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Citation de jmlire92


Debout à côté des valises, ils attendaient la voiture. Jules et Jean partaient en vacances au bord de la mer avec leur mère Mathilde, leur grand-mère Valentine et leur jeune oncle Pierre. Cela saute aux yeux quand on s'attarde sur la photographie : ils étaient riches, privilégiés et éduqués. Qui parmi eux avait conscience que les classes laborieuses n'avaient pas droit à un repos annuel ? Qui imaginait que cette iniquité disparaîtrait et que les congés payés seraient institués pour tout le monde ? Y pensaient-ils ? Étaient-ils capable de juger justes et nécessaires des réformes dont ils n'avaient pas besoin eux-mêmes et qui bouleversaient les pratiques usuelles ? Je me le demande sans connaître la réponse. Les Bourgeois n'avaient pas besoin du progrès social : ils partaient en vacances, ils possédaient des maisons de famille, ils louaient ce qu'ils voulaient où ils voulaient. La famille allait à Blanville ou Bénerville, là où se rendaient aussi les duchesses amies de Marcel Proust qui ne s'y montrerait jamais plus. Étaient-ils amusés d'être en vacances à côté de la villégiature qui servit de modèle à Balbec ? En tout cas l'habitude était prise : Valentine, Gabrielle, Mathilde et leurs enfants commençaient l'été sur la côte normande... L'épiscopat français n'avait pas encore publié son code de l'habillement féminin, en réaction aux maillots de bain, robes courtes et autres exhibitions, mais Mathilde et Gabrielle se montraient plus que décentes, elles étaient carrément élégantes, assises dans le sable avec leurs blouses et leurs chapeaux... Aucune ne se serait baignée. Était-ce même une activité imaginable pour ces dames ? ... pour une fois Mathilde n'était pas enceinte. Elle donnait la main à Jules, remettait droit son bonnet de coton, avant de le regarder jouer avec le sable, sa pelle et son seau. Nicolas se réveillait, elle recommençait de prendre, de câliner et de rajuster, tandis que Gabrielle faisait de même avec ses enfants. Elles étaient deux vies dévolues à fabriquer des vies et rien ne semblait pouvoir interrompre  cette vaste fabrique de chair, rien sauf la disparition d'un des deux géniteurs..."
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