Alphonse Arzel

Si Goscinny a situé son village gaulois du côté d'Erquy, c'est le maire de Ploudalmézeau qui allait incarner Astérix. L'image s'est imposée à moi lors de notre premier voyage à New York où nos avocats américains avaient leurs bureaux.
Ce soir-là, à l'angle de Broadway et de la 42e Rue, surplombé par les légionnaires du Nouveau Monde qui le dépassaient d'une tête, Alphonse était Astérix. Il ne lui manquait que la paire de moustaches. La disproportion des forces était écrasante. Écrasante aussi la hauteur des gratte-ciel de Chicago, surtout celle de l'immeuble en marbre blanc, siège d'Amoco. Au moins avions-nous là la preuve indiscutable que nos adversaires étaient solvables !

Dans notre esprit, la manifestation devait s'achever à l'Elysée. Nous voulions dire au Président combien nous étions las de notre perpétuel état de victime, mais il nous fallut déchanter : au lieu des responsables de l'état, c'étaient les CRS qui nous attendaient.

Les pétroliers sont un peu comme les chiens. Ceux-ci se soulagent sur nos trottoirs et devant nos portes. Eux, ils font devant nos plages et sur nos côtes. Nous pouvons pardonner à nos animaux familiers, mais pas à des armateurs dont le comportement sans gêne est inadmissible.

Le Boeing 747 passa au-dessus de la Bretagne par temps clair avec un beau ciel bleu. Chacun la contemplait émerveillé. Nous avions l'impression de voir une carte, à l'école, et c'était notre pays vu du ciel. Et l'un ou l'autre reconnaissait sa ville, son village et presque son clocher.