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Citation de Zazaboum


LE VASE BRISÉ  
Il y a des jours : qu’on mette sa main à droite, qu’on mette sa main à gauche, c’est partout dans la merde. Ce matin, un beau vase qu’elle aimait, Zonzon voulait le changer de place et vlan ! le vase s’ouvrait en six morceaux, par terre.
Cet après-midi, un type lui promet :
– Yes, je te donnerai six couronnes.
Et au lieu de six, il n’en lâche que trois.
Et voilà qu’à l’instant, dans cette petite rue, pour aller au Cercle, elle rencontrait qui ? Cette vieille bique, ce sale chameau, cette putain à perruque de Betsy l’Angliche.
Zonzon, on s’en souvient, détestait Betsy. Depuis l’histoire du portefeuille surtout ! Et puis l’Angliche était trop maigre, maigre à dire que son derrière ressemblait plus à une assiette qu’à un véritable derrière. Si c’est pas dégoûtant ! Et puis pendant des mois, elle avait été la môme à D’Artagnan qui ne voulait pas de Zonzon, et puis elle avait des dents en toc, et puis s’il fallait dire tous les « pourquoi » on déteste les gens. Il y en avait un pourtant, mais celui-là, elle ne le disait guère : c’est qu’on lui avait dépiauté son Gustave et qu’on l’avait dépiauté juste après l’histoire du portefeuille, pendant le temps que cette garce vivait avec ce D’Artagnan qu’elle ne supportait pas.
Alors, après des semaines sans la voir, la rencontrer un jour à merde, et dans cette ruelle où il y avait à peine de la place pour une seule : mille dieux, son sang ne fit qu’un tour.
Sale Angliche ! De près, elle lui parut encore plus maigre.
Zonzon se campa :
– C’est-y pour te fiche de moi que tu te mets en travers de ma route ?
L’Anglaise ouvrit sa bouche toute remplie de fausses dents :
– How ?
Quoi How ? Les mains de Zonzon partirent toutes seules lui apprendre, par le cou, à répondre « how ». Elle serra une bonne fois.
– C’est-y, recommença Zonzon, pour te fiche de moi ?…
– No !
Quoi No ? Zonzon serra une nouvelle fois :
– Alors, c’est-y pour te fiche de moi ?
Cette fois l’Anglaise, sans répondre, ouvrit plus grande la bouche, ce qui rendit Zonzon encore plus furieuse :
– Chameau, c’est-y à manger ton foin que t’as avalé ton râtelier ?
Et une fois pour les autres, ce que Zonzon avait sur le cœur, Zonzon le vomit par la gueule.
Sale Angliche ! Que c’était de sa faute que Zonzon avait brisé son vase : vlan ! Zonzon l’étendait par terre comme ce vase.
Que c’était sans doute ce salaud de D’Artagnan qui l’avait rendue si plate… vlan, Zonzon lançait le poing où elle était si plate…
Que c’était une honte de montrer aux gens un si maigre derrière… vlan ! son pied dans ce derrière.
Et puis, qu’elle était une rosse… Et puis qu’elle était une sale bête… Et puis qu’elle savait bien quelque chose, que D’Artagnan avait eu son tour et que si elle ne foutait le camp tout de suite, Zonzon l’emmerderait pour de bon à travers sa sale gueule.
Elle allait le faire.
Et voilà, tout à coup, à se laisser secouer, à être trop molle pour se défendre, l’Angliche, poussant un drôle de « How », se mit à tousser, puis cracha un de ces machins rouges, comme en crachent les malades prêts à crever. Zonzon ne s’attendait pas à cela. Elle examina Betsy. Elle comprit pourquoi, avec des joues si creuses, on a un derrière qui ressemble à une assiette et quelque chose remua dans son cœur. Tant pis : à cause de Gustave, elle avait « un chameau » sur la langue. Elle dut le sortir :
– Betsy, fit-elle, c’est moi l’chameau !
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