu de drap d’or frisé, contemplatif,
Besicles d’or armant son nez bourbon, il trône.
À l’entour se presse un cortège admiratif
Que fait trembler le feu soudain de son oeil jaune.
Il est très sage, et rend justice sous un aulne
(Jadis Pallas en fit son conseil privatif) ;
Il a pour méditer l’arrêt, esprit actif,
Et pour l’exécuter griffes longues d’une aune.
Doux, poli, le hibou viendra vous prévenir
Quand l’heure sonnera que la Mort vous emporte ;
Et criera trois fois son nom à travers la porte.
Car il déchiffre sur les tombes l’avenir,
Rêvant la nuit devant les X philosophales
Des longs fémurs croisés en siestes triomphales.
Commenter  J’apprécie          00









{* *}